L’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts (Beit Al Hikma) a organisé, jeudi 11 et vendredi 12 décembre 2025, à son siège à Carthage, un colloque intitulé «De l’esclavage en Tunisie à son abolition et ses manifestations contemporaines», visant à réinterpréter, d’un point de vue académique, une page de l’histoire du pays dans ses dimensions sociale, culturelle et identitaire.
Les travaux ont été répartis en quatre sessions, avec des présentations, en arabe et en français, portant sur l’histoire de la présence des Africains à la peau noire en Tunisie; les origines du décret d’abolition de l’esclavage signé par Ahmed Bey le 23 janvier 1946; le décalage entre l’abolition légale et les pratiques sociales ; et la persistance et manifestations actuelles du phénomène.
Ont été abordés, entre autres, des thèmes qui relient l’archéologie, l’histoire des idées et les impacts socio-économiques, notamment une présentation sur la libération des oasis et ses effets sur la société et l’économie dans la seconde moitié du XIXe siècle, avec Kebili cité comme étude de cas.
Une autre session a été consacrée au patrimoine culturel et musical, avec une présentation sur la musique Stambali, envisagée comme un parcours allant de l’expérience historique de l’esclavage à l’expression de l’identité tunisienne.
Parmi les intervenants du forum figuraient Taoufik Ben Ammar, Jaâfar Ben Nasr, Marwa Marnaoui, Hayet Mejri, Hichem Ben Ammar, Salah Trabelsi, Mansour Abdeljelil, Yamina Aouni, Leïla Zaghdoud, Anis Ben Ammar et Rabah Arqoubi. La référence à l’abolition de 1846 s’appuie sur un patrimoine documentaire internationalement reconnu : l’UNESCO décrit, dans son registre « Mémoire du monde », un ensemble d’archives relatives à l’abolition de l’esclavage en Tunisie (1841-1846), comprenant le décret d’Ahmed Pacha Bey, des circulaires, de la correspondance, des actes notariés et des registres fiscaux conservés aux Archives nationales tunisiennes. La Tunisie fut le premier pays arabo-musulman à abolir la traite négrière en 1846, bien que cette abolition n’ait eu lieu qu’en 1881, avec l’occupation française. Le Yémen et l’Arabie saoudite, par exemple, ne l’ont abolie qu’en 1962.
D’un point de vue démographique et social, la conférence Beit Al Hikma offre ainsi l’opportunité de revisiter les dynamiques de présence, d’intégration et de marginalisation historique des populations noires en Tunisie, ainsi que les traces qu’elles ont laissées dans les territoires, les pratiques et les mémoires collectives. Elle vise à relier passé et présent sur une base documentaire et interdisciplinaire.



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