Le parti islamiste Ennahdha a menacé, dans un communiqué publié aujourd’hui, mardi 19 mai 2020, de saisir la justice contre les parties qui sont derrière «des campagnes de dénigrement et de diffamation visant ses dirigeants et à leur tête, Rached Ghannouchi».
Ennahdha a accusé ses détracteurs de vouloir «créer des tensions entre les Tunisiens» en instrumentalisant «des sites et des plumes suspects, ainsi que des chaînes et des médias étrangers hostiles à la réussite de la Tunisie», lit-on dans le communiqué, qui évoque des «allégations n’ayant aucun rapport avec la réalité».
Ce communiqué a été publié en réaction aux appels à enquêter sur l’origine de la fortune Rached Ghannouchi, ayant fait l’objet d’une pétition lancée par des activistes de la société civile ou encore des accusations de corruption l’impliquant lui et d’autres dirigeants du mouvement, à l’instar d’Adel Daâdaâ et Abdelkarim Harouni, cités, aujourd’hui, par le député Front populaire, Mongi Rahoui.
«Faut-il rappeler que Rached Ghannouchi a déjà fait sa déclaration de biens auprès de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc), en sa qualité de chef du parti et en tant que président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) ?», insiste Ennahdha dans son communiqué, en affirmant que la justice sera saisie contre les auteurs de ces «allégations et de ces campagnes visant à porter atteinte au parti et au pays»…
Notons que c’est la millionième fois que le parti islamiste menace de porter plainte contre ses détracteurs, menaces rarement suivies de faits.
On peut d’ailleurs se demander pourquoi l’appel à enquêter sur la fortune de Ghannouchi et d’autres dirigeants d’Ennahdha suscite-t-il autant d’énervement de la part des dirigeants islamistes, s’ils n’ont vraiment rien à se reprocher ?
Et puis, exiger une enquête sur la fortune d’un acteur politique important, qui plus est, président du premier parti politique dans le pays et président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), est dans l’ordre des choses dans une démocratie. M. Ghannouchi n’est pas une vache sacrée et pas encore un dictateur : il n’est pas au-dessus de la critique et doit être auditionné, non seulement sur sa fortune, mais aussi sur ses liens louches avec certains Etats étrangers, comme la Turquie et le Qatar.
L’homme n’a jamais vraiment travaillé, toute sa vie: d’où vient donc l’argent avec lequel il a acheté une villa de maître à Riyadh Andalous, pour ne citer que l’un de ses biens en Tunisie. Ne parlons pas de ses possessions à Londres où il vivait jusqu’en 2011 et où vivent encore ses enfants.
L’Instance nationale de lutte contre la corruption (Inlucc) n’aurait pas dû se contenter d’enregistrer la déclaration des biens de M. Ghannouchi. Normalement, son rôle consiste aussi à vérifier la conformité des déclarations avec la réalité des faits.
Alors les Nahdhaouis, portez l’affaire à la justice : ce sera une belle occasion pour tout déballer sur la place publique. Les Tunisiens ont le droit de tout savoir sur cet homme décidément très mystérieux et adepte du secret. Or, la démocratie qui l’a porté sur le perchoir a horreur des… secrets.
Y. N.
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