Si l’on veut vraiment respecter la morale et la religion, il faut impérativement abolir l’homophobie et mettre hors la loi le test anal par arrêté ou circulaire.
Par Farhat Othman *
Pour la première fois, on a enregistré récemment le non-recours à la présomption de culpabilité à la suite du refus d’un test anal par un prévenu qui a été libéré. Serait-ce le début de la fin du test anal, censé prouver des actes de sodomie, ou juste à cause du fait que le prévenu était un imam?
Le test anal est une honte absolue que rien ne peut justifier, un véritable déshonneur pour le gouvernement d’autant plus qu’il lui est parfaitement possible de l’interdire par simple circulaire. Aussi l’actuel gouvernement, comme ceux qui l’ont précédé, se rend-il coupable de souillure de l’image de la Tunisie qui mérite bien mieux, se devant d’être un modèle de respect des valeurs universelles.
Une pratique illégale et illégitime
Rien ne prévoit dans la loi le test anal et rien ne l’y justifie. Il est le résultat d’une pratique issue du temps de la dictature et des esprits nauséabonds des tortionnaires, se révélant des refoulés sexuels.
C’est une torture comme une autre, présentant le vice supplémentaire de déshumaniser la victime, bafouant sa dignité, violant son intimité. Or, on sait l’importance de l’intime dans une culture comme la nôtre.
Ce test est d’autant moins valide juridiquement qu’il entend donner application à un texte de loi datant de la colonisation, un texte scélérat représentant la dépendance de la Tunisie envers ses anciens maîtres coloniaux; car l’homophobie n’existait pas en Tunisie avant son introduction par le Code pénal qui fut l’œuvre du protectorat.
Or, on n’ose pas encore abolir cette survivance de la colonisation alors que les initiateurs de la loi l’ont depuis longtemps répudiée. Il faut dire que sans le recours au test anal, cette loi de la honte ne pourrait plus s’appliquer ou difficilement.
D’où la turpitude aggravée du gouvernement qui, tout autant que les juges qui ordonnent le test et les agents de l’ordre qui arrêtent les innocents pour les y livrer, peut parfaitement être tenu pour responsable de l’indignité ainsi faite à la Tunisie et à son peuple. Car notre société, au-delà des fausses apparences, n’a jamais été homophobe.
Violation de la morale et de la religion
L’homosensualité (mon terme pour homosexualité) est bien présente dans la société; mais elle se vit à bas bruit, en catimini. Car le sexe chez nous est bisexuel; il est conforme en cela à la règle dans la nature. De plus, c’est une nature voulue par Dieu pour une minorité de ses créatures, humaines ou non.
Avant la loi coloniale, la société n’avait nulle honte de ses mœurs; d’autant plus que l’amour du semblable est bien connu dans la culture arabe musulmane, ayant même été chanté et magnifié. Du temps où l’Occident, durant son Moyen-âge, agissait comme nous aujourd’hui, les sociétés musulmanes étaient championnes des amours homoérotiques. C’est le Moyen-âge occidental qui nous a exporté son test anal toujours à l’honneur chez nous.
En effet, contrairement à la Bible, l’islam n’a jamais été homophobe; le Coran ne comporte nulle prescription tout comme la sunna véridique; car ni Boukhari ni Mouslem ne répertorient aucun des faux dires rapportés par d’autres et qui sont ainsi d’une flagrante inauthenticité.
Au surplus, notre religion interdit-elle expressément de fouiller le cœur des croyants pour prouver leur foi, allant jusqu’à accepter les hypocrites: comment donc oser fouiller l’anus des gens pour dénoncer une nature par Dieu placée en eux?
Certes, il est des pays se prétendant musulmans qui tuent les gays; mais ils ne relèvent pas du vrai islam. Si on croit bien à tort qu’ils sont musulmans, alors pourquoi ne pas faire comme eux, tuer aussi les homos? Pourquoi ne pas même suivre l’exemple de Daech?
Il nous faut savoir, aujourd’hui, si l’on veut vraiment respecter la morale et la religion. Si oui, il faut alors impérativement abolir l’homophobie et commencer au plus vite par mettre hors la loi le test anal par arrêté ou circulaire.
Une honte aussi pour l’Occident
La persistance du test anal en Tunisie est également une honte pour ses partenaires d’Occident qui jouent double jeu en la matière.
D’abord, parce que nul n’ignore à quel point l’Occident est présent en Tunisie, y a de l’influence plus que jamais. Aussi une demande expresse de sa part auprès du gouvernement tunisien d’en finir avec ce test moyenâgeux ne saurait pas ne pas aboutir.
Ensuite, car l’Occident feint de tenir compte de l’excuse des homophobes, à savoir que cela relèverait d’un trait culturel qu’il importe de respecter. Mais est-il sérieux de tenir un tel discours de roublardise en une affaire aussi délicate, si sensible des droits humains où les victimes innocentes sont les boucs émissaires d’une tartuferie?
L’Occident, en général, et l’Europe, en particulier, qui est à nos portes, prix Nobel de la paix qui plus est, ont le devoir de bannir une telle malhonnêteté ne se maintenant que du fait de leur silence faisant banqueroute absolue des valeurs, du moindre humanisme. Et ce d’autant plus que la preuve irréfutable a été apportée que l’islam n’a jamais été homophobe.
Au vrai, l’Occident semble avoir beau jeu de justifier son honteux silence en prétendant respecter en cela la spécificité des pays musulmans, rejetant sur l’islam la tare de l’homophobie qui était plutôt honorée dans le judaïsme et le christianisme, jamais en en islam avant l’entrée de l’impérialisme sur ses terres. N’est-ce pas jouer ainsi en douce, de la part d’un Occident réveillé à ses démons judéo-chrétiens, de la carte de l’islam rétrograde, sa part d’ombre actuelle afin de nier ce qu’il était, u islam des Lumières?
Il est bien temps que ce jeu malsain cesse et que l’Occident, arrêtant de justifier ses propres turpitudes par celles de ses alliées intégristes, demande instamment à ses amis tunisiens d’abolir l’homophobie. Et qu’il les presse de commencer, sans plus tarder et par texte circulaire ou arrêté ministériel d’interdire tout recourt au test anal; ainsi, d’ailleurs, que tout test dégradant pour la personne humaine, comme le test de virginité.
De la sorte, nos partenaires d’Occident, si attentifs à leurs intérêts en notre pays, doivent y ajouter le respect des valeurs humanistes par leurs amis gouvernant la Tunisie. Cela doit se faire sans faux-fuyants ni atermoiements inutiles, comme on vient de le faire au Conseil des droits de l’Homme de l’Onu.
En effet, on s’y engage pour la forme, prétendant ne plus recourir au test anal, mais entendant en fait juste ne plus devoir l’imposer sans s’arrêter pour autant de brimer ceux qui s’y refusent en se basant sur ce texte de loi scélérat à abolir incontinent.
* Ancien diplomate et écrivain.
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