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Municipales 2018 : Nous sommes tous concernés par le cancer

Les listes électorales pour les municipales doivent intégrer dans leur programme un plan de lutte contre le cancer basé sur la promotion de la prévention et du dépistage de la maladie, qui sont aussi l’affaire des autorités locales et de tout citoyen.

Par Dr Karim Abdessalem *

La prévention et le dépistage du cancer doivent être au cœur des programmes municipaux de promotion de la santé. Les chiffres montrent que cette maladie augmente partout dans le monde. Les causes principales sont le prolongement de l’espérance de vie et l’exposition plus importante à des facteurs cancérigènes environnementaux et alimentaires.

En Tunisie, on enregistrait 12.000 nouveaux cas en 2003 (chiffres non actualisés). Le cancer atteint le plus fréquemment le poumon chez l’homme et le sein chez la femme. Les autres organes les plus touchés sont la vessie, la prostate et le colon.

Les progrès thérapeutiques sont considérables dans tous les domaines: chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie et hormonothérapie. Souvent associées, ces techniques offrent une chance réelle de guérison et permettent désormais de prolonger la vie des malades atteints des cancers les plus offensifs.

Le retard de diagnostic réduit les chances de guérison

Les performances thérapeutiques globales sont variables d’un pays à un autre. À titre d’exemples, le taux de guérison du cancer du colon est de 48% aux Pays-Bas et de 24,8% en Pologne. Pour le cancer du sein, il est de 72,8% en France et de 54,7% en République Tchèque. Cette différence ne résulte pas tant de la qualité des soins prodigués, mais plutôt, du stade de la maladie à partir duquel il débute. C’est dans le pays où le diagnostic de la maladie est le plus précoce et l’accès aux soins le plus rapide que le pronostic est le meilleur.

Dans notre pays, la maladie est malheureusement souvent constatée à un stade avancé. Le traitement proposé est alors lourd et mutilant avec une faible espérance de vie à 5 ans. La peur que véhicule cette maladie et la pudicité font partie des causes du retard de diagnostic.

Des symptômes, habituellement alarmants, tel qu’un saignement dans les urines, des crachats imbibés de sang ou encore l’apparition d’une masse au sein, sont ainsi souvent dissimulés ou minimisés en les rapportant au fameux coup de froid, jusqu’à un avancement du cancer au stade de métastases. Dans une fois sur quatre le cancer est déjà au dessus de toute ressource thérapeutique et il ne peut être proposé qu’un traitement palliatif pour soulager les douleurs ou d’autres gênants symptômes.

Les programmes de lutte contre le cancer s’appuient sur la prévention, le dépistage et le traitement. C’est sur les deux premiers piliers que l’échelle municipale doit agir pour lutter contre ce mal.

La prévention permet de faire reculer certains cancers par la réduction ou l’élimination des facteurs responsables clairement identifiés comme le tabac, l’alcool, certains agents physiques, chimiques ou infectieux. Les actions de prévention, multiples et variées, interviennent sur le mode de vie, l’environnement et le milieu professionnel.

Elles vont de l’éradication du tabac dans les lieux public, à la sensibilisation au danger de l’exposition au soleil, en passant par les campagnes de vaccinations des adolescentes contre des virus sexuellement transmissibles et responsables du cancer du col de l’utérus.

Un programme national de lutte en-deçà des espérances

Le dépistage consiste à détecter les lésions cancéreuses à un stade de début de leur développement, avant même l’apparition de symptômes. Il permet, par une action rapide, d’optimiser le traitement et de réduire les séquelles éventuelles. Seuls certains cancers font l’objet d’un dépistage systématique comme, le cancer du sein par la réalisation de mammographies, le cancer colorectal par la recherche microscopique de sang dans les selles ou encore le cancer du col de l’utérus par la réalisation de frottis cervicaux.

Notre programme national de lutte contre le cancer est loin d’atteindre ses objectifs. Il fait face aux tabous qui entourent cette maladie et aux interdits sociaux et moraux de parler de sexualité et d’organes intimes.

Le cancer est la source de situations dramatiques pourtant évitables par l’exclusion des facteurs de risque et le diagnostic précoce de la maladie.

La mobilisation pour un programme de prévention et de dépistage du cancer est parfaitement du ressort des conseils municipaux. Ils devront travailler en collaboration étroite avec le ministère de tutelle, l’Office national de la famille et de la population (ONFP) et les associations promouvant la santé avec en premier chef, l’association tunisienne de lutte contre le cancer.

Le combat contre cette maladie est l’affaire des autorités locales et de tout citoyen.

* Médecin et activiste de la société civile. 

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