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Les élections municipales pour les nuls

Aux prochaines municipales, les listes indépendantes n’ont aucune chance de remporter le moindre siège si elles se présentent en ordre dispersé.

Par Dr Karim Abdessalem

Ne vous fiez pas aux personnes qui font peser une incertitude sur la tenue des élections municipales. Elles auront bel et bien lieu avant la fin de cette année, car tout retard empièterait sur l’organisation des élections législatives et présidentielles de 2019 et mettrait à mal la capacité de notre pays à faire aboutir la transition démocratique. Le 17 décembre, date fixée pour ces municipales, approche rapidement, et il est grand temps de s’y préparer.

Je m’adresse ici aux citoyens fâchés et déçus du comportement des politiciens et de leur pratique incessante du retournement de veste; et en particulier, à ceux qui en sont venus à détester les partis politiques et qui veulent s’organiser en liste d’indépendants pour défendre les couleurs de leur commune.

Mais d’abord, il est utile de rappeler les principales modifications apportées à la loi organique relative aux élections (Loi n° 2017-7 du 14 février 2017) :

• Dépôts de candidature :

La demande doit être présentée auprès de l’Instance supérieure indépendante des élections (Isie) entre le 19 et le 26 septembre.

Elle doit comporter : la dénomination et le symbole de la liste; les noms des candidats en ordre de classement sur la liste avec pour chaque candidat une déclaration sur l’honneur, une photocopie de la CIN, un justificatif de la déclaration annuelle d’impôt sur le revenu et un quitus des taxes municipales; une liste complémentaire de substitution d’au moins 3 candidats.

Il est interdit à plus de deux personnes ayant des liens d’ascendants ou descendants, de frères ou sœurs, de se porter candidats sur la même liste électorale.

Les magistrats, les agents du gouvernorat, des délégations et des municipalités ne peuvent pas être candidat dans une circonscription électorale dans laquelle ils ont exercé leurs fonctions pendant au moins un an avant le dépôt de leur candidature.

Les militaires et les agents des forces de sécurité intérieure ont désormais le droit de participer aux élections municipales et régionales mais ils ne peuvent ni se porter candidats ni prendre part aux campagnes électorales et aux réunions partisanes.

L’opération de vote de ces agents a lieu avant le jour du scrutin.

• Le profil de la liste :

Le nombre de candidats sur la liste est égal au nombre des membres prévu du conseil municipal. Il est fixé au prorata du nombre d’habitants officiellement recensés. Par exemple, 24 sièges pour une commune d’une population de 25 à 50.000, 30 sièges pour 50 à 100.000 et 36 sièges pour 100 à 200.000 personnes.

Il faut présenter autant de femmes que d’hommes et selon la règle d’alternance entre eux.

La liste doit inclure, parmi les trois premiers, un(e) candidat(e) âgé(e) de moins de 35 ans. Le reste de la liste doit également inclure, parmi chaque 6 candidats, un(e) candidat(e) âgé(e) de moins de 35 ans.

La liste doit donc comporter au moins 1/6e de jeunes. Toute liste ne respectant pas ces derniers principes est rejetée.

La liste doit compter parmi ses dix premiers candidats une personne porteuse d’un handicap physique et titulaire d’une carte de handicap.

Toute liste ne respectant pas cette dernière condition est privée de subvention publique.

• Les dépenses électorales et la subvention publique :

La loi de 2017 relative aux élections municipales a introduit des modifications par rapport à la loi de 2014 en ce qui concerne les subventions publiques. Aucune aide publique au financement de la campagne électorale n’est attribuable à la liste candidate avant le début de la campagne.

Une subvention publique forfaitaire n’est versée qu’après la proclamation des résultats définitifs et uniquement aux listes candidates qui ont recueilli au moins 3% des suffrages exprimés et qui se sont pliées strictement aux obligations légales relatives à la campagne électorale et à son financement.

• Le mode de scrutin :

Les sièges sont répartis à la représentation proportionnelle selon le quotient électoral et au plus fort reste.

Le quotient électoral est déterminé en divisant le nombre de suffrages exprimés par le nombre de sièges réservés à la circonscription.

Les suffrages relatifs aux listes ayant recueilli moins de 3% et les suffrages blancs sont annulés et ils n’entrent pas en compte dans le calcul du quotient électoral.

Ne sont pas admises à la répartition des sièges, les listes candidates qui ont recueilli moins de 3% des suffrages exprimés.

Il est attribué à la liste autant de sièges qu’elle a atteint de fois le quotient électoral. S’il reste des sièges non répartis sur la base du quotient électoral, ils seront répartis, dans un deuxième temps, sur la base du plus fort reste.

Les têtes des listes gagnantes aux élections se présentent pour le poste de président du conseil municipal. Ce dernier est élu par les membres par un scrutin libre, secret, honnête et transparent.

Suite à ces quelques rappels, faisons un simple exercice de simulation en exploitant, par exemple, les données des élections législatives de 2014 dans la commune de La Marsa. 37.956 personnes avaient alors participé au scrutin pour élire une seule liste parmi 45 candidates. Seules 3 listes parmi ces 45, qui étaient en partie partisanes et en partie indépendantes, recueillirent plus de 3% des suffrages. Ces listes étaient Nidaa (23.757 votants), Ennahdha (5.794) et Afek (1.469).

Supposons maintenant que ce fut les résultats des élections municipales. On aurait :

1. Le nombre de votes pour 42 listes n’ayant pas atteint les 3%, c’est-à-dire 6.936, partiraient à la poubelle.

2. La Marsa comptant, selon le dernier recensement officiel, 92.987 habitants, le nombre des membres prévu pour le futur conseil municipal est de 30. Le quotient électoral serait de 31.020 : 30 = 1.034.

3. Ainsi Nidaa raflerait 23 sièges, Ennahdha prendrait 6 et Afek n’aurait qu’un seul.

Mesdames et messieurs les candidats indépendants, le paysage politique a certes changé en trois ans et il est probablement hasardeux d’extrapoler les statistiques de 2014 pour obtenir des prévisions pour les prochaines élections. Mais cet exercice veut quand même démontrer, si besoin est, que vous n’avez aucune chance de remporter le moindre siège si vous vous présentez en ordre dispersé. Plus il y aura de listes d’indépendants plus les partis en bénéficieront. Tirez leçon de vos erreurs.

Ne sous-estimez pas les partis, ils ont les moyens financiers, l’expérience du terrain et surtout une capacité de populisme largement prouvée.

Prenez pour modèle l’initiative citoyenne «la Marsa_change». C’est une plate forme de rencontre de tous ceux qui veulent se battre pour améliorer la qualité de vie de leur ville. Elle a pour objectif de réunir les potentiels et de les rassembler pour former une seule et unique liste.

Si nous n’arrivons à mettre notre ego de côté, rien ne nous différencierait de l’esprit partisan.

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