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Le développement de l’île de Djerba : Le Tourisme et après ?

L’île de Djerba peut prendre pour modèle la Catalogne un grand acteur industriel, des exportations dynamiques, tourisme et industrie de santé font d’elle une région prospère et un vrai moteur de l’économie espagnole.

Par Ali Gana *

Le tourisme et à moindre degré la pêche, l’agriculture et l’artisanat sont les filières qui font tourner la machine économique de l’île de Djerba, île de 150.000 habitants. Une relative prospérité économique par rapport à d’autres régions, bien qu’altérée par une forte saisonnalité, a fait de cette île une destination prisée des habitants des régions intérieures en quête d’un travail décent.

Néanmoins, beaucoup d’experts tirent la sonnette d’alarme quant au niveau de la capacité hôtelière. Il semblerait qu’on est arrivé à une saturation dont le dépassement aurait d’irréversibles conséquences écologiques. Aussi, rares sont les grandes entreprises qui s’aventurent à s’implanter dans ces terres vu son marché restreint et son éloignement géographique des grandes villes avec le coût de transport qui va avec.

Plusieurs acteurs (experts, société civile, partis…) donc s’activent pour réfléchir sur les pistes qui pourraient dynamiser l’économie de Djerba.

Djerba gouvernorat ? La fausse bonne idée…

Bien que ses caractéristiques géographiques et sa relative prospérité économique la prédisposent à devenir un gouvernorat, l’île de Djerba est sous tutelle administrative du gouvernorat de Médenine. Situation offensante pour beaucoup d’îliens qui avancent l’argument que le gros de la richesse du gouvernorat est concentré à Djerba sans que cela ne se traduise en termes d’infrastructures et de développement de l’île.

Certes, plus d’autonomie administrative de l’île pourrait avoir des impacts positifs en termes de développement. Un citoyen qui se déplace à Médenine pour quelques paperasses, un étranger qui se voit obligé de batailler au gouvernorat pour s’acheter une demeure à Djerba, un avocat qui est appelé à se rendre d’une manière hebdomadaire aux différentes cours de justice, c’est simplement inconcevable.

En un mot ce qu’il faut c’est plus d’autonomie en enterrant ces idées fantaisistes de collectivité territoriale à statut particulier, à l’image de la Corse ou de la Sicile.

Pont Adjim-Djorf

1,7 Km séparent le port de Rochelle de l’île de Ré. Un pont reliant cette dernière au continent a été construit par les autorités régionales pour la bagatelle somme de 700 millions d’euros. Le service de la traversée est payant, dans un premier temps, pour rentabiliser l’investissement, mais il deviendra un service public gratuit.

Imaginer un pont de 4.5 Km entre Adjim et Djorf, le coût ça doit dépasser le milliard de dinars et le retour sur investissement nécessiterait 15 ans (chiffres approximatifs non basés sur des études scientifiques). Avec des caisses vides, l’Etat peut-il se le permettre? Difficile. Un privé, un pays ami donateur ou un bailleur de fonds peuvent-ils se hasarder dans un tel projet ? On peut toujours espérer.

La Catalogne, un modèle à suivre

La Catalogne réalise des performances économiques enviables. Un grand acteur industriel, des exportations dynamiques, tourisme et industrie de santé font d’elle une région prospère et un vrai moteur de l’économie espagnole. Toutes proportions gardées, Djerba pourrait s’inspirer du modèle catalan surtout au niveau de la santé, de l’économie de savoir et du tourisme.

Djerba, plate-forme médicale méditerranéenne. La Catalogne mise sur la recherche, notamment dans les biosciences (génétique, neurosciences, biologie cellulaire…), un secteur qui représente 7% de son PIB.

Riche en hôpitaux de pointe et centres de recherche, y compris nucléaire avec un accélérateur de particules, la région se présente comme la première d’Europe en nombre d’entreprises pharmaceutiques par habitant.

Sur ce plan, Djerba dispose d’un embryon de plate-forme médicale non négligeable : des dizaines de complexes médicaux, des médecins spécialistes de haut niveau dans presque toutes les spécialités, une dizaine de cliniques privées pluridisciplinaires avec un acheminement progressif vers des cliniques spécialisées, hôpitaux publics…

L’île est déjà la destination de beaucoup d’étrangers en quête de soins de qualité. Mais il lui manque plusieurs composantes pour qu’elle puisse devenir une plate-forme médicale méditerranéenne incontournable : une fac de médecine, un CHU, des centres de recherche dans le domaine de la science, une unité de production pharmaceutique…

La réussite de cet ambitieux projet exige une organisation efficace du secteur, un partenariat public-privé poussé et des dispositifs suffisamment incitatifs notamment en termes de qualité de vie pour attirer les plus brillants scientifiques tunisiens et étrangers. Utopique? Pas tant que ça. N’est-ce pas de l’île de rêve dont on parle.

L’économie de savoir, tout le monde s’y met, mais faut-il encore préparer et développer les valeurs de créativité et d’entrepreneuriat chez les jeunes en connexion avec les universités, le secteur privé et les incubateurs.

Tout un cadrage institutionnel doit précéder et accompagner cette transition. Il faut donc commencer par réfléchir sur les dispositions à mettre en place pour encourager l’émergence des start-up. Barcelone, par exemple, capitale de la Catalogne, accueille annuellement le congrès mondial de la téléphonie mobile.

Tourisme : la Catalogne, avec sa capitale Barcelone et les plages de la Costa Brava, est la région espagnole attirant le plus de touristes étrangers. La tendance s’est encore accrue ces dernières années. Plus de 18 millions s’y sont rendus en 2016, soit un quart du total des étrangers accueillis par le pays.

Face à ces flux de touristes une sorte de tourismophobie commence à gagner les esprits des habitants locaux. Sans arriver à cette situation d’un tourisme de masse asphyxiant, il est question de repenser le tourisme de l’île : un produit touristique plus noble, diversifié et englobant au-delà du balnéaire les composantes du patrimoine culturel. Il faut aussi penser à développer et surtout encadrer l’hébergement para-hôtelier pour accompagner le développement du tourisme frontalier.

La future entrée en vigueur de l’Open Sky doit être saisie pour que l’aéroport Djerba-Zarzis devienne un hub pour les compagnies européennes low cost pour leurs vols long courrier à destination de l’Afrique subsaharienne comme c’est le cas de l’aéroport de Barcelone pour leurs vols pour les Amériques.

* Enseignant.

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