L’étrange visite effectuée, vendredi, par le chef du gouvernement Habib Essid au siège du mouvement Ennahdha, suscite des interrogations.
Par Imed Bahri
M. Essid a rencontré, vendredi, au siège du mouvement Ennahdha, à Mont-plaisir, à Tunis, des dirigeants du parti islamiste conduits par leur président Rached Ghanouchi.
Selon un communiqué publié sur le site électronique d’Ennahdha, la rencontre a été l’occasion d’échanger les vues sur la situation générale dans le pays et d’examiner les défis auxquels il fait face. L’accent a également été mis sur les préparatifs de la rentrée scolaire et la nécessité de conjuguer les efforts pour combattre le terrorisme et assurer la relance économique, ajoute le communiqué.
Les dirigeants du mouvement Ennahdha ont évoqué le projet de loi de la réconciliation nationale et la relation entre le gouvernement et l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), ajoute le même source.
Par-delà la langue de bois caractérisant ce communiqué et, plus généralement, la communication officielle du parti Ennahdha et les déclarations de ses dirigeants, la visite du Premier ministre à Mont-plaisir pose problème, et pas seulement sur le plan de la forme.
Le chef du gouvernement aurait dû, en effet, recevoir les dirigeants d’Ennahdha, dans ses bureaux, au palais du gouvernement de la Kasbah, et non au siège du parti islamiste. Ce n’est pas là une question de pur protocole, car le geste du Premier ministre peut susciter des interprétations et des interrogations. A-t-il répondu à une convocation pour «comparaitre» devant le gourou de Mont-plaisir ? Est-il allé prendre des instructions auprès de l’un de ses «employeurs»? Pourquoi a-t-il évité de rencontrer Ghannouchi en présence de ses collaborateurs à la présidence du gouvernement? Ce qu’il allait s’entendre dire ne devait-il pas être porté à l’opinion publique? Qu’a-t-il à cacher aux Tunisiens? Pourquoi la présidence du gouvernement n’a-t-elle pas publié un communiqué de presse à l’issue de cette rencontre pour en expliquer le contexte et le contenu?
Pourquoi Habib Essid a-t-il évité de rencontrer Ghannouchi en présence de ses collaborateurs à la présidence du gouvernement?
Par-delà ces interrogations légitimes, que le Premier aurait été bien inspiré de nous épargner, on peut estimer qu’après ce grave précédent, M. Essid sera dans l’obligation d’aller rencontrer les dirigeants des autres partis de la coalition gouvernementale aux sièges de leurs partis respectifs : Mohsen Marzouk dans les bureaux de Nidaa Tounes, Slim Riahi dans ceux de l’Union patriotique libre (UPL) et Faouzi Abderrahmen au siège d’Afek Tounes.
Ce serait alors un véritable manège qui ne rehausserait pas l’image d’un Premier ministre qui manque affreusement de charisme. Et qui a du mal à se hisser à la hauteur de sa fonction.
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