La société civile est en colère après le mariage, au Kef, d’une fille de 13 ans avec un jeune homme de 21 ans, qui a abusé d’elle, grâce à une dérogation du juge.
Le juge s’est basé sur le très controversé article 227 bis du code pénal tunisien, qui permet à un individu ayant abusé d’une mineure d’échapper à la sanction pénale si sa victime accepte de l’épouser.
Fahdel Bedhiefi, vice-président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH), a indiqué à Kapitalis que les parents de l’ado se sont aperçu que leur fille est au 3e mois de sa grossesse, quand ils ont porté plainte contre le jeune homme qui a abusé d’elle. Ce dernier a avoué avoir mis enceinte la fille tout en précisant qu’il est amoureux d’elle et prêt à l’épouser «pour réparer son erreur»… Et c’est ce qu’a décidé le juge, avec l’accord de la famille, et ce, malgré l’intervention de Houda Aboudi, déléguée de l’enfance au Kef, qui s’est opposée à cette union, la fille étant encore mineure.
La déléguée a même fait opposition à cette décision auprès du procureur de la république. En vain, le verdict étant tombé en fin de semaine et le mariage eut lieu le weekend dernier…
«C’est une enfant toute menue, qui n’a jamais été scolarisée. Elle n’a aucun discernement et on a décidé pour elle. Elle est issue d’une famille très pauvre et habite un village dans une localité du Kef. On l’a marié à un jeune au chômage, qui n’a pas d’avenir», a ajouté M. Bedhiefi, qui déplore que la justice ait pu prendre pareille décision qui a totalement gâché l’avenir de cette enfant.
Les parents, qui voulaient fêter cette union, en ont été dissuadés par les voisins. Ils se sont résignés à annuler les festivités à la dernière minute.
Le bureau régional de la LTDH publiera incessamment un communiqué pour dénoncer l’article 227 bis du code pénal, dont elle exigera l’abrogation. Une forte mobilisation de la société civile est prévue à cet effet.
De son côté, le ministère de la Femme, de l’Enfance et de la Famille a déploré cette décision de justice, tout en précisant avoir suivi l’affaire et tenté d’intervenir, mais celle-ci a été menée conformément à la loi.
Le ministère appelle, par ailleurs, les députés à faire abroger en urgence cette loi 227 bis, qui ne protège pas les victimes. Il appelle aussi les médias à protéger la jeune fille et à ne pas divulguer des données personnelles la concernant.
Selon des habitants du village, l’époux est un proche par alliance. Ce mariage vise à éviter des problèmes familiaux.
Y. N.
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