Majdouline Cherni fout des complexes à Adnen Mansar.
Adnen Mansar vient d’abaisser le débat politique en Tunisie à un niveau sans précédent en accusant Majdouline Cherni d’avoir changé de prénom.
Par Faïk Henablia *
Selon les dires de l’ex-conseiller de l’ex-président provisoire de la république, l’inénarrable Moncef Marzouki, l’actuelle ministre de la Jeunesse et des Sports aurait substitué Majdouline à Mabrouka, son prénom véritable!
Le ridicule ne tuant pas et à défaut de compétence, d’imagination et d’idées, certains politiciens font le pari d’occuper le devant de la scène en n’étant pas trop regardants sur les moyens.
Il est vrai que son parti, Harak Tounes Al-Irada, a, à priori, peu de chance de faire oublier le Congrès pour la république (CPR), son illustre prédécesseur, et encore moins d’égaler ses brillants succès électoraux. Mais au-delà du sort de ce parti, dont à peu près tout le monde se moque, l’attitude de M. Mansar appelle quelques observations.
D’abord, elle traduit une misogynie évidente : aurait-il eu cette brillante idée si le destinataire de ses foudres avait été un homme? Rien n’est moins sûr. Parions plutôt qu’il eût sans doute trouvé d’autres angles d’attaque plus «classiques».
Le tort de Majdouline Charni n’est pas tant, à ses yeux, d’être ministre, que d’être ministre femme et il convient de la traiter en femme, en ayant recours à ce type d’argument.
Ensuite, cette attitude de M. Mansar témoigne d’une haine du véritable symbole que représente la ministre. Celle-ci a, à ses yeux, l’immense tort d’être sœur de martyr, l’officier de la garde nationale Socrate Cherni, un martyr tombé sous les balles d’un tueur peut-être déjà amnistié par l’ancien président provisoire, son patron.
La présence de la ministre, rappel constant de cet épisode noir, est, de ce point de vue, un formidable obstacle à l’ambition présidentielle de son chef.
Par ailleurs, Majdouline Cherni avait eu auparavant, en tant que secrétaire d’Etat chargée des martyrs de la révolution, l’inqualifiable insolence se s’opposer à certaines prétentions du camp de M. Mansar en matière d’indemnisation.
Cette attitude révèle que, pour Adnen Mansar, des noms tels que «Mabrouka», «M’barka», ou d’autres, qui sont, par ailleurs, des prénoms parfaitement respectables, sont catalogués «ruraux» ou «pays profond», faisant nécessairement mauvais effet en «ville» et condamnant par conséquent leurs porteuses à en changer au plus vite, sous peine de moquerie, voire de discrédit, pour peu qu’elles aient de l’ambition.
Bref, on ne s’appelle pas Mabrouka, si on veut faire carrière. Il convient au contraire prendre un nom «urbanisé», «civilisé», un nom de «ville».
Notons au passage l’ignorance de mon Mansar, ou son oubli, de la géographie de la Tunisie, lui qui pense que le Kef se réduit à une campagne, à un «bled» perdu. Il convient de lui rappeler qu’il n’en est rien et que de surcroît des noms tels que Mabrouka ou M’barka, n’y sont pas honteux.
L’attitude de M. Mansar trahit, enfin, son profond mépris pour la région d’origine de la ministre. Pour lui, travailler à Tunis est un privilège, surtout lorsque l’on vient du Kef et il va soi que la ministre ne peut qu’avoir honte du prénom «keffois» qu’il a décidé de lui attribuer.
Il y a de cela quelques années, Jean-Marie Le Pen, ancien chef de l’extrême droite française, s’était gaussé du chanteur Patrick Bruel, en le citant par son véritable nom, Patrick Benguigui, allusion sournoise, dans son esprit antisémite, à son origine juive algérienne. Comparaison n’est pas raison, mais la sotte sortie de M. Mansar participe de la même pernicieuse volonté de brouiller l’image de l’autre, de l’abaisser au regard d’une son idéologie discriminatoire voire raciste.
* Gérant de portefeuille associé.
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