Nidaa Tounes est à l’image de la Tunisie dont il est sensé conduire les affaires : c’est un bateau ivre qui tangue dangereusement et menace naufrage.
Nidaa Tounes de Hafedh Caïd Essebsi a cru bon de renforcer ses rangs par des cadres issus de l’ancien régime de Ben Ali ou par des dissidents de l’Union patriotique libre (UPL), le parti de l’homme d’affaires Slim Riahi. Cependant, le résultat semble semble être contraires aux espérances.
Le défilé des corrompus et des bras cassés
Voulant faire taire ses détracteurs de l’intérieur ou de l’extérieur du parti, Hafedh Caïd Essebsi, directeur exécutif autoproclamé de Nidaa, a réuni, dimanche 12 mars 2017, un «conseil des cadres».
La réunion de cette instance créée pour la circonstance a été fortement médiatisée non par l’importance des décisions qu’elle a prises ou par les propositions qu’elle a soumises au gouvernement pour l’aider à trouver une issue à la crise que traverse le pays, mais plutôt par le défilé des nouvelles «recrues» d’un parti à la dérive, en majorité des rescapés de l’ancien régime de Ben Ali et des «bras cassés» mis au rebut et recyclés pour faire le nombre, surtout après la cascade des démissions enregistrées par le parti depuis mars 2015.
Hafedh Caïd Essebsi s’entoure des médiocres qu’il peut commander.
L’effet de ce show a été contraire aux attentes de ses organisateurs, puisque, selon des sources au sein de Nidaa Tounes, un nombre important de militants et d’adhérents aux échelles nationale et régionale, n’ont pas apprécié – c’est un euphémisme – ces ralliements ô combien intéressés d’une cohorte d’arrivistes et d’ambitieux dont la médiocrité le dispute à la fatuité.
Pour beaucoup, ce fût la goutte qui fit déborder le vase et certains ont déjà décidé de quitter un parti dont les errements sont devenus, à leurs avis, indéfendables auprès des électeurs ayant voté pour Nidaa en 2014.
Une machine pour blanchir les corrompus
«Le parti est devenu une machine à laver qui ne sert qu’à blanchir les corrompus de tous horizons», déplorent certains Nidaïstes qui s’étaient gardés jusque-là de critiquer Hafedh Caïd Essebsi et sa smala et qui ne supportent plus de voir les scandales éclatés au sein du parti étalés sur les médias et les réseaux sociaux.
Beaucoup de militants, qui ont cru au projet de Nidaa Tounes et ont sacrifié leur temps, leur énergie et, parfois, leur argent pour lui apporter le soutien nécessaire, sont très déçus par l’état honteux dans lequel il a sombré. Et certains le disent désormais à haute voix.
Les deux dernières affaires opposant, d’un côté, la députée Leila Chettaoui à Hafedh Caïd Essebsi dans l’affaire de l’enregistrement filtré, et de d’autre, le fondateur de Nidaa et ancien député Lazhar Akremi à Sofiane Toubel, l’actuel porte-parole, le premier accusant ouvertement le second de corruption, ont, semble-t-il, conforté beaucoup de Nidaistes dans leur décision de quitter une barque qui prend de l’eau de partout et menace naufrage.
D’où sont-ils sortis tous ces «militants» de la dernière heure ?
Invitée par la chaîne de télévision privée Ettasiaa, dans la soirée du jeudi 16 mars 2017, Bochra Belhadj Hmida, ancienne dirigeante de Nidaa Tounes et députée indépendante de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), a considéré que la version actuelle de Nidaa Tounes n’a rien à voir avec celle de son fondateur Beji Caïd Essebsi, actuel président de la république.
Elle a ajouté que le parti a réussi, à un moment difficile, à rassembler les Tunisiens et à établir un consensus qui a abouti à la promulgation de la constitution et aux élections de 2014, tout en exprimant son regret de voir cette nouvelle version de Nidaa Tounes et son son alliance avec Ennahdha, dont certains affirment qu’elle a été scellée pour 15 ans. «C’est un danger pour la démocratie parce que la démocratie est l’alternance entre deux partis différents», a-t-elle dit.
Abderrazek Krimi
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