La filière d’émigration clandestine des côtes orientales algériennes vers la Sardaigne est de plus en plus active, animée par des Tunisiens, Algériens et Libyens.
Par Mohamed Rahmani, correspondant en Algérie
L’arrestation dernièrement au niveau de la localité de Sidi Salem de dizaines de harragas (émigrés clandestins) qui s’apprêtaient à prendre la mer a permis aux services l’émigration dépendant de la sûreté de wilaya d’Annaba d’établir avec certitude que ces «traversées» sont soigneusement organisées par 2 réseaux à la tête desquels se trouvent des Tunisiens et des Libyens.
Les interrogatoires des candidats à l’émigration clandestine ont été pour les enquêteurs une mine d’informations aidant à situer les zones de recrutement des harragas, d’identifier les rabatteurs, les équipementiers et les dirigeants des 2 réseaux.
Le flux de Tunisiens a considérablement augmenté
Ainsi, l’on apprend que sur ce coup de filet opéré à Sidi Salem, une petite agglomération côtière à près de 5 km à l’est du chef-lieu de wilaya, devenue ces dernières années une véritable plate-forme d’embarquement pour l’émigration clandestine, pas moins de 11 nationalités, dont des Maliens, des Algériens, des Marocains, des Syriens, mais surtout des Tunisiens venant des régions frontalières avec l’Algérie.
La proximité de la wilaya d’Annaba, la facilité de passage des ressortissants tunisiens, le prix plus ou moins abordable de la traversée (1.400 DT environ) et l’arrivée à bon port de compatriotes de l’autre côté de la Méditerranée, en l’occurrence l’Île de la Sardaigne, a boosté la demande et le flux de Tunisiens a considérablement augmenté faisant grimper les prix.
Cela a eu pour conséquence la prise en main de ce marché juteux par les Tunisiens eux-mêmes avec la collaboration des réseaux algériens déjà sur place.
Les équipements, barques à moteur, fuel, GPS et réserves sont fournies sur place. La prise en charge se fait au niveau de cette localité où les futurs harragas sont hébergés en attendant la date de départ. L’embarquement se fait de nuit généralement entre minuit et 1 h du matin à partir des plages non surveillées qui s’étendant sur près de 5 km.
Les embarcations, dont la plupart sont anonymes et ne sont pas enregistrées au niveau de la direction de la pêche ou Groupement territorial des gardes-côtes d’Annaba, sont échouées sur ces mêmes plages et ne sont nullement contrôlées.
Le secret gardé pour remonter la filières
Les nombreuses plages de la wilaya d’El Tarf, surtout du côté d’El Battah, sont elles aussi investies par ces passeurs car encore moins surveillées et encore plus proches des frontières tunisiennes, une soixantaine de kilomètres tout au plus à partir de Tabarka.
Là aussi, les embarquements vers la Sardaigne sont organisés chaque semaine et parfois mêmes 2 à 3 fois selon les conditions météorologiques et les patrouilles des gardes-côtes, dont les passeurs connaissent les horaires de passage du fait d’un programme qui n’a pas changé et qui n’a pas été actualisé. Cela a permis à ces passeurs d’adapter les dates et les horaires de sorte à éviter d’être arraisonnés en pleine mer.
L’identité des passeurs tunisiens et leurs compatriotes harragas ainsi que celle des Libyens qui sont impliqués dans ce trafic n’a pas été révélée, les enquêteurs préférant la garder secrète pour remonter la filière et ainsi arriver à la démanteler. Une opération qui peut prendre beaucoup de temps car l’omerta est de mise dans ce milieu très fermé où l’on ne «donne» pas ses frères même si l’on prend sur soi.
Selon nos informations et au vu de ces développements, le Groupement territorial des garde-côtes d’Annaba a multiplié ses sorties en mer avec des sorties renforcées par des vedettes rapides de sorte à empêcher toute traversée clandestine où les candidats sont la plupart des jeunes obnubilés par cet Eldorado européen qui ne veut pas d’eux.
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