Lassaad Yacoubi et sa smala d’irresponsables prennent la Tunisie en otage.
Est-ce que ces arrêts de travail fréquents, qui jettent nos jeunes enfants dans la rue, sont la meilleure manière pour le corps enseignant de se mettre au service de la Tunisie?
Par Mohamed Ridha Bouguerra *
L’appel à la grève décidée pour aujourd’hui, jeudi 15 février 2018, par la Fédération générale de l’enseignement, relevant de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et distribué à la presse porte le sigle de la centrale syndicale ainsi que les portraits, entre autres, de Mohamed Ali El Hammi et Farhat Hached, avec le slogan «Au service de la Tunisie !». C’est là une manière d’embrigader ces figures historiques du mouvement national et syndical et de les mettre au service d’une cause qu’ils n’auraient, sans aucun doute, pas cautionnée!
Les fossoyeurs de l’école publique
Mohamed Ali El Hammi et Farhat Hached, paix à leur âme, eux qui ont voué leur vie à la patrie, eux qui sont morts au service de la Tunisie, auraient-ils souscrit à une action syndicale qui prend nos enfants en otages, les prive de cours et instaure un honteux et indigne chantage à la remise des notes d’examens?
Mohamed Ali El Hammi et Farhat Hached auraient-ils soutenu ces grèves à répétition toutes ces dernières années dans le secteur de l’éducation et qui font des syndicats de l’enseignement les fossoyeurs de l’école publique avec pour seules perdantes les familles populaires que Hached portait au plus profond de son cœur ?
Car on est en droit de se demander aujourd’hui, après qu’ils ont eu la peau de Néji Jalloul, l’ex-ministre de l’Education, et enterré la réforme qu’il a initiée, ce que visent réellement les syndicats de l’enseignement par ces grèves régulièrement programmées et qui émaillent toute l’année scolaire? Sont-ils, ces syndicats, véritablement au service de notre système éducatif et fortement soucieux de l’avenir des générations montantes?
Est-ce que ces arrêts de travail fréquents qui jettent nos jeunes enfants dans la rue sont la meilleure manière pour le corps enseignant de se mettre au service de la Tunisie en prenant exemple sur Mohamed Ali et sur Farhat Hached ?
Est-ce par ces grèves que la famille éducative apporte sa contribution à une urgente et indispensable réforme de notre système d’enseignement au moment où le classement international Pisa nous situe tout en bas de la liste dans les diverses disciplines prises en compte pour évaluer les jeunes apprenants?
Un système éducatif au bord de la faillite
En consacrant la majeure partie du budget du ministère de l’Éducation nationale aux salaires toujours en hausse et en consentant toujours plus d’indemnités aux enseignants – au moment où, faut-il le rappeler, l’État est au bord de la faillite et où il est obligé d’emprunter pour payer les fonctionnaires – le département de tutelle a-t-il encore les moyens et une marge de manœuvre suffisante pour entretenir nos structures éducatives, améliorer la qualité de notre enseignement, doter nos établissements de moyens pédagogiques innovants, instaurer le ramassage scolaire dans les zones rurales défavorisées, raccorder à l’eau potable l’ensemble des établissements éducatifs et les doter de sanitaires dignes de ce nom afin d’enrayer l’épidémie chronique d’hépatite en milieu scolaire, installer un système de chauffage afin d’éviter les courts-circuits dans nos internats qui coûtent la vie à nos élèves les plus démunis ?
Il est fort louable de la part de la centrale syndicale de décider la prise en charge de la rénovation d’un internat de jeunes filles ravagé récemment par le feu – deux autres dortoirs sont, depuis, bizarrement, partis aussi en fumée – mais les dirigeants de la place Mohamed Ali auraient été davantage inspirés s’ils avaient essayé de ramener à la raison les responsables syndicaux de l’enseignement! S’ils leur avaient présenté pour modèles de sacrifice et d’abnégation Mohamed Ali El Hammi et Farhat Hached ! S’ils avaient exigé d’eux de partager avec l’ensemble des Tunisiens les sacrifices matériels que nous imposent les temps difficiles que nous vivons.
Mohamed Ali El Hammi et Farhat Hached avaient la Tunisie pour unique boussole. Autres temps, autres mœurs, hélas!
* Professeur de l’Université de Carthage, Docteur Honoris Causa de l’Université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand.
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