Rached Ghannouchi /Mohamed Morsi : deux dirigeants islamistes, deux destins.
Les Tunisiens seront-ils les derniers à conserver les Frères musulmans au pouvoir, alors que le monde entier découvre leur sinistre projet de destruction et de chaos ?
Par Rachid Barnat
Le vent tourne pour les Frères musulmans et leur islamisme politique, sauf en Tunisie! Pourquoi ?
L’islam politique est en perte de vitesse partout
En Syrie déstabilisée par les pétromonarques qataris et saoudiens, Bachar El Assad reprend la main, grâce au soutien effectif de la Russie de Poutine. D’autant que Trump et son ami, le prince héritier Ibn Saoud, décident de se retirer de cette «mauvaise guerre» déclenchée par ses prédécesseurs.
Daech est en perte de vitesse sur tous les fronts.
Quant au Qatar, qui a cru un moment pouvoir faire la pluie et le beau temps dans les républiques du fumeux «printemps arabe», en soutenant à fond les Frères musulmans protégés de l’émir, il se retrouve hors jeu, boycotté par les pétromonarques et mis à l’index en tant que pays terroriste par bon nombres de pays occidentaux.
En Egypte, Al Sissi continue à faire la guerre aux Frères musulmans, dont bon nombre de dirigeants sont en prison ou en fuite à l’étranger.
En Turquie, le monde découvre la réalité du Frère musulman Erdogan, adulé par Ghannouchi, le chef des islamistes tunisiens, et dont l’Union européenne (UE) vantait l’islamisme modéré : un minable despote qui emprisonne tous ceux qui s’oppose à lui.
En Libye, après avoir découvert la réalité des Frères musulmans, les Libyens s’en détournent de plus en plus leur préférant les anciens du régime d’avant, réduits à choisir entre la peste et le choléra.
Les fausses métamorphoses de Ghannouchi et des islamistes tunisiens
Est-ce pour toutes ces raisons que le stratège Ghannouchi fait beaucoup de charme pour séduire les Tunisiens, depuis que l’Organisation internationale des Frères musulmans, dont il est membre du bureau exécutif, est mise à l’index et son pouvoir de nuisance en net recul… ce qui va tarir, entre autres, sa «contribution» à la guerre en Syrie par l’envoi de jeunes tunisiens pour rejoindre l’organisation de l’Etat islamique (Daech)?
Est-ce pour assurer la survie d’Ennahdha qu’il a changé son fusil d’épaule, jusqu’à renier son appartenance à l’Organisation des Frères musulmans, hier encore fièrement revendiquée à cor et à cri?
Les Tunisiens ont découvert l’homme à la cravate bleue, lui qui n’en portait jamais, le jour où il a commencé son opération de séduction dans l’espoir de faire oublier le Ghannouchi fraîchement débarqué de son exil londonien venu chevaucher une révolution à laquelle ni lui ni ses Frères n’avaient participé, et ses discours rétrogrades remettant en cause le statut des femmes ! Ils sont étonnés de son retournement de veste et de ses discours totalement à l’opposé de ceux qu’il leur tenait jusque-là !
Ils ont découvert son «ouverture» depuis qu’il s’est mis à courtiser les juifs, les homosexuels, les femmes «en cheveux» habillées et maquillées à l’occidentale, en perspective des élections futures… qu’il n’y a pas si longtemps, sa milice «salafiste», bras armé d’Ennahdha, harcelait et attaquait; et que «ses» juges poursuivaient sans craindre le ridicule.
Les islamistes ne changeront jamais
Souvenons-nous :
– Les femmes non voilées étaient insultées, vitriolées, lacérées avec des lames de rasoir …. les Tunisiennes s’en souviennent encore !
– la Ghriba, les autres synagogues, les cimetières juifs, étaient régulièrement saccagés, brûlés !
– les homosexuels étaient harcelés par «ses» policiers, poursuivis par «ses» juges, humiliés par des examens médico-légaux dégradant !
Alors les Tunisiens seraient-ils les derniers à conserver les Frères musulmans au pouvoir alors que le monde entier découvre leur sinistre projet de destruction et de chaos ?
Se laisseront-ils séduire par les campagnes de charme que leur fait hypocritement Ghannouchi quand il leur joue «l’ouverture et la modernité», lui qui les combattait il n’y a pas si longtemps ?
Pourquoi Béji Caïd Essebsi et Nidaa Tounes continuent-ils à composer avec Ghannouchi?
Seraient-ils naïfs pour croire qu’il a changé? Ou en ont-ils toujours peur par crainte de son terrorisme? À moins qu’ils restent alliés par opportunisme de peur d’être désavoués par les Tunisiens après leur trahison !
Ils craignent que les Tunisiens ne leur fassent plus confiance, d’où leur obstination à maintenir cette alliance contre-nature pour rester au pouvoir. Ne se rendent-ils pas compte qu’elle ruine le pays, qu’elle le fait régresser comme jamais et qu’ils en porteront la responsabilité devant l’histoire, s’ils ne se reprennent pas?
Leur seule voie de salut est de rompre solennellement, fortement et vraiment avec ces arriérés. Les Tunisiens leur en seront reconnaissants !
On peut vraiment se demander pourquoi, en Tunisie, les médias et les hommes politiques de tout bord donnent-ils encore tant d’importance aux Frères musulmans d’Ennahdha comme s’ils étaient indispensables à la vie politique? Sont-ils aveugles? Ne voient-ils pas où cela mène-t-il le pays? Ou céderaient-ils à l’opportunisme et au populisme, au détriment de l’intérêt suprême du pays?
La Tunisie peut et doit se passer de Ghannouchi, comme le reste des pays qui ont rompu avec l’islamisme politique porteur de division, de régression et de violences.
Ghannouchi doit rendre compte de son sinistre militantisme et celui de sa bande qui a coûté la vie à beaucoup de Tunisiens… dont les dirigeants de gauche Chokri Belaid et Mohamed Brahmi, assassinés par des extrémistes religieux de la nébuleuse islamiste ! Il a conduit ce pays si ouvert, qui était sur la voie du progrès, à régresser et devenir un pays au bord du chaos; où la bigoterie et l’obscurantisme se développent depuis que les Frères musulmans nahdhaouis ont importé le wahhabisme et le diffusent activement dans une société ancestralement malékite. Modèle sociétal rétrograde qui a échoué partout et dont le prince héritier Mohamed Salman Ibn Saoud dit tout le mal qu’il pense !
Oui, vraiment, serons-nous les derniers à rompre avec cette idéologie néfaste?
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