La goujaterie de l’animateur Naoufel Ouertani infligée à la talentueuse bachelière de Gabès, Roua Brini, au téléphone, est à psychanalyser, car elle traduit l’un des maux de notre société plus généralement.
Par Ali Toumi Abassi *
L’«affaire» en deux mots: dans le cadre d’une émission de divertissement radio, Naoufel Ouertani, invente un canular consistant à appeler au téléphone Roua (détentrice de la meilleure moyenne au bac sciences expérimentales, 2018, au niveau national), se faire passer pour un fonctionnaire du centre d’examens et lui annoncer qu’elle n’a pas obtenu 19,53, mais 16 de moyenne. La jeune fille a une crise et le farceur rappelle sa famille pour s’excuser. Trop tard le mal est fait. Et de la pire manière.
Devant le cas de la brillante bachelière, l’animateur a probablement vécu «le retour du refoulé», c’est-à-dire, en termes terre à terre, l’envie haineuse cachée que le cancre, ou même l’élève moyen, voue à l’élève brillant qu’il n’arrive pas à égaler, ni à supporter.
Le «retour du refoulé» est ici «sublimé» en une tentative de gag, mais qui ne réussit qu’à dire l’agressivité et la jalousie du nullard face à la reconnaissance publique du talent et du travail.
On peut le dire autrement : c’est le complexe d’infériorité du cancre devant le modèle de réussite, qui se transforme, à l’insu du «complexé», en méchanceté et même en sadisme.
Evidemment, il ne faut pas en déduire que tous les mauvais élèves deviennent des malades et tous les brillants élèves sont et demeurent saints de corps et d’esprit, car le contraire existe aussi: certains génies de l’école finissent malades et traînent toutes sortes de complexes (complexe de supériorité, folie des grandeurs, narcissisme, etc.).
Je souhaiterais surtout que Raoua le comprenne et dédramatise l’incident, à son avantage. Quant au malheureux animateur, qu’il aille se faire soigner, c’est mieux, après on discutera avec lui normalement si nécessaire, et sans aucune rancune.
(Remarque: je prie mes amis et lecteurs de lire et de commenter sans dépasser les limites de l’analyse mesurée des choses).
* Professeur de littérature française à l’université de Manouba-Tunis, faculté des lettres, des arts et des humanités de Manouba
** Le titre est de la rédaction.
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