La 54e édition du Festival international de Carthage a connu, le jeudi 9 août 2018, l’une de ses plus belles soirées, avec ‘‘El Hadhra 3’’, spectacle de chants liturgiques tunisiens, conçu et mis en scène par Fadhel Jaziri.
Par Fawz Ben Ali
Ce fut un franc succès ! On a rarement vu le théâtre romain de Carthage aussi plein, bien au-dessus de sa capacité, où beaucoup de festivaliers ont dû passer la soirée debout aux marges des gradins, faute de trouver une place de libre.
Un théâtre surpeuplé
À 22 heures exactes, le chef du gouvernement Youssef Chahed et le ministre des Affaires culturelles Mohamed Zinelabidine ont pris place à la première rangée et le spectacle pouvait enfin commencer devant un théâtre surpeuplé.
Depuis sa création dans les années 90, ‘‘El Hadhra’’ attire les foules et se joue souvent à guichets fermés, car il s’agit d’un spectacle qui résiste au temps et aux tendances, réunissant au fil des années les jeunes et les moins jeunes.
‘‘El Hadhra 3’’ a d’abord été présentée cette année au Festival de la Médina à la salle de l’opéra à la Cité de la culture pour deux soirées successives, et le public ne s’en lasse jamais, il est toujours présent. Mais il est évident que le Festival de Carthage reste un rendez-vous à part, notamment grâce à sa majestueuse et vaste scène qui permet plus de liberté au niveau de la mise en scène et de la circulation des artistes, car ‘‘El Hadhra’’ est avant tout un vrai show signée près de cent artistes (chanteurs, musiciens, choristes, danseurs …)
Pour le coup d’envoie, Jaziri a opté pour une entrée très rock assurée par son fils Ali Jaziri à la guitare électrique (lui aussi programmée pour la première fois cette année au Festival de Carthage avec son spectacle musical ‘‘Hemlin’’).
Le ton a ainsi été donné pour un spectacle scénique et musical grandiose où les instruments occidentaux ont trouvé leur place dans l’univers mystique tunisien. La guitare électrique, la guitare basse, le saxophone, la batterie… étaient là pour embellir les chants sacrés et donner plus de rythme au patrimoine soufi. Une revisite nécessaire à la survie de ce projet qui fait un carton plein à chaque passage depuis plus de 20 ans déjà.
Un spectacle qui résiste au temps
‘‘El Hadhra 3’’ éblouit par sa mise en scène exceptionnelle, dynamique où il a été question de miser sur la sobriété et d’utiliser moins d’artifices que ses précédentes. Fadhel Jaziri nous met à chaque fois plein les yeux avec cette création unique dans son genre et qui demeure à ce jour le plus grand succès de sa carrière. Pensée dans ses moindres détails (éclairage, habits traditionnels, arrangements…), ‘‘El Hadhra’’ est le résultat d’une harmonie parfaite entre ses multiples protagonistes, orchestrée par Jaziri, l’un des plus grands metteurs en scènes tunisiens.
Les chants liturgiques se sont succédé dans une vingtaine de tableaux hauts en couleurs, des chants représentatifs de notre identité culturelle, ayant traversé l’histoire et qui continuent d’occuper une place privilégiée dans la mémoire collective des Tunisiens.
Le public était ravi de cette ambiance tunisienne si particulière, réagissant avec des applaudissements et des youyous dans cette soirée mystique et festive à la fois, l’une des plus marquantes de cette édition, irréprochable autant sur le plan sonore que visuel.
Loin d’être folklorique ou dépassée ou même redondant, ‘‘El Hadhra’’ est un retour aux sources certes, mais actuel, voire moderne, car Fadhel Jaziri réussit à chaque fois à nous présenter des spectacles dont on ne se lasse jamais, qui évoluent avec le temps sans perdre de leur authenticité et qui collent à notre identité culturelle, d’où le secret de son indémodable succès.
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