Après une longue traversée du désert, la société des Ateliers mécaniques du Sahel (AMS) appartenant au Groupe Loukil a réussi à surmonter les difficultés et réussi à réaliser une croissance de 125% de son chiffre d’affaires, tout en baissant la valeur de son endettement bancaire dans un contexte économique national extrêmement difficile.
Propos recueillis par Zohra Abid
Hatem Chabchoub, son directeur général nous aide dans cet entretien à mieux comprendre cette performance inédite des AMS et les sacrifices consentis pour y arriver.
Kapitalis : D’abord, parlons de vous. Comment êtes vous venu aux AMS ?
Hatem Chabchoub : Ma formation de base est la comptabilité et je suis titulaire d’un MBA en finance et gestion des risques. J’ai occupé plusieurs postes de responsabilité, principalement à la tête d’une société informatique spécialisée dans le développement de logiciels. Puis je suis passé par une multinationale où j’ai occupé le poste de DG de banque. Plus tard, j’ai atterri dans une compagnie aérienne en tant que Pdg. Et aujourd’hui, je suis le DG des AMS avec de nouveaux objectifs et de nouveaux défis.
Les AMS semblent a réalisé une belle croissance de son chiffre d’affaires, comment y êtes vous parvenu?
À la clôture du second trimestre 2018, la société a enregistré une augmentation de son chiffre d’affaires passant de 2 millions de dinars (MDT) en 2017 à 5 MDT en 2018, soit l’équivalent de 125% en termes de croissance du revenu.
En dépit d’une conjoncture économique difficile, ayant plombé notre pays durant les dernières années, les AMS ont réussi, depuis leur acquisition en 2008, à presque doubler leurs chiffre d’affaires brut passant de 16 à 32 MDT.
La société a réussi aussi à élargir sa gamme de produits pour l’activité robinetterie en introduisant les robinets de gaz, la solution complète de branchement d’eau composé de robinets, de raccords et d’un compteur d’eau. Elle a aussi étoffé sa gamme de robinetterie sanitaire par de nouveaux mitigeurs de moyenne et haute gammes.
Par ailleurs, l’activité des articles de ménage en inox a connu un développement de sa gamme par la modernisation du segment couvert de table en ajoutant les couverts haut gamme doré et argenté et par l’élargissement de la gamme casserolerie par l’introduction de la cocotte expresse (1/4 de tour) et les sets des casseroles colorées.
Les AMS ont beaucoup souffert de la contrebande. Certains contrebandiers inscrivaient eux-mêmes le logo des AMS sur leurs produits, ce qui vous a beaucoup lésés. Comment avez-vous réussi à renverser la tendance?
Vous savez, les AMS produisent dans un secteur où il y a beaucoup de concurrence (légale ou illégale). De ce fait, nombre de produits apparaissent similaires à ceux des AMS. Et il est parfois difficile de dissocier le bon grain de l’ivraie, ce qui engendre un réel problème. Pour contrecarrer cette situation, nous avons misé sur la communication avec notre clientèle. Cette dernière désormais bien avertie est capable de faire la différence entre un produit AMS et le produit de contrebande, ce qui a considérablement minimisé les effets néfastes sur notre société.
D’un autre côté, les autorités ont pris des mesures importantes pour faire face à ce fléau et protéger les industriels Tunisiens.
Comment expliquez-vous cette performance hier encore inespérée des AMS?
Personnellement, j’ai été persuadé, depuis mon arrivée à la tête des AMS, que la société possède un potentiel de croissance très important et inégalé et qu’elle devrait décrocher la place qu’elle mérite sur le marché.
Pour ce faire, j’ai puisé dans mon sens de la perfection pour offrir à la société ce dont elle a besoin. Et Dieu merci, la situation actuelle est des plus satisfaisantes, et l’on s’attend même à de nouvelles belles surprises.
En effet, la valeur de la production finie a enregistré, au titre du second trimestre de l’année 2018, une croissance de 151% par rapport au même trimestre de 2017.
Cette croissance et cette performance dans le chiffre d’affaires sont le fruit des actions de communication, de prospection, de développement et d’investissement qui ont été programmées et réalisées par une nouvelle équipe managériale sous une nouvelle vision, en harmonie et en coordination avec le programme de développement du Groupe Loukil dès l’acquisition de la société AMS en 2008.
La société a cumulé une forte expérience dans le domaine de la fabrication des articles de raccordement et de branchement d’eau et elle est parvenue en 2015 à présenter sur le marché sa propre solution complète de branchement eau allant du simple raccord jusqu’au compteur d’eau avec télé-relève.
La société a récolté les fruits de cette réussite technique de développement en remportant deux fois d’affilée les marchés de branchement d’eau avec la Société nationale de distribution des eaux (Sonede) et a obtenu aussi en Afrique subsaharienne à plusieurs reprises des commandes pour les articles de branchement d’eau.
La stratégie de développement suivie par les AMS pour ses deux activités, à savoir la robinetterie et les articles de ménage en inox, a énormément contribué à l’amélioration de la qualité et au renforcement de la notoriété des produits AMS sur le marché local et africain.
Vous exportez vers de nombreux pays étrangers. Lesquels et quelles sont les perspectives à l’export?
Actuellement, nous exportons vers une dizaine de pays d’Afrique, d’Europe et du Moyen-Orient avec un chiffre d’affaires à l’export de 15 à 20%. Notre but est d’atteindre les 35% dans les années à venir.
Comment êtes-vous parvenus à atteindre de telles performances?
L’industrie est un secteur délicat qui nécessite beaucoup de volonté et de patience. Aussi, les décisions à prendre lors de la gestion courante devraient être bien réfléchies et bien étudiées.
Pour atteindre de tels niveaux de croissance, plusieurs sacrifices ont été consentis tant sur le plan financier, que sur celui de la disponibilité et de l’engagement du personnel de la société et du groupe Loukil.
C’est aussi le fruit des ressources financières mises à la disposition de la société tout au long de son parcours d’accompagnement et de mise à niveau pour le développement de ses activités au cours des dernières années.
D’ailleurs, je saisis cette occasion pour remercier M. Bassem Loukil, président du conseil d’administration du groupe Loukil, pour son soutien moral et financier.
Malgré la situation économique difficile, les AMS ont réussi à baisser la valeur de leur endettement bancaire. Avez-vous fait des concessions douloureuses pour atteindre ces résultats?
Le plan de restructuration financière et opérationnelle lancé en 2017 a rassuré nos différents partenaires économiques et a fluidifié nos échanges. On compte récolter les fruits de ce plan de restructuration vers la fin de l’année 2018.
Malgré la situation économique difficile du pays, la société a réussi à baisser la valeur de son endettement de 14% fin 2017 et de 8% à la fin du premier semestre 2018.
Certes, des effets secondaires ont accompagné cette réussite au niveau de la réduction de la valeur d’endettement, comme par exemple le non-développement de l’axe d’investissement vu l’allocation des ressources pour le remboursement des dettes. Il convient aussi de citer, dans ce contexte, le changement du mode de financement d’achat à l’étranger vu l’exigence des banques à rembourser des parties de la dette avant de souscrire un nouveau financement à l’étranger.
Que pensez-vous de la situation économique actuelle du pays? Le pessimisme des analystes est-il réellement justifié? Des solutions rapides de sortie de crise existent-elles?
Je suis de tempérament optimiste. La situation économique actuelle du pays est certes difficile et surtout lorsqu’on parle du secteur industriel qui est très sensible.
La situation économique du pays a commencé à s’améliorer et a trouvé enfin le chemin de la relance grâce à une excellente saison touristique, à la hausse des exportations, à la reprise de l’industrie et de la production caractérisée par le retour au calme sur le front social et au travail par plusieurs sociétés formant le tissu industriel du public et du privé.
Sur cette base et selon les constats actuels de relance de l’économie et le retour à la production et au travail, ce pessimisme des analystes ne trouve plus les arguments nécessaires puisque l’économie a enfin trouvé le démarrage pour son retour aux niveaux de croissance.
Il y a cependant un bémol, la dévaluation du dinar peut entraîner des effets négatifs sur ce démarrage de l’économie, vu la hausse des coûts des importations nécessaires à la reprise de la production industrielle.
Des solutions rapides pour la sortie de crise existent. Mais il faut d’abord clarifier la situation sur le plan politique et que le gouvernement retrouve sa stabilité afin d’avancer sur son plan d’action et ses programmes de développement.
Il faut aussi faire un vrai diagnostic de la situation économique et financière du pays, avant d’élaborer une stratégie de sauvetage de l’économie tunisienne avec la contribution des différentes parties politique, sociale et économique.
Pendant la période d’exécution de cette stratégie de sauvetage, il faudrait signer un accord socio-économique pour la stagnation des prix et des salaires. Puis passer aux réformes profondes après avoir rétabli l’économie dans ses niveaux normaux de croissance.
Quel souhait feriez-vous pour les AMS?
J’espère que la société continuera de s’épanouir davantage durant la période à venir avec de nouvelles perspectives et de nouveaux horizons et retrouvera ainsi sa position réelle sur les marchés local et étranger.
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