«Certains pensent que le président de la république est un simple facteur. Et bien ce n’est pas le cas avec moi!», a lancé ironiquement le président de la république , Béji Caïd Essebsi, lors d’un point de presse, aujourd’hui, jeudi 8 novembre 2018, au Palais de Carthage.
Par Emna Ben Abdallah
En parlant de facteur, M. Caïd Essebsi fait allusion à une déclaration du professeur constitutionnaliste Sadok Belaid, au journal « Assabah », où ce dernier compare le président de la république, dans les règles édictées par la constitution de 2014, à un simple facteur. Traduire: c’est le chef du gouvernement qui choisit ses collaborateurs et le chef de l’Etat n’a qu’à transmettre la liste au parlement. Cette comparaison a visiblement vexé M. Caïd Essebsi, qui a tenu à le dire publiquement.
Pour clarifier sa position vis-à-vis du remaniement ministériel, annoncé lundi soir, 5 novembre, par Youssef Chahed, et qu’il avait rejeté, M. Caïd Essebsi a indiqué que le chef du gouvernement ne lui a pas donné assez de temps pour examiner la liste des nouveaux ministres et secrétaires d’Etat.
«Lundi, il m’a appelé vers 16h30 pour me dire qu’il compte annoncer aux Tunisiens les nouveaux membres de son gouvernement. J’ai alors refusé car il ne m’a pas laissé le temps d’examiner la liste en question. Je ne connais pas la majorité des noms proposés. Je connais cinq d’entre eux, qui appartiennent à Ennahdha. Mais pas les autres. J’ai été surpris lorsqu’il a annoncé le remaniement à la télévision. Je suis totalement contre cette démarche et cette précipitation. La liste a par la suite été envoyée directement au bureau du parlement», a-t-il déclaré, reprochant ainsi au chef du gouvernement de ne l’avoir pas consulté sur le choix des nouveaux ministres et secrétaire d’Etat.
Le locataire de Carthage a, par ailleurs, assuré qu’il n’a aucun problème avec Youssef Chahed et qu’il ne regrette pas de l’avoir choisi comme chef du gouvernement, poste qu’il assure depuis août 2016. «Mais, a-t-il ajouté, j’avoue que je me suis trompé», M. Chahed s’étant révélé moins obéissant qu’il l’espérait. Et M. Caïd Essebsi d’énumérer les problèmes économiques et sociaux auxquels font face les Tunisiens, se transformant, soudain, en un dirigeant de l’opposition.
«Youssef Chahed n’est pas mon adversaire!», a-t-il martelé, ajoutant : «Je suis au dessus de tout le monde! Je ne suis pas Béji Caïd Essebsi mais le président de la république!». Et de rappeler, au cas où on l’aurait oublié : «Je suis le seul président à avoir été élu par le peuple». Traduire : Youssef Chahed n’a pas été élu mais choisi par moi. Et de se lancer dans une longue diatribe sur le thème de l’ingratitude (suivez mon regard!), en citant des poèmes classiques sur le sujet, rappelant aux Tunisiens d’un certain âge les discours de Bourguiba à la fin de son règne.
Pour l’essentiel, le chef de l’Etat a conclu qu’en tant qu’homme d’Etat respectueux des règles constitutionnelles et soucieux du respect des institutions de la république, il acceptera la composition du nouveau gouvernement, si celle-ci est adoptée par l’Assemblée. Traduire : il ne courra pas le risque de provoquer une crise constitutionnelle en continuant à rejeter le nouveau gouvernement et à bloquer ainsi son travail.
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