Youssef (18 ans) a été placé en garde à vue hier, mardi 25 décembre 2018, dans le cadre de l’enquête ouverte pour déterminer les circonstances du décès, à Kasserine, du journaliste Abderrazek Zorgui. Un ami commun à ces 2 derniers témoigne et appelle à se méfier des rumeurs…
Par Yüsra Nemlaghi
L’activiste Mohamed Boughdiri, qui était ami avec Abderrazek Zorgui, ne croit pas à la piste du meurtre et estime que le journaliste a commis le geste irréparable de s’immoler par le feu, car il était à bout et n’a pas trouvé de l’aide. Il faut cependant laisser la justice faire son travail, a-t-il dit, dans une vidéo postée sur son compte Facebook.
«A Kasserine, rien ne nous lie à l’Etat, nous sommes abandonnés de tous et ce, depuis des décennies. Sans vouloir faire de la victimisation, venez voir comment les jeunes et moins jeunes vivent ici, vous comprendrez peut-être le degré de désespoir dans lequel on se trouve. Les gens ne vivent pas, mais survivent comme ils le peuvent», explique l’activiste.
Il a également évoqué l’arrestation de Youssef, un jeune artiste du quartier, âgé de 18 ans, qui aime la musique, notamment le rap, les sorties entre potes et la danse. Il a été aperçu dans la vidéo montrant l’insupportable scène de l’immolation d’Abderrazek. Youssef était tout près du journaliste et, quand le corps de ce dernier a pris feu, le jeune homme a fui… cette scène a fait couler beaucoup d’encre et laissé libre cours à plusieurs hypothèses, plus farfelues les unes que les autres. Selon certains, il serait celui qui a appuyé sur le briquet et déclenché le feu.
Youssef placé en garde à vue depuis hier.
«Le ministère public a maintenu Youssef en détention et il se peut que cette décision ait été prise pour sa sécurité puisqu’il est pointé du doigt par beaucoup de personnes. Certains en parlent même avec certitude et prétendent qu’il a été payé pour le faire», a ajouté Mohamed, en assurant que Youssef a probablement pris peur, vu son jeune âge et vu la monstruosité de la scène. Il n’est pas le seul, d’ailleurs, à avoir fui pour éviter d’être touché par la boule de feu. C’est un acte instinctif d’autoprotection.
S’il pense que Youssef est innocent et ne peut commettre ce dont on le soupçonné, Mohamed Boughdiri estime, cependant, que les jeunes se trouvant avec Abderrazek, ce matin-là, au café, au moment où il diffusait sa vidéo live sur Facebook annonçant son projet d’auto-immolation par le feu, qui l’ont, en plus, accompagné jusqu’à la place des Martyrs, l’ont pris en photo avec sa bouteille d’essence sous le bras, et l’ont même vu s’imbiber de ce produit inflammable, ont manqué de réactivité et devraient être entendus, car il n’ont pas assisté à une personne en danger.
«Ils auraient du l’en empêcher par tous les moyens. Mais delà à dire qu’il s’agisse d’un meurtre commandité, c’est trop gros», a déploré Mohamed Boughdiri, et d’ajouter : «En plus Youssef que je connais n’est pas capable de faire une chose pareille. Il est jeune et n’a aucune orientation politique, et son seul centre d’intérêt c’est l’art auquel il s’accroche pour rendre sa vie moins pénible dans cette région particulièrement rude. D’ailleurs, les enquêteurs peuvent visionner les vidéos enregistrées par les caméras de surveillance se trouvant sur la place».
Mohamed, l’activiste de Kasserine, titulaire d’un master en management et stratégies des organisations, de l’IHEC de Sfax, a décidé de diffuser ce message pour épargner à sa région davantage d’injustice et de malheurs et pour ne pas détruire un jeune qui a encore son avenir devant lui, mais qui est aujourd’hui insulté par ses compatriotes car il se trouvait à la mauvaise place et au mauvais moment…
Kasserine: Décès d’A. Zorgui immolé par le feu, arrestation d’un jeune suspect
Kasserine : Décès d’Abderrazak Zorgui, correspondant de Telvza TV
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