Habiba Msika/Sa tombe au cimetière juif de Borgel, à Tunis.
Le musée historique et archéologique de Tel-Aviv tient actuellement une exposition intitulée «Partir et ne plus revenir», qui porte sur l’immigration en Israël des juifs originaires de pays arabes. Parmi les objets exposés, figure en bonne place le piano de Habiba Msika.
Par : Marwan Chahla
Comment est-ce que ce piano, décoré d’une paire de simples bougeoirs en étain, a-t-il pu faire ce voyage de Tunis à Tel-Aviv pour atterrir dans cette exposition, qui durera jusqu’au 31 juillet prochain ?
C’est le quotidien israélien de gauche ‘‘Haaretz’’ qui, dans son édition du 13 avril 2019, donne la réponse à cette question: le voyage de ce piano a commencé il y a près de 70 ans…
La chanteuse, danseuse et comédienne tunisienne Habiba Msika – qui était nièce d’une autre chanteuse tunisienne, Leila Sfez – est née à Testour en 1903. Elle décède à Tunis le 21 février 1930, à l’âge de 27 ans, alors qu’elle était au sommet de sa gloire et qu’elle avait conquis la scène internationale, en donnant des concerts à Paris, Berlin, Nice et Monte-Carlo.
Expliquant la brillante carrière de Habiba Msika, le professeur Yaron Tsur, expert en histoire des juifs du monde musulman, a déclaré à ‘‘Haaretz’’ qu’«il y avait à l’époque d’autres chanteurs qui possédaient de meilleures qualités vocales et qui étaient plus beaux qu’elle, mais le secret de la réussite de Habiba Msika tenait à sa personnalité exceptionnelle et à sa capacité inégalable de générer un lien intense avec son public.»
Le parcours de cette personnalité exceptionnelle qu’était Habiba Msika comprenait également son féminisme affirmé et ses nombreuses aventures amoureuses, inhabituelles pour le début du 20e siècle.
D’ailleurs, c’est une de ces idylles qui lui a coûté la vie. En 1930, peu avant son mariage avec un jeune Français non-juif, elle est assassinée par un juif qui était amoureux d’elle et dont elle a repoussé les avances: l’assassin a mis le feu à la maison de Habiba Msika et s’est donné la mort…
La chanteuse, bien qu’ayant été secourue par une voisine, n’a eu droit qu’à une seule journée de survie…
La famille Msika a invité la sauveteuse, Rachel Tubiana, et lui a proposé de choisir un souvenir des objets laissés par la star tunisienne. Rachel Tubiana a choisi le piano. Et c’est ainsi qu’en 1952, lorsque la famille Tubiana a quitté la Tunisie pour Israël, le piano de Habiba Msika a lui aussi été du voyage.
Le reste de l’histoire de ce piano de Habiba Msika est un travail de recherche entrepris par Dana Avrish, la commissaire de l’exposition «Partir et ne plus revenir.»
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