Les romans primés de la 23e édition des prix littéraires Comar d’or ont été annoncés ce soir, samedi 27 avril 2019, au cours dune cérémonie au Théâtre municipal de Tunis, animée par l’Orchestre symphonique de Carthage, sous la direction de Hafedh Makni.
Par Imed Bahri
Le jury des romans en langue française, présidé par Ridha Kefi, et composé de Meriem Belcadhi (coordinatrice), Kamel Ben Ouanes, Chaabane Harbaoui et Mounira Chapoutot, a préféré ne pas décerner, cette année, le Prix spécial du jury, «aucun des romans en lice ne présentant les qualités requises pour ce prix», dira le président du jury.
Le Prix Découverte a été décerné à ‘‘L’Amant de la mer’’ d’Alyssa Belghith (éditions Arabesques, 330 pages), «un texte de haute facture littéraire où le style poétique et la l’élan mystique, associés à l’univers de la mer, sont portés par une érudition mise au service d’une narration romanesque captivante et bien menée», dira le jury.
«Dans cette ‘‘chronique d’un port’’, la mer n’a pas un seul amant. En fait, et à y lire de plus près, elle en a deux : si le personnage, en effet, déambule de port en port et exprime sa reconnaissance quasi-mystique à la Méditerranée, l’auteure effectue, elle aussi, son propre périple à travers la littérature universelle pour consacrer, dans un style poétique, la relation fusionnelle entre l’homme et la mer. Ce roman est le fruit de cette complicité», écrira Chaabane Harbaoui.
Le Prix Comar d’Or a été attribué, quant à lui, à deux romans «qui se sont imposés par leur valeur romanesque indéniable, la qualité de leur construction narrative et qui revisitent, tous deux, l’histoire de la Tunisie avec érudition et sensibilité, tout en éclairant le présent de notre pays», dira le président du jury.
Le prix est donc revenu à ‘‘Jugurtha. Un contre-portrait’’ de Rafik Darragi (éditions Nirvana, 247 pages), «un roman épique qui réhabilite un personnage marquant de l’histoire antique de la Tunisie et du Maghreb et qui révèle une face cachée de son épopée défigurée par une historiographie romaine plutôt hostile et injuste», dira le jury. «Rafik Darragi réhabilite Jugurtha et l’affranchit de la légende noire dans laquelle l’avait enfermé l’historiographie romaine. Combinant documentation historique et fiction romanesque, l’auteur révèle des facettes méconnues du grand chef numide en soulignant le véritable sens de son combat contre Rome. Humanisé et célébré dans ce roman, Jugurtha retrouve ainsi son statut de figure nationale. Mieux encore, il est très proche de nous et capable de nous interpeller, de nous émouvoir», écrit très justement Chaabane Harbaoui.
Le Prix Comar d’Or a également été décerné, ex-aequo, à ‘‘La princesse de Bizerte’’ de Mohamed Bouamoud (éditions Arabesques, 319 pages), «un roman captivant qui évoque un moment douloureux de l’histoire contemporaine de la Tunisie, la bataille de Bizerte en 1961, à travers le vécu tragique d’un jeune couple tuniso-français pris dans les convulsions de l’Histoire», explique le jury dans son rapport.
Chaabane Harbaoui ne tarit pas d’éloge lui non plus pour ce roman, le 8e de l’auteur. «Sur fond de la bataille de Bizerte, le roman raconte l’idylle amoureuse entre la belle et brillante lycéenne Jamila, surnommée la Princesse de Bizerte, et Philippe, le fils aîné d’une famille française. C’était donc l’heure des grands malentendus et des violences de toutes sortes, car la crise de l’époque avait porté un coup fatal et tragique à la relation fusionnelle entre les deux jeunes adolescents», écrit l’universitaire et critique. Et ajoute : «Mohamed Bouamoud fait ainsi interférer tout au long de son roman l’histoire et l’Histoire en mettant en scène le drame de Jamila et celui de la Tunisie.»
Dans l’ensemble, la cuvée 2019 a été assez bonne. Le jury des romans tunisiens de langue française a reçu en tout 15 romans, et il en a retenus 13 qui répondent aux critères du prix. Parmi eux, 4 ou 5 ont retenu particulièrement l’attention des membres du jury et sur lesquels ont porté leurs discussions, qui étaient, dit-on, «très serrées», selon l’expression de Ridha Kefi. D’où sans doute la formule du Comar dOr décerné à deux romans ex-eaquo.
«Nous avons eu beaucoup de plaisir, mes collègues et moi, à lire certains romans, qui parlent de nous, de notre pays, de son passé et de son présent, à travers des fictions bien construites et des personnages attachants d’humanité», dira encore Ridha Kéfi, en conseillant aux présents de lire ces romans pour se faire leur propre idée. «C’est promis : vous vous sentirez plus riches et plus intelligents», leur lancera-t-il.
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