Le projet de loi de finances 2020, actuellement examiné par le parlement, vient de faire l’objet d’une analyse de contenu par Attijari Global Research. Intitulé ‘‘PLF 2020, texte de période de transition’’, ce rapport de 8 pages dresse un bilan de l’existant, met l’accent sur la problématique du repli de la croissance et propose des scénarios pour sa relance. Parmi ces scénarios figure celui qui recommande des mesures de protection de la production locale.
Par Khémaies Krimi
«Attendue à 1,4% en 2019, la croissance économique en Tunisie vient rompre une série d’accélérations de l’évolution économique observée depuis 2016 et qui a porté le taux de progression du PIB de 0,8% en 2015 à 2,5% en 2018. Ceci confirme le caractère fragile de la reprise économique en Tunisie et l’éloigne du seuil de 5,3% observé lors du quinquennat 2004-2008», sous l’ancien régime, note le rapport. Il ajoute que «le projet de loi de finances (PLF 2020) constitue une réelle occasion pour mettre en place de nouvelles mesures correctives pour cette trajectoire baissière de la croissance, et de consolider l’équilibre budgétaire tout en apportant des mesures de support nécessaires pour rétablir un niveau normatif pour la balance des paiements».
Les auteurs du rapport estiment que «la réduction du déficit public constitue la principale réussite de la politique budgétaire en Tunisie. Une politique budgétaire ‘‘restrictive’’ est devenue une priorité en raison de l’important rebond de l’encours de la dette du trésor (75%), de sa structure à dominante étrangère (74%), ainsi que de son coût élevé».
Cinq réformes à engager
Se faisant l’écho des attentes des acteurs économiques, Attijari Global Research recommande la réforme de cinq secteurs.
La première réforme consiste en l’effort à fournir pour intégrer le secteur informel. «Estimé à 35% du commerce global selon le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, le secteur informel avait prospéré depuis de la période qui a succédé au ‘‘Printemps arabe’’. L’intégration progressive de cette économie parallèle contribuerait à l’élargissement de la base imposable, à l’alimentation d’un sentiment d’équité fiscale et à la réduction des besoins de liquidités des banques», relève le rapport.
La deuxième réside dans l’institution de mesures incitatives en faveur de l’investissement privé. «L’implication du secteur privé est primordiale. En effet, la hausse du budget de dépenses de développement ne saurait être suffisante pour assurer une croissance durable. Au-delà des incitations fiscales, on s’attend à nouer des partenariats public privé (PPP), à des appuis en nature tels que la mobilisation du foncier ou encore des mesures de protection de la production locale», lit-t-on dans le document.
La troisième suggère un appui au financement des entreprises locales. Et le rapport d’évoquer les motifs : «l’ampleur du déficit du compte courant de la balance des paiements combinée à la forte hausse des taux compliquent l’accès aux crédits. Dans ce contexte, le développement du secteur financier local permettrait d’ouvrir un nouvel accès de financement pour les entreprises et de réduire l’exposition au financement étranger en dette souveraine».
Soutenir les secteurs exportateurs et pourvoyeurs d’emplois
Autre réforme recommandée par Attijari Global Research, la mise en place d’un support à l’emploi. «Avec un taux de chômage estimé à 15,1% de la population active au troisième trimestre 2019, l’État a tout de même limité ses recrutements dans la fonction publique aux besoins urgents et aux diplômés des grandes écoles. Si cette restriction est d’ordre budgétaire, elle n’exclut pas la possibilité d’introduire une certaine flexibilité dans la législation du travail, et soutenir de ce fait les investissements dans des secteurs pourvoyeurs d’emplois», fait remarquer le rapport.
Toujours à propos d’emploi, les auteurs du rapport considèrent que le gel des recrutements est insuffisant pour freiner l’évolution de la masse salariale. Pour 2020, le budget de l’État devrait atteindre 47,2 milliards de dinars tunisiens en hausse de 9,5%. Cette hausse significative tient compte notamment de l’évolution de 10,9% de la masse salariale, qui représente 15,2% du PIB, l’un des taux les plus élevés dans le monde, comme le rappellent souvent les responsables tunisiens.
La dernière réforme consisterait à soutenir les secteurs exportateurs. Le document relève que «la dévaluation du dinar n’a pas pu contenir le déficit de la balance commerciale. Et pour cause, les exportations et les importations évoluent à des rythmes rapprochés. Ce constat pourrait amener à dire que la problématique de développement des exportations n’est pas uniquement une question de prix. Les secteurs de la transformation et de la manufacture représenteraient des priorités pour le développement du volume des exportations».
Attijari Global Research fait écho ainsi aux déclarations du président de l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica), Samir Majoul qui a estimé, mardi 27 novembre 2019, à l’issue de son audition par la commission parlementaire provisoire des finances que le gouvernement doit appuyer en toute urgence les secteurs exportateurs.
Donnez votre avis