L’erreur est toujours possible, mais quand elle est commise par l’administration publique aux dépens du pauvre contribuable, une explication et, éventuellement, des réparations doivent être envisagées, sinon c’est la confiance dans tous les services de cette administration qui est remise en cause. Et celle-ci nous fournit souvent l’occasion de douter de sa rigueur et de son efficacité.
Par Mustapha Mezghani *
Il y a une semaine, vendredi 16 juillet 2021, les personnes physiques soumises, de par les textes, à la déclaration mensuelle en ligne, se sont vues débiter de leurs comptes bancaires des montants qui n’ont rien à voir avec les déclarations du mois de juin qu’ils ont effectuées et certaines se sont retrouvées à découvert voire se sont vu rejeter des chèques.
Il s’est avéré qu’une erreur humaine, dans un processus supposé être entièrement automatisé, est à l’origine de ce malencontreux incident et que les comptes concernés ont été débités des montants de la déclaration d’octobre 2020 et non de juin 2021 comme cela aurait dû être fait. Pourquoi octobre 2020, allez voir ?
C’est la faute à la Poste, affirme-t-on au CIMF
Certaines sources du Centre Informatique du ministère des Finances (CIMF) annoncent que cette erreur serait due à la Poste en tant que détenteur du «compte bancaire» de l’Etat et qui, donc, transmet le fichier des prélèvements bancaires aux autres institutions financières.
Là où le bât blesse c’est que jusqu’à maintenant, soit une semaine plus tard, aucune information officielle, ni de la part du ministère des Finances, ni de la part de la Poste ni encore moins de la part de son ministère de tutelle, le ministère des Technologies de la Communication qui est le «promoteur» et le «sponsor» de la numérisation et de la digitalisation de l’administration.
Ni communiqué, ni mot d’excuse, ni même la moindre information disant qu’il y a eu erreur et que ce sera réglé au plus tôt. Rien !
Ce contribuable qui est là pour payer ses impôts (une vache à lait) et se voir prélever des montants indus n’aurait-il droit à aucun égard ?
Le contribuable n’aurait-il droit à aucun égard ?
Ces contribuables n’ont pas de choix que de recourir à la déclaration mensuelle en ligne et ont fait signer des engagements à leurs banques pour qu’elles payent, en débitant leurs comptes, les prélèvements que les services fiscaux demanderaient. Ces contribuables y ont été obligés par les textes en vigueur, à moins que d’accepter de payer 200 DT de pénalité pour chaque déclaration. (Même si cela pourrait revenir moins cher que les frais bancaires payés par ceux qui se sont retrouvés à découvert et se sont vu rejeter des chèques).
Dans de telles conditions, pourront-ils continuer à avoir confiance en les services en ligne de l’administration ?
D’autant plus que ceci n’est pas la première fois que de tels incidents remettant en cause la confiance en les services numériques. N’oublions pas la perte de la base de données des signatures électronique en août 2020. Suivie, elle aussi, par un déni total.
La confiance dans l’administration mise à rude épreuve
Les personnes concernées par cet «incident» auront-elles droit à une indemnisation ? Ça serait logique vu qu’elles sont passibles d’amendes si elles étaient à l’origine d’une erreur ou en cas de non payement. Qu’adviendra-t-il des frais de découverts engendrés? Cette erreur sera-t-elle corrigée en «bonne date valeur»? Qu’adviendra-t-il des éventuels frais de rejet de chèques voire plus si des retards sont enregistrés pour remédier à cette situation? Sera-t-il possible, pour les contribuables qui le désirent de quitter le système de télédéclaration après cette erreur flagrante?
L’erreur est toujours possible, même si, à ce stade-là, il doit y avoir plusieurs niveaux de vérification pour qu’elles n’arrivent pas. Cependant, quand elles arrivent, il est nécessaire de communiquer autour et d’y remédier rapidement.
À défaut, c’est toute la confiance autour des services en ligne de l’administration qui est remise en cause.
* Ancien Pdg de Tunisie Tradenet et ancien conseiller de plusieurs ministres.
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