La Tunisie a peut-être besoin d’une grande campagne de vaccination démocratique. Pour la sauver d’elle-même. Il s’agirait surtout d’une campagne de désintoxication contre les rumeurs et les informations les plus fantaisistes dont les intoxiquent les réseaux sociaux et les médias sous influence.
Par Fathi Bchir *
Quel serait le plus grand danger pour nos sociétés et pour nos tentatives laborieuses de vivre en démocratie, dans le bien-être, la coexistence et de parvenir à établir un modèle même chétif de vie commune.
Le danger viendrait de quel système politique?
Est-ce de l’une ou l’autre des puissances dominantes, de l’Est ou l’Ouest. Et si la source du danger était déjà dans nos téléphones mus par nos propres doigts et par une volonté que nous croyons nôtre. La source du danger est pourtant sous nos yeux.
Citoyens ou rats de laboratoires
Et si la Tunisie avait été choisie dès l’an 2011 pour être le laboratoire d’une extraordinaire expérience de manipulation de l’opinion dans un pays réputé sans problème, ni guerres ethniques ni fractures ?
Test grandeur nature dans une société non complexe, qui a servi à préparer le soutien à l’élection de Donald Trump. Et la suite…
Nous ne sommes peut-être que des rats de laboratoires.
Ah ces contrat avec des sociétés de communication… Et si c’était ça?
Nous gobons toutes les rumeurs, comme les informations les plus fantaisistes. Nous ne lisons plus les médias sérieux que le «système» a réussi à mettre en doute dans nos esprits. Nous n’écoutons plus que les médias d’information continue qui sont eux-mêmes déjà bien manipulés par l’argent. Tout est bon pour nourrir nos imaginations manipulées. Et au fond nous ne croyons plus à rien, en rien. Les réseaux sociaux suscitent le délire général, s’en nourrissent et l’amplifient (1).
La société en proie à son propre vinaigre
La société tunisienne n’est plus ainsi qu’un immense bruit avec des intellectuels tétanisés, eux-mêmes impliqués dans cette expérience de laboratoire. Pour savoir jusqu’à quel point ils sont perméables.
Là est peut-être le but recherché.
Dans des époques lointaines on brûlait les livres pour casser une société. Aujourd’hui on la laisse en proie à son propre vinaigre. Lente macération.
NB: en me relisant je me suis posé une question. Et je rajoute ceci en me relisant, je peux apparaître comme moi-même manipulé ou un des agents de la manipulation. Le réseaux sociaux permettraient donc de douter de tout, y compris de soi-même
Conclusion : il va falloir à la Tunisie une grande campagne de vaccination démocratique. Pour la sauver d’elle-même.
* Journaliste tunisien basé en Belgique.
1- David Chavalarias a publié »Toxic Data », paru le 2 mars 2022 chez Flammarion, en France, où il explique comment les mouvements d’opinion sont aujourd’hui hautement manipulés et amplifiés sur les réseaux sociaux au point que les démocraties les mieux établies vont y laisser leur peau.
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