La 24e édition des Journées Théâtrales de Carthage (JTC) a démarré, dans la soirée du samedi 2 décembre 2023, dans divers espaces de la capitale tunisienne. Une performance espagnole intitulée ‘‘Finale’’ a été présentée sur la façade du Théâtre municipal de Tunis où s’est déroulée la cérémonie d’ouverture officielle.
La Tunisienne Sonia Younsi et la Jordanienne d’origine palestinienne Dalel Fayadh étaient les maîtresses de cérémonie.
Le programme au Théâtre de l’Opéra de Tunis, à la Cité de la culture, où avait eu lieu les quatre dernières éditions des JTC, a accueilli un spectacle du metteur en scène américain Robert Wilson, ‘‘Jungle book’’. Une deuxième représentation de ce spectacle représentant la France, a été donnée dimanche 3 décembre.
En solidarité avec la Palestiniens, les festivités ont été annulées cette année et ce pour les cérémonies d’ouverture et de clôture. Une lecture de la poésie de Mahmoud Darwich a été faite par l’acteur tunisien Raouf Ben Amor.
« Jungle book » de Robert Wilson, et débat avec le metteur en scène américain.
La dramaturge libanaise Hanan Haj Ali a fait la lecture d’un poème du jeune gazaoui Haydar Al-Gahzali sur sa vie sous les bombardements massifs de l’occupation. De retour en Tunisie après sa première pièce présentée il y a 40 ans, elle a salué «la fidélité de la Tunisie et sa défense continue de la cause palestinienne qui est celle de la justice et de la liberté».
Des intermèdes musicaux étaient avec la Syrienne Lynn Adib, accompagnée de deux musiciens. Elle a interprété ‘‘Yemma’’ : «une chanson de deuil que je dédie aux femmes palestiniennes qui sont en train de perdre chaque jour leurs enfants et leurs proches», a-t-elle dit.
Le théâtre pour vivre, et pour résister
Dans son allocution à l’ouverture des JTC, Moez Mrabet, directeur artistique et président du comité d’organisation de cette édition, a déclaré que «les JTC ont toujours été et resteront des défenseurs des causes de la vérité, de la justice et de la dignité humaine où qu’elles soient, y compris la cause palestinienne. Oui, nous sommes avec vous jusqu’à ce que vous ‘‘deveniez une patrie’’, comme le grand poète Mahmud Darwich l’avait prédit». Il a lancé : «Avec le théâtre nous vivons, avec l’art nous résistons» qui est le slogan de cette édition. Et de poursuivre : «Nous élevons fièrement ce slogan résumant le thème de l’actualité session des Journées Théâtrales de Carthage».
Mrabet est revenu sur l’histoire du festival en rappelant: «Quarante années se sont écoulées accumulant la créativité à travers des spectacles sur la scène des théâtres tunisiens, arabes et africains, écrivant un chapitre intemporel et témoignant que le théâtre reste l’art le plus noble et diffusant les plus hautes vertus et les plus nobles valeurs».
«Le théâtre a toujours été une arène lumineuse abordant des questions brûlantes des nations et de l’humanité», a expliqué l’homme de théâtre, par ailleurs directeur général du Théâtre national tunisien (TNT) qui assure l’organisation du festival.
Performance espagnole intitulée ‘‘Finale’’ et hommage à Roger Assaf.
Depuis leur création en 1983 jusqu’en 2009, les JTC ont longtemps été organisées par le TNT. De 2011 à 2022, elle avait été confiée à une instance indépendante.
Dans une allocution, au nom de la ministre des Affaires Culturelles Hayet Ketat Guermazi, son chef de cabinet Lassaad Saïd a rappelé la conjoncture difficile dans la bande de Gaza en cette édition des JTC qui «perpétue la défense des valeurs universelles de la justice, de la paix et de la tolérance et les causes justes dont en premier lieu la cause palestinienne». Il a encore souligné que la tenue de cette édition coïncide avec la célébration du 40e anniversaire des JTC estimant que le festival a atteint «la maturité et la sagesse» après avoir laissé «son empreinte dans le monde arabe et africain».
Le représentant du ministère des Affaires culturelles a encore affirmé la volonté de continuer dans la même orientation en cette année qui inaugure la première édition des JT Cap, le premier marché dédié à l’échange et à la fusion de l’art et du commerce dans la ville. Le JTCap vise des collaborations globales et l’élargissement des réseaux d’échange entre artistes du monde arabe et africain avec les professionnels du spectacle venus du monde entier.
Hommages aux disparus et aux vivants
La cérémonie a été marquée par un hommage posthume a été rendu à des figures tunisiennes du 4e art : Moncef Charfedine, Mohamed Kadous, Abdelghani Ben Tara, Rim Hamrouni et Lassaad Mahouachi.
L’homme de théâtre et ancien ministre de la culture Abderraouf Basti, le comédien Houcine Mahnouch et la comédienne Nejia Ouerghi, ont été à l’honneur avec 6 figures du théâtre arabe et africain dont le célèbre comédien et metteur en scène libanais Roger Assaf et sa compatriote l’actrice et dramaturge Hanan Haj Ali, l’acteur iranien Amin Zendakni et sa compatriote l’actrice Elham Hamidi, le marionnettiste malien Yaya Coulibaly et la journaliste et professeur de théâtre égyptienne Hala Sarhan.
«Mon crâne est couronné avec les larmes, le sang et le deuil», a déclaré Roger Assaf qui a prononcé des mots émouvants. Ce grand dramaturge et écrivain a parlé du «lien assez profond entre la Tunisie et le Liban dans leur solidarité avec le peuple palestinien, aussi bien par leur passés réciproques, en temps de guerres et de révoltes, et la passion mutuelle qui est née au temps de l’expérimentation et de recherche pour un théâtre propre à chacun de nos peuples».
« Terre de démence » de Houssine Mokhtar / « I dreamed about you yesterday » de Lobna Mlika.
Le passé lointain des Libanais et des Tunisiens remonte à l’antiquité. L’homme de théâtre n’a pas manqué de l’honorer à sa manière, en invitant le public à un voyage dans le temps pour voir comment «l’armée romaine a détruit Carthage après avoir tué 200 000 personnes en plus de l’esclavage du reste de la population». «L’empire romain qui avait détruit Carthage n’existe plus alors que Carthage porte aujourd’hui le flambeau de l’art vivant et la pensée libre», a-t-il conclu.
La compétition officielle des JTC réunit 11 spectacles en plus de 24 représentations parallèles, produits par des structures théâtrales professionnelles tunisiennes, arabes et africaines. Les pièces dans la course aux Tanit représentent la Côte d’Ivoire, l’Algérie, l’Egypte, les Emirats arabes unis, l’Irak, la Jordanie, le Koweït, le Maroc, la Syrie et la Tunisie.
Le jury de la compétition officielle est présidé par le Tunisien Wahid Essaâfi qui sera entouré de Pierre Abi Saab (Liban), João Branco (Cap Vert), Naima Zitan (Maroc) et Odile Katese (Rwanda).
Les JTC se tiennent du 2 au 10 décembre dans divers espaces avec une sélection de 62 spectacles de 28 pays.
D’après Tap.
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