Docteur Jed Henchiri est mort, mais son courage continuera d’animer tous ceux qui à travers les générations luttent pour une médecine plus juste et plus éthique.
Par Dr Mounir Hanablia *
Je ne connais pas Jed Henchiri, et quelques dizaines de promotions médicales nous séparent. Il aurait pu être mon fils. Pourtant je n’ignore pas qu’il y a quelques années, il avait représenté la voix des internes et des résidents en médecine contre la condition servile que les autorités de tutelle, autant académiques que sanitaires, leur avaient jusque là réservée, en profitant de leur statut hybride et de l’impératif qui leur était fait de valider leurs stages hospitaliers, les mettant dans l’obligation d’accepter l’inacceptable, et de suppléer les carences dont d’autres, forts de leur organisation syndicale et de leur titularisation, refusaient d’assumer la responsabilité normalement dévolue dans le cadre de leurs activités para médicales professionnelles.
Celui qui avait osé
Ainsi Jed s’est il inévitablement trouvé en ligne de mire des autorités en tant qu’organisateur d’un mouvement de protestation paralysant durant quelques semaines l’institution publique et remettant en cause la sacro sainte autorité de la hiérarchie hospitalière obligée alors d’assumer les corvées des gardes intramuros dont elles s’était libérée au fil des concours et des titres hospitalo-universitaires acquis, et beaucoup de ses membres avaient vécu cette expérience d’un hôpital sans internes et sans résidents comme une déchéance.
En fin de compte, ce jeune médecin n’avait représenté que la figure charismatique du mouvement, celui qui avait osé parler haut de ce que dans sa profession on murmurait tout bas, et ses camarades l’avaient entendu. Mais Jed ne s’en était pas tenu là; il avait déballé sur les réseaux sociaux les pratiques clandestines de la médecine libérale et les liens occultes entretenus avec l’institution publique.
Contre les monopoles indus
En franchissant ainsi cette ligne rouge, il était devenu la cible de calomnies visant à le discréditer et à hypothéquer sa carrière professionnelle, ainsi que cela se fait couramment dans notre profession, contre tous ceux osant se dresser contre les monopoles indus qui poussent à l’émigration les milliers de médecins, que ces mêmes monopoles qui verrouillent la profession avec autant d’efficacité invoquent pour s’opposer à l’Etat lorsque leurs intérêts l’exigent.
Aujourd’hui Jed est mort, mais son courage continuera d’animer tous ceux qui à travers les générations luttent pour une médecine plus juste et plus éthique.
* Médecin de libre pratique.
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