Hassen Zargouni/Neila Sellini.
Dans un sondage réalisé en 2001, Sigma affirmait que 85% des Tunisiennes veulent la polygamie et 70% des Tunisiens appellent à confier l’excision des filles aux médecins.
Dans un post publié vendredi 16 juin 2017, sur sa page Facebook, l’islamologue et professeur à l’Université de Sousse, Dr Neila Sellini, évoque son expérience au Programme des Nations unies pour le développement (Pnud) qui lui a permis de «croiser inopinément» le fameux cabinet Sigma Conseil spécialisé dans les sondages d’opinions.
Un texte édifiant et qui mérite une réponse de Hassen Zargouni, le très médiatique directeur général de ce cabinet.
Les faits se passaient en 2001. Dr Sellini est retenue dans l’équipe de 4 spécialistes du Pnud, chargée de rédiger un rapport sur «la liberté des femmes dans le monde arabo-musulman». L’Égypte, la Jordanie, le Liban et la Tunisie sont choisis comme pays d’investigation. Ce Rapport devait comporter un sondage d’opinion dans chacun des 4 pays retenus. Ces sondages étaient confiés, comme convenu au sein de l’équipe des experts du Pnud, à des sociétés «dont les noms étaient tenus secrets», précise Dr Sellini.
Au bout de 8 mois d’attente, les résultats du sondage sont tombés : 85% des Tunisiennes demandent la polygamie et 70% des Tunisiens appellent à confier l’excision des filles aux médecins.
Ces deux données ont confirmé pour l’équipe du Pnud que «les enquêteurs de la société de sondage d’opinion Sigma n’ont pas bougé de leurs bureaux et que les réponses sont imaginaires. Nous pourrions débattre sur le pourcentage de femmes tunisiennes qui demandent la polygamie, mais il n’est pas raisonnable d’accepter que les mutilations génitales féminines étaient pratiquées en 2001. Notre société ne connaît pas cette coutume. Nous avons donc été forcés, au bout de deux ans de débat, d’annuler ce sondage et de demander l’identité de la société qui l’a réalisé. Là, on découvre que c’était Sigma, qui se spécialisait à l’époque dans les audiences des spots publicitaires.»
«C’est pourquoi le rapport final ne contient pas le sondage sur la Tunisie», conclue Dr Sellini.
Hassen Mzoughi
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