Objet d’une enquête pour avoir insulté et menacé les journalistes, le porte-parole du Syndicat national de la sûreté de Sfax Noureddine Ghattassi se prend pour un héros de la nation.
En attendant d’être entendu par la justice après l’enquête ouverte par le ministère public à son encontre, le syndicaliste sécuritaire, qui a notamment menacé «d’engrosser les journalistes à commencer par les mâles parmi eux» (sic) et de «les faire pleurer des larmes de sang» (re-sic), a publié hier soir, lundi 5 février 2018, sur son compte Facebook, le récit d’une audition de justice… rêvée.
Agent de la police municipale de son état et facebooker à ses heures, Noureddine Ghattassi imagine un dialogue entre lui et le procureur de la république. Ce dernier lui demande si les agents de la brigade antiterrorisme (BAT) sont membres de son syndicat. Il répond fièrement par l’affirmative. Le procureur s’interrompt et ôte son chapeau, en signe de respect, puis dit : «Je m’agenouille devant ceux qui donnent au monde une leçon de patriotisme, qui veillent sur la sécurité de leur pays, chassent les terroristes et se sacrifient pour leur nation et leur peuple».
Le syndicaliste sécuritaire, qui a peut-être raté une carrière de romancier, poursuit le récit de son rêve éveillé : le procureur affirme qu’il ne craint rien tant que le pays est gardé par «des lions comme les sécuritaires qui le protègent». Et de conclure, solennel : «Si ça ne tenait qu’à moi, on installerait à l’entrée des villes du monde des statues à votre effigie pour mettre en valeur votre force, votre bravoure et votre honneur».
Instrumentalisant ainsi la mémoire de ses collègues qui ont combattu le terrorisme et dont certains y ont même laissé leur vie, Noureddine Ghattassi se sent-il, par hasard, une âme de héros?
A bien lire le récit de son rêve éveillé, il aurait bien aimé voir le pays entier s’incliner devant lui, y compris surtout les journalistes, ses poils à gratter, et, pourquoi pas tout lui pardonner, même ses menaces et ses excès de langage, pour ne pas dire les grossièretés qu’il profère sur les réseaux sociaux.
On notera, au passage, que le Syndicat national de la sûreté, que l’on aurait aimé voir plus juste dans ses appréciations, a soutenu avec force Noureddine Ghattassi et son collègue Wahid Mabrouk, qui s’en sont pris aux journalistes en des termes peu amènes (c’est un euphémisme) et continuent d’ailleurs à le faire, bien que plusieurs policiers aient dénoncé les excès de langage de leurs deux collègues, estimant que leur comportement nuit à l’image de l’institution sécuritaire dans son ensemble.
Y. N.
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