Ce qui est saisissant, aujourd’hui, en Tunisie, c’est qu’autant les hommes politiques de l’après-2011 sont rejetés par le peuple et sont inaudibles bien que surreprésentés dans les médias et que Kaïs Saïed, bien qu’apparaissant très rarement dans les médias, reste très apprécié par le peuple et très écouté.
Par Imed Bahri
Alors que tous les présidents et les chefs de gouvernement depuis 2011 ont été conspués à chaque déplacement à Sidi Bouzid à l’occasion de la commémoration du 17 décembre 2010 ou du 14 janvier 2011 et alors que d’autres ont évité de s’y rendre par peur, le président de la République nouvellement élu, Kaïs Saïed, a été accueilli par les youyous et les applaudissements et a prononcé à cette occasion un discours sur la place Mohamed Bouazizi, qui a harangué les foules.
Les institutions politiques ne fonctionnent pas
L’homme connu pour son sens de la retenue et son flegme mais en même temps par son sens de la fermeté a dénoncé la classe politique: «Ils me font porter la responsabilité mais les institutions politiques ne fonctionnent pas», ce qui veut dire que le système politique actuel contre lequel Kaïs Saïed a mené campagne est responsable de la situation dans laquelle se morfond le pays et empêche son décollage et que la classe politique – avec tous ses partis (la partitocratie en place) – qui est rejetée par les Tunisiens, eu égard à la forte abstention lors des dernières législatives et des faibles scores enregistrés par les partis politiques, complique la tâche.
Le président a continué en estimant qu’il assume naturellement sa responsabilité «mais que tous les jours des complots sont manigancés contre la volonté du peuple par ceux que vous connaissez et ceux qui sont derrière eux dans les cabinets noires».
À propos des médias qui l’ont dénigré lors de la campagne et qui continuent à le faire, il a répondu: «On ne leur répondra pas mais la réponse ne tardera pas et sonnera comme un séisme».
Le chef de l’Etat a promis à la grande foule massée sur la place Bouazizi que «tant que son cœur battra et qu’il aura un souffle, il se tiendra à leurs côtés» et leur a dit qu’il ne voulait pas être bavard mais qu’il travaillait pour eux dans le silence et que les résultats viendront, en promettant de revenir avec de bonnes nouvelles, sans en dire davantage.
Aussitôt après, Kaïs Saïed s’est déplacé à Jelma, théâtre d’affrontement ces dernières semaines. Dans une vidéo postée sur Facebook, des habitants de Jelma lui disent: «On est content de vous».
Les médias hors du coup
Ce qui est saisissant c’est qu’autant les hommes politiques de l’après-2011 sont rejetés par le peuple et sont inaudibles bien que surreprésentés dans les médias et que Kaïs Saïed bien qu’apparaissant très rarement dans les médias reste très apprécié par le peuple et très écouté.
Que ce constat plaise, déplaise ou fasse des envieux, il est crucial de ne pas faire les autruches et être dans le déni mais de le voir en face, de le lire et de le décortiquer. C’est un constat sans appel. Le système politique actuel est à bout de souffle et s’essoufflera prochainement. Que se passera-t-il? Le système de gouvernance locale très apprécié et très attendu à l’intérieur du pays verra-t-il à ce moment-là son heure venir?
Certains citadins déconnectés de la Tunisie profonde ne le comprennent pas et ne font aucun effort pour le comprendre et certains médias instrumentalisés par les réseaux d’influence tentent de ridiculiser le système prôné par Kaïs Saïed afin de le décrédibiliser sauf que le peuple de la Tunisie profonde, des quartiers populaires, de la Tunisie oubliée et surtout de sa jeunesse, ce peuple-là leur tourne le dos, les rejette comme il rejette les partis politiques et écoute Kaïs Saïed.
Tel est le fossé entre ces deux Tunisie. C’est cette Tunisie à laquelle Kaïs Saïed a, aujourd’hui, rendu visite.
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