Être une relique de la colonisation arabo-musulmane ou un acteur plurimillénaire africain, tel est le choix que devra faire la Tunisie dans les discours, la pratique et la diplomatie. (Illustration : le président Kaïs Saïed recevant le président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embaló, le 8 mars 2023).
Par Elyes Kasri *
Limiter l’identité socio-historique de la Tunisie exclusivement à l’arabité, comme ne cessent de le pousser les adeptes de l’islam conquérant avec son pendant contemporain de l’islam politique, joue en faveur de la thèse coloniale de la terre vierge ante-musulmane avec son pendant de récupération par les Africains.
Déposséder la Tunisie de son histoire plurimillénaire, pas nécessairement arabe, risque de fragiliser son avenir en la présentant comme une terre conquise par des étrangers venus des déserts d’Arabie qui doit être libérée et restituée à son continent avec une acception plutôt subsaharienne.
Le mythe du tropisme arabo-musulman n’a pas fini d’opposer la Tunisie à un courant d’opinion montant en Afrique et à sa rupture avec son continent qui se trouve accélérée par les récents discours et agissements envers la migration subsaharienne dans notre pays.
Plus qu’un examen de conscience, la Tunisie a tout intérêt à procéder à une réévaluation de son processus identitaire socio-historique pour mieux réussir son ancrage dans ce continent potentiellement riche et puissant qui, même s’il passe par une crise de croissance, commence de plus en plus à compter sur l’échiquier international et à bousculer les reliques de la colonisation.
Être une relique de la colonisation arabe ou un acteur plurimillénaire africain, tel est le choix que devra faire la Tunisie dans les discours, la pratique et la diplomatie.
* Ancien ambassadeur.
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