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Safi Saïd se voit comme «le sauveur» et se met à rêver de la Kasbah !

Pour que son mouvement, Echâab, soutienne Ennahdha, parti vainqueur aux législatives, dans sa quête de former un nouveau gouvernement, Khaled Krichi, a exigé, en début de semaine, que le parti islamiste nomme Safi Saïd en tant que chef du gouvernement. Reprenant ainsi les déclarations de M. Saïd lui-même, en fin de semaine dernière.

Par Cherif Ben Younès

Pour rappel, Safi Saïd ne fait pas partie du mouvement Echaâb, mais il partage son idéologie nationaliste arabe, et a été, à cet effet, soutenu par ledit mouvement au premier tour de l’élection présidentielle de 2019.

Mais ce n’est pas tout, puisque M. Krichi a également indiqué, sur les ondes de Mosaïque FM, que le soutien du mouvement Echâab pour Ennadha passerait par l’adoption de son programme, qui repose sur «la souveraineté nationale dans les décisions et les richesses nationales, la lutte contre la normalisation avec Israël et sa criminalisation, l’équité sociale au niveau central et régional, et le renforcement de l’Etat civil et démocratique défendant les droits de l’homme et de la femme.»

Un véritable casse-tête pour Ennahdha

Des demandes qui nous donnent un aperçu sur les difficultés auxquelles sera confronté Ennahdha, qui ne détient que 24%, environ, des sièges au parlement, dans sa mission de rassembler une majorité parlementaire, en vue de mettre en place un gouvernement, et éviter, ainsi, le recours à la réélection de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), en cas d’échec.

Safi Saïd et le mouvement Echâab se considèrent, en effet, comme point de rencontre entre les deux «pôles idéologiques» devenues classiques, dans le paysage politique tunisien, depuis la révolution de 2011, à savoir le progressisme et l’islamisme. Et de ce fait, ils estiment que leur demande jouit d’une certaine légitimité.

Cependant, l’exploitation de cette prétendue légitimité semble virer vers une sorte de gourmandise politique quelque peu excessive… «La condition du célibataire auprès de la veuve», pour reprendre un proverbe tunisien.

Un homme providence en cache un autre

En outre, le fait que ces revendications soient centrées sur un individu, quel que soit son identité (qui estime, en plus, être «le sauveur» et le seul à pouvoir accomplir le rôle rassembleur dont le pays a besoin) n’est pas la meilleure approche politique, aujourd’hui, en Tunisie.

Cela porte, en effet, une sorte d’adoption du culte de la personnalité qui aurait peut-être été appropriée dans d’autres pays arabes… Mais certainement pas pour la Tunisie, qui représente désormais une exception, dans sa zone géographique, notamment du fait des acquis de la révolution.

Et cette idée, même nos nationalistes arabes devraient, à un moment ou un autre, la saisir, ne serait-ce que pour rationaliser leurs projets politiques et abandonner définitivement le mythe de l’homme providence ayant fait trop de mal dans un monde arabe, où les cimetières regorgent de ces prétendus «zaïm» (leaders) exceptionnels.

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