Le poète et écrivain tunisien résident en France salue la mémoire de son ami, l’anthropologue des religions algérien Malek Chebel, décédé hier à l’âge de 63 ans.
Par Tahar Bekri *
J’apprends avec tristesse la disparition de l’anthropologue algérien, Malek Chebel.
Il y a quelques mois il était mon voisin de dédicace lors d’un petit salon de livres dans le nord de la France. Il se présentait en plaisantant comme Maghrébin et Tunisien, tant ce pays comptait pour lui.
Je le connaissais depuis plusieurs années et les différentes rencontres culturelles ou intellectuelles, ici ou là, en France et ailleurs, nous permettaient des échanges solides et exigeants sur les nôtres et le monde arabo-musulman, en général.
Le mérite de Malek Chebel aura été de vulgariser auprès des lecteurs francophones un savoir sur l’islam en s’appropriant des thèmes jusque-là réservés à une élite spécialisée, comme le corps, la sexualité, l’érotisme, etc. Il avait pour souci de défendre un islam éclairé, partisan du dialogue inter-religieux. Ses nombreux ouvrages, accessibles au grand public, lui valurent un franc succès médiatique. Ce n’était pas toujours sans risques de répondre parfois hâtivement aux médias. Certains le lui reprocheront.
A l’origine d’une Fondation «Islam de lumières», il me sollicita pour en faire partie mais j’ai décliné la proposition, il n’a eu de cesse de porter une voix de l’islam classique vers l’actualité, afin d’aider à lever bien des malentendus vivaces et si néfastes.
Paix à son âme.
Bio-Express:
Malek Chebel est un anthropologue des religions et philosophe algérien né le 23 avril 1953 à Skikda et mort le 12 novembre 2016 à Paris.
Il a étudié en Algérie, puis en France à Paris, où il a également étudié la psychanalyse, activité qu’il a un temps exercée. Il a enseigné dans de nombreuses universités à travers le monde.
Essayiste, auteur d’ouvrages spécialisés sur le monde arabe et l’islam, son travail s’appuie sur «l’islam des Lumières».
Il tient des conférences dans de nombreux pays d’Europe et d’Afrique, et travaille à une vaste enquête sur l’islam dans le monde.
Il est connu pour sa réflexion sur l’islam, sa culture, son histoire, sa vie intellectuelle, son érotisme. Il est également connu pour ses prises de position publiques en faveur d’un islam libéral et en faveur d’une réforme de l’islam incluant certains aspects de la modernité politique, notamment: «opérer une séparation étanche entre le pouvoir temporel et le pouvoir intemporel, renvoyer la religion et les religieux dans leurs mosquées, et réévaluer le rôle politique et ses prérogatives.»
Son premier livre, « Le corps en Islam », est paru en 1984. Il en a publié une quarantaine d’autres depuis, dont « Encyclopédie de l’amour en Islam. Érotisme, beauté et sexualité dans le monde arabe, en Perse et en Turquie », 1995, « Dictionnaire amoureux de l’islam », en 2004, et une traduction française du Coran, en 2009. Son dernier livre: « L’inconscient de l’islam : Réflexions sur l’interdit, la faute et la transgression », est paru en 2015.
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