Budget étriqué, refus des recrutements, déni de son indépendance… L’Instance de lutte contre la corruption n’a pas fini de subir l’omnipotence de l’administration.
Par Nabil Ben Ameur
Veut-on encore de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (INLCC)? On est obligé de se poser la question après écouté le témoignage poignant de Samir Annabi, son président, vendredi 22 mai 2015, devant la Commission de réforme de l’administration, de la bonne gouvernance, de lutte contre la corruption et de gestion de l’argent public, de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
Devant cette instance, M. Annabi a montré du doigt quatre entraves majeures à l’action de l’INLCC.
La première et non des moindres c’est son – maigre – budget qui s’élève à… 390.000 dinars par an, dont 220.000 dinars pour le seul loyer. Pour payer ses autres charges, dont en particulier les salaires des 12 fonctionnaires de cet organisme, il ne reste donc plus grand-chose à l’INLCC. Ce qui contraint son président à des acrobaties et l’oblige à couvrir certaines dépenses de sa poche.
L’INLCC aurait dû disposer d’un budget cinquante fois supérieur car, rappelle son président, il y a une norme onusienne en la matière : 1 dollar par d’habitant, soit, dans le cas de la Tunisie, un budget de «près de 20 millions de dinars», calcule M. Annabi.
Le deuxième problème rencontré par l’INLCC tient au refus de l’administration de lui permettre de procéder à des recrutements, au moins pour remplacer les partants, mais également dans les misères que celle-ci fait à ceux qui sont restés et continuent à travailler pour l’INLCC. Ceux-ci sont privés de leurs primes, regrette M. Annabi.
De même – troisième problème – «l’administration n’accepte pas que l’INLCC soit une instance indépendante» jouissant de l’autonomie administrative et financière et de ce fait «non soumise à la comptabilité publique», accuse le président de l’INLCC.
Egalement, l’Instance a été empêchée – quatrième entrave mise sur son chemin – de concrétiser son projet de créer à l’université un master spécialisée dans la lutte contre la corruption, conçu comme une composante essentielle de la politique de prévention à mettre en place.
Enfin, le président de l’INLCC n’a pas digéré l’annulation du congrès de l’Organisation internationale de la transparence financière (Transparency International) à Tunis, prévu du 21 au 24 octobre 2014 et n’est pas loin d’y voir – même s’il ne le dit pas ouvertement – une dernière vacherie du gouvernement de l’époque contre son organisation.
Le cabinet Jomaa avait décidé d’abandonner l’organisation de ce congrès car l’Etat tunisien devait en supporter l’essentiel des frais, or les restrictions budgétaires auquel il était soumis ne permettaient de telles largesses.
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