La Tunisie fait face à «un complot qui vise la réorganisation de la région» pour «servir de passage pour le pétrole africain vers des pays colonialistes».
Par Imed Bahri
Cette brillante analyse géopolitique a été faite par Ridha Belhaj, le porte-parole du parti Ettahrir, lors du 4e congrès de cette formation extrémiste religieuse, tenu samedi 13 juin 2015, à Tunis.
M. Belhaj et ses partisans, partagent la même idéologie que les terroristes de l’Etat islamique (Daêch): haine de la liberté, de la démocratie, des élections, de l’Etat, de la république, de la constitution, etc. Refusant de considérer le système républicain et la constitution comme des fondamentaux, Ridha Belhaj a déclaré, avec une pointe d’ironie, parlant de la nouvelle constitution promulguée en janvier 2014, qu’elle est «en phase expérimentale» et qu’elle «pourrait disparaître» (sic!). Il aurait bien pu ajouter, comme il l’a souvent soutenu, que son parti ne reconnaît qu’une seule source de lois: la charia.
Les troupes de Hizb Ettahrir constituent une réserve pour Daêch et les mouvements jihadistes.
M. Belhaj et ses partisans,on le sait aussi, aiment voir des complots partout, surtout là où il n’y en a pas, au point qu’ils en inventent souvent, leur poil à gratter étant toujours, bien sûr, l’Occident mécréant et ennemi des musulmans.
Dans son discours – dont la platitude se nourrit de la démagogie et du populisme –, M. Belhaj – qui rêve de réinstaurer le califat sur la terre entière et de se proclamer lui-même calife – a cru devoir mettre en garde – encore ? – contre le risque d’une «nouvelle colonisation de la Tunisie à travers le pacte de l’Otan», critiquant la signature par la Tunisie d’un accord d’entente et de coopération à long terme avec les Etats Unis et l’octroi par les Etats-Unis à la Tunisie du statut d’allié majeur non-membre de l’Otan, annoncé le 21 mai dernier par le président Obama lors de sa rencontre, à Washington, avec le président Caid Essebsi.
Le financement de ce parti devrait faire l’objet d’un contrôle strict.
Ridha Belhaj, qui ne brille pas par sa rigueur intellectuelle et préfère faire feu de tout bois, n’a pas voulu entendre les explications du conseiller diplomatique du président de la république, Khemaies Jhinaoui, qui avait affirmé, dans une interview à l’agence Tap, que «la Tunisie n’a pas adhéré et n’adhèrera pas à l’Otan et ne se prépare pas à le faire», ajoutant que la Tunisie n’a pris aucun engagement envers les Etats-Unis et ne permettra pas l’entrée de forces étrangères sur son sol.
Pour Ridha Belhaj, dont nous sépare 14 siècles, le problème de la Tunisie – entité qu’il ne reconnait pas, puisque ses troupes n’en portent jamais le drapeau, lui préférant celui d’Al-Qaïda, Ansar Charia et autres Daêch, ses «frères» en islam – se résume à une opposition ontologique entre islam et occident, musulmans et infidèles, islamistes et laïcs, etc.
Le parti Ettahrir maintient des ambiguïtés sur ses relations avec les groupes terroristes.
On peut, d’ailleurs, se demander pourquoi ce parti hostile à la république et à ses lois est-il encore autorisé ? C’est l’ancien chef du gouvernement provisoire, l’islamiste Hamadi Jebali, qui l’a légalisé en 2012, espérant en faire un allié politique, mais ce parti a commis, depuis, de telles écarts, exprimé une telle haine envers la patrie et montré de telles ambiguïtés dans ses relations avec les groupes terroristes et leur idéologie destructrice et nihiliste qu’il aurait dû être interdit depuis belle lurette.
L’ancien chef du gouvernement provisoire Mehdi Jomaa a menacé de lui retirer l’autorisation, mais il n’a pas mis sa menace à exécution. M. Essid serait bien inspiré de le faire, car la Tunisie gagnerait beaucoup à mettre ces forces obscurantistes hors d’état de nuire en les privant des tribunes qu’elles utilisent pour embrigader les jeunes, les détourner de la voie de la science, de la connaissance et du travail productif, et encombrer leur esprit par des visions d’un autre âge.
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