Traité du Bardo instaurant la colonisation française en Tunisie en 1881.
L’auteure dénonce la smala des rentiers, des traîtres et des mafieux qui ont engagé la Tunisie dans la voie d’une véritable banqueroute, travestie en oeuvre de salut national.
Par Asma Souissi *
De sphère de souveraineté financière, la Banque centrale de Tunisie (BCT) en train de muter en écurie, autorisant les «colons» à s’y balader comme bon leur semble. ‘‘Jeune Afrique’’ rapporte que lors de leur récente visite en Tunisie, des sénateurs états-uniens ont suggéré «de confier la gestion de l’aide budgétaire américaine pour 2016-2017 à une équipe de l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) qui s’installerait carrément au siège de la Banque centrale».
Parce qu’il a placé, en connaissance de cause, au pouvoir une équipe de gouvernants incompétents, le Tunisien prit part à la mise d’instances de souveraineté sous tutelle étrangère. Vu sa persistante passivité face à l’inconditionnelle allégeance aux colons, confirmée par le ramassis mercenaire prostitué, dont il emboîte le pas, on se demande jusqu’où ira le Tunisien dans son adhésion à la haute trahison.
Le «himar watani» mène le bal
Bien que les signes de la volonté états-unienne de placer la Tunisie sous tutelle aient été déjà visibles dès février 2011, lors de la visite de McCain, reçu par le Premier ministre Mohamed Ghannouchi, auquel son successeur Béji Caïd Essebsi emboîta aussitôt le pas en ouvrant la porte à un large ballet diplomatique, le gros de préparation du basculement du pays sous tutelle des colons se joua via l’arnaque du Dialogue national (le fameux «himar watani»), au cours de laquelle aucun parti n’était officiellement au pouvoir, alors qu’ils exerçaient tous avec le Quartet un pouvoir officieux.
Le lancement du «himar» ayant suivi de peu l’alliance scellé à Paris par le duo Rached Ghannouchi – Béji Caïd Essebsi sous auspice des maîtres, fut marqué par la reprise de plus belle du ballet diplomatique, auquel, sans exception, ils ont tous pris part.
L’œuvre fut, ensuite, achevée par la duperie UTILE ayant accouché de coalition Nidaa Tounes-Ennahdha, contraire aux promesses électorales. Urgée, cette coalition devait mettre en exécution les promesses faites aux maîtres par le technocrate Mehdi Jomaa, imposé à la tête du gouvernement provisoire par le milieu des affaires, question de maîtriser autant que possible l’atmosphère politique globale.
S’étant assurée les services de fidèle serviteur ayant fait ses preuves lors du passage au ministère de l’Industrie, la smala des rentiers a habilement prévenu tout imprévu pouvant causer une effervescence telle celle qu’a connue le Bardo, après l’assassinat de Mohamed Brahmi, le 25 juillet 2013.
En effet, en éloignant les partis du pouvoir jusqu’aux échéances électorales, cette smala visait à garantir à tous les partis l’opportunité de se présenter aux électeurs avec plus ou moins belle image, non pour la beauté des yeux de leurs leaders, mais par souci de doper la motivation de participation au double scrutin. C’est en misant sur un fort taux de participation que l’équipe la plus disposée à servir les maîtres et la mafia locale escomptait se donner légitimité. La smala a donc tout mis en œuvre pour réduire autant que possible les abstentions, dont un taux élevé aurait pu renverser la donne, et poussé les mécontents dans une quête d’alternative pour le salut, qui aurait perturbé le plan des maîtres et des pions.
Comment maintenir un haut niveau de confiance du Tunisien dans l’une ou l’autre composante d’une sphère politique coalisée autour de la haute trahison malgré diversité de couleur et guerre pour le pouvoir? En écartant toutes ses composantes du pouvoir pendant la période pré électorale, pour redonner virginité à certains et éviter que le bilan de l’un et/ou l’autre parti(s) sortant(s) ne provoque dégoût de l’électeur qui pénaliserait non seulement ce(s) parti(s), mais la classe politique dans son ensemble.
Cette exonération de tous les partis de l’évaluation d’une action gouvernementale menée avant les élections fut gage de maîtrise du taux de mécontents, donc d’abstentions. Ainsi conditionné, pris dans le faux débat modernisme/islamisme, l’électeur oublia la traîtrise à laquelle tous les politiques ont pris part, et sacrifia ainsi la suprématie de l’intérêt national, donc la souveraineté. C’est sur fond de tel désolant tableau que l’UTILE a dupé masse de Tunisiens faisant triomphe du double scrutin.
La smala des rentiers et des mafieux à la manoeuvre
Venons-en à la dissection de toutes les responsabilités.
– Il y a d’abord celle de la classe politique toutes tendances confondues ainsi que le Quartet du Dialogue national (UGTT, Utica, LTDH, Ordre des avocats). Tous vendus, les partis flanqués de dits représentants de la société civile récompensée du Nobel de la Paix, ont pris part à la partouze «himar», dont les parties de plaisir furent occasion de viol à répétition de la souveraineté, facilité par un vaste ballet diplomatique qui accompagna à merveille l’engagement du pays dans la voie de la banqueroute, travestie via habile manipulation des masses par les médias, en efforts en oeuvre de salut.
– Les intellectuels ayant gardé silence sur la haute trahison qui se déroulait sous leurs yeux. Plutôt que de dénoncer et en citer les risques, leur écrasante majorité s’est alignée derrière l’un ou l’autre clan traître dans l’espoir d’en récolter quelques miettes des dividendes et/ou préserver des privilèges acquis sans mérites sous l’ère déchue. Des docteurs universitaires, toutes disciplines confondues, principalement des femmes, ont joué à côté des médias un rôle clé dans l’appui à la haute trahison.
– L’armée d’affiliés à l’UGTT qui observait dans un silence complice le secrétaire général du syndicat emballé dans des rencontres sans fin avec les chanceliers occidentaux, alors que si elle avait eu minimum d’égard aux sacrifices et à la mémoire des bâtisseurs de l’UGTT, elle aurait dénoncé les faits des autres composantes de la smala des traîtres et interdit à Houcine Abassi d’y prendre part.
– Les milieux d’affaires qui laissaient faire, tout en ayant conscience que leur grande docilité avec l’internationale du crime menait le pays droit vers le détricotage de notre économie, donc vers la faillite.
– Tout acteur agissant dans le domaine des droits de l’Homme et au sein du barreau et de la magistrature, ayant laissé faire en connaissance de cause les deux autres membres du Quartet, qui relevaient de l’une ou l’autre corporation, censées être piliers du système judiciaire du pays.
– Tous les Tunisiens qui ont toléré, malgré les multiples avertissements, l’organisation du double scrutin truqué, plutôt que de le dénoncer et d’appeler à la mobilisation pour virer en bloc le ramassis traître, qui a mis main dans celles de colons architectes de la haute trahison d’une nation et d’un peuple.
– L’élite débauche ayant servi de porte-couffin à l’utile a mené une massive propagande pour endoctriner maximum d’analphabètes politiques et en escroquer les voix au profit de traîtres présentés en sauveurs, par cette élite débauche qui n’a lésiné sur aucun moyen pour faire écran aux voix averties qui se sont investies pour empêcher la banqueroute généralisée qui finit en tutelle, puis en colonisation.
– La part non négligeable de Tunisiens qui comprend le risque, mais préférant le confort de l’assistanat dans lequel elle se plait depuis des années, opte pour le suivisme aveugle. Jusqu’où ira la disposition du Tunisien à prendre part à la haute trahison, en s’abstenant de virer les mafieux et rentiers livrant le pays aux colons, tout en leur emboîtant pas?
* Experte en coopération et développement.
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