Que peut faire aujourd’hui l’Etat tunisien face aux terroristes, contrebandiers, politiciens faillis et syndicalistes radicalisés qui sont en train de faire couler le pays ?
Par Mohamed Ridha Bouguerra *
La question de savoir si des réformes sont encore ou non possibles s’impose avec d’autant plus d’insistance en ce moment que partout il y a blocage et qu’aucune mesure gouvernementale ne semble trouver preneur ou adhésion de la part des secteurs concernés.
Il suffit de se demander quel sort a été, jusqu’ici, réservé aux dispositions prévues par la loi de finances 2016 et relatives à l’imposition des activités de certaines professions libérales comme celles, seulement à titre d’exemples, des médecins, pharmaciens, avocats ou cafetiers. Ainsi, nous assistons depuis des mois à une levée de bouclier générale où chacun, à tour de rôle, crie misère et, si possible, plus fort que le voisin, tout en exigeant d’aller voir ailleurs et en jurant que les dispositions inscrites dans la loi de finances ne seront jamais appliquées !
Égoïsme corporatiste quand tu nous tiens !
Allez demander, ensuite, à l’exécutif de réaliser les plans destinés à améliorer les infrastructures du pays et, surtout, encadrer, accompagner et recruter les milliers de jeunes chômeurs dont l’impatience légitime finira, si elle n’est pas satisfaite à temps, par tout emporter sur son passage au risque de voir la barque couler avec tous ses occupants, médecins, pharmaciens, avocats et cafetiers compris ! Qui oserait prétendre, en effet, que nous sommes à l’abri d’une nouvelle explosion sociale? Certains rêveurs endurcis et attardés semblent pourtant la souhaiter et y travailler d’arrache-pied!
D’ailleurs, nul besoin de toucher les gens au porte-monnaie pour voir la grogne et la fronde éclater ici et là ! Voyez le comportement des dirigeants du syndicat de la santé qui, depuis des mois, est en train de remuer ciel et terre et décréter grève après grève, sous le fallacieux prétexte de l’affectation à la direction d’un hôpital à Sfax d’un médecin relevant jusque-là de l’armée nationale. Après la journée dite de colère qui a eu lieu il y a une quinzaine de jours, on nous promet un énième arrêt de travail dans les prochaines semaines ! Pour faire couler un service public déjà fortement sinistré, il n’y a pas mieux que de multiplier ce genre de grèves qui ne fait qu’enrichir les cliniques privées tout en lésant les plus démunis ! Le système de santé à deux vitesses est devenu une évidence à voir le nombre sans cesse grandissant d’établissements de santé privés.
A l’instar des dirigeants du syndicat de la santé, ceux de l’enseignement secondaire ne brillent ni par leur modestie, réserve ou discrétion mais, plutôt, par leur insupportable et fatigante fanfaronnade ! Après avoir vu toutes leurs exigences matérielles satisfaites durant ces deux dernières années, ne viennent-ils pas d’opposer leur veto à la réforme dont notre système éducatif a un si grand besoin et que le ministère de tutelle compte engager à la prochaine rentrée scolaire ? Leur chef, Lassaâd Yacoubi a promis que la réforme ne passera pas ! C’est là une revendication syndicale si légitime que le vaillant syndicaliste a décidé que les notes de fin d’année, hormis celles des classes terminales et de la neuvième, ne seront pas versées et que les conseils de classe risqueront de ne pouvoir se tenir normalement pour décider du passage des élèves d’un niveau à l’autre. N’allez surtout pas accuser M. Yacoubi de prendre nos enfants ainsi que leurs parents en otage!
A qui profite la radicalisation de l’UGTT ?
Ne cherchez pas trop à comprendre les raisons de cette opposition : il est devenu extrêmement difficile de déranger les mauvaises habitudes acquises et de faire sortir les gens de leurs ornières ! L’avenir des générations montantes peut toujours attendre ! Quant au niveau de nos élèves, il ne peut pas être pire que ce qu’il est ! Et puis, ceux qui ont de l’argent inscriront leurs progénitures dans les écoles privées ! Là encore le système à deux vitesses, l’un pour les riches et l’autre pour les pauvres, devient une réalité criante.
Enfin, que dire du bras-de-fer engagé par la direction même de l’UGTT contre le ministre des Affaires sociales qui se trouve actuellement en butte à de virulentes attaques comme peu de responsables gouvernementaux en ont connu au cours des cinq dernières années où l’on a tout vu pourtant ! Les caisses de retraite et de maladie sont en faillite ? Et alors ? L’UGTT doit-elle perdre cette occasion de monter au créneau et montrer à tous que rien ne peut se décider dans le pays sans son explicite aval ?
A qui, finalement, profite cette radicalisation de l’action syndicale ou, plus exactement, cette cécité politique qui ne dit pas son nom? Car, imaginons, un instant, le pire, à savoir une démission du gouvernement Essid et de ses ministres qui, l’un après l’autre, sont en train de perdre la face ou sont condamnés à l’inaction suite aux coups de butoir de syndicalistes irresponsables. Imaginons une dissolution de l’Assemblée du peuple et l’organisation d’élections anticipées? Qui va ramasser la mise et prendre le pouvoir? Suivez mon regard comme dirait l’autre. La fameuse classe ouvrière y gagnera-t-elle vraiment avec aux commandes du pays des libéraux islamistes ou des golden boys ayant fait leurs classes au FMI ou a la Banque mondiale?
Alors, des réformes sont-elles encore possibles ?
Farhat Hached, réveille-toi, tes enfants, tout autant que les contrebandiers, les politiciens faillis de l’ancien régime et qui aspirent à un prompt retour aux affaires ainsi que tous ceux que la révolution dérange, sont en train de faire couler le pays, si cher à ton généreux et patriotique cœur !
* Universitaire.
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