La première phase des consultations pour la formation du gouvernement d’union nationale s’est achevée, lundi, mais des divergences persistent entre les diverses parties.
Cette première phase a été axée sur la structure et la méthodologie d’action du prochain gouvernement, , dont l’initiative avait été lancée, début juin dernier, par le président de la république Beji Caid Essebsi, sans aborder les noms des possibles membres de ce gouvernement, ont indiqué le chef du gouvernement désigné et les différents partis et organisations avec lesquels il s’est concerté durant 5 premiers jours.
La deuxième phase des consultations, qui débute mardi, porte sur les portefeuilles ministériels.
Si, paradoxalement, toutes les parties ont exprimé leur soutien à un gouvernement d’union nationale, la plupart d’entre elles ne se sont pas déclarées prêtes à y faire partie. Ainsi l’Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (Utap) et l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (Utica) ont réaffirmé leur soutien au nouveau gouvernement sans y participer. Au même titre que les partis de l’opposition (Voie démocratique et sociale, le Parti républicain et le Mouvement Echaab), qui ne sont intéressés par des portefeuilles mais se contentent d’un rôle d’accompagnement critique du futur gouvernement.
Seuls les partis de la coalition gouvernementale, notamment Ennahdha et Nidaa Tounes, les plus représentés au parlement, ont réaffirmé la nécessité de tenir compte des résultats des élections pour former le prochain gouvernement et briguent des postes importants dans le prochain cabinet.
Le chef du gouvernement désigné Youssef Chahed, qui mène les consultations à Dar Dhiafa, à Carthage, a indiqué, samedi, que les différents partis de l’opposition ayant pris part aux consultations «n’ont pas fixé de positions définitives sur la participation au gouvernement», se déclarant «ouvert à tous les partis et organisations sans exclusive».
Les réserves de l’opposition
Les trois partis de l’opposition reprochent au président de la république Beji Caid Essebsi de «forcer les choses» en faisant valoir son droit constitutionnel en désignant Youssef Chahed au poste de chef du gouvernement. Ils estiment que le chef de l’Etat a «sauté la deuxième étape des consultations dont la première étape avait été couronnée par le document de Carthage», pensant qu’il «s’est résolu aux quotas partisans et à l’élargissement de la coalition au pourvoir», selon l’expression de Samir Ettaieb, secrétaire général de la Voie démocratique et social, qui a coupé court ainsi à une éventuelle participation de son parti au gouvernement.
Tout en affirmant que les partis de l’opposition considèrent le gouvernement d’union nationale comme «une nécessité exigée par la conjoncture», ils soulignent que le gouvernement «doit être dirigé par une personnalité politique se plaçant à la même distance vis-à-vis de tous les partis».
Même son de cloche du côté du Mouvement Echaab dont le secrétaire général Zouheir Maghzaoui déclare que «les partis de l’opposition ont été surpris par le nom de Youssef Chahed et ont été poussé ainsi à se retirer du processus qui s’est éloigné de la ligne de la consultation et du dialogue».
La même position a été exprimée par Issam Chabbi, dirigeant du Parti républicain, qui a déclaré que son parti s’était engagé dans les consultations sur le gouvernement national «pour sortir le pays de la crise sans discuter des noms avant de débattre des contenus et des priorités». «Mais nous ne sommes pas concernés par la composition du gouvernement tout en surveillant l’application des points contenus dans le document de Carthage, pour garder le contact avec les institutions de l’Etat», a-t-il souligné. M. Chabbi a affirmé à cet égard que «le document restera la référence dans l’évaluation de la prestation du nouveau cabinet» qu’il a qualifié de «précipité sans véritable caractère de gouvernement d’union nationale».
Le mouvement Projet Tunisie (Machrou Tounes) a marqué ses distances, lui aussi, du processus de formation du nouveau gouvernement. Exprimant ses réserves sur la personne de Youssef Chahed, son secrétaire général Mohsen Marzouk a clairement déclaré, lundi, que son parti «n’est pas concerné par la participation au gouvernement d’union nationale et fixera sa position définitive à son égard lorsqu’il sera présenté devant l’Assemblée des représentants du peuple».
Hostilité du Front et appétit d’Ennahdha
Nettement plus hostile à ce gouvernement, le Front populaire, composé d’un groupe de partis de gauche, a boycotté les consultations auxquelles ont pris part au total 9 partis et 3 organisations nationales. Il avait aussi boycotté le vote sur le renouvellement de la confiance au gouvernement Habib Essid, qui avait été désavoué lors du scrutin du 30 juillet dernier.
Le Front estime que le choix de Youssef Chahed «n’est pas l’aboutissement de consultations nationales et le fruit d’un large consensus politique mais un choix qui perpétue l’ancien régime fondé sur les liens de parenté, le clientélisme et le monopole des institutions par une infime minorité liée par des intérêts en relation avec les centres de pouvoir et de corruption».
Le soutien franc accordé à Youssef Chahed est venu des partis de la coalition sortante, notamment Nidaa Tounes et Ennahdha. Ainsi le président du bloc parlementaire du Nidaa, Sofiène Toubal, a indiqué que son parti présentera au chef du gouvernement désigné «nombre de compétences pour choisir parmi elles des ministres» tout en proposant le maintien des ministres du Nidaa ayant servi dans le gouvernement Essid.
De son côté, Rached Ghannouchi, leader du mouvement Ennahdha, a souligné la nécessité de tenir compte des résultats des dernières élections législatives «même si le nouveau gouvernement ne sera pas constitué sur la base des quotas partisans».
L’Union patriotique libre (UPL) de Slim Riahi a sollicité pour sa part des portefeuilles à vocation sociale ayant pour objectif la lutte contre la corruption.
Enfin Afek Tounes de Yassine Ibrahim a déclaré qu’il dispose de cadres capables de faire partie du futur gouvernement d’union nationale et prêts à assumer leur responsabilité s’il sera sollicité.
I. B. (avec Tap).
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