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A propos du drame de Marjorie Quiterio : L’essentiel, l’important et l’abject

Marjorie-Quiterio

Certaines réactions au décès de la Marjorie Quiterio, après une opération chirurgicale à Tunis, ont exploité cette tragédie, falsifié les faits et alimenté la polémique.

Par Slim Boujnifa

Le drame de Marjorie Quiterio, cette jeune femme française ravie à la fleur de l’âge suite à une intervention chirurgicale qui s’est déroulée le 12 juillet 2016 dans une clinique de Tunis, a fait couler beaucoup d’encre que ce soit en Tunisie ou en France.

Le choc, la solidarité avec la famille et les proches, la révolte contre l’injustice du destin et des aléas de la vie, voilà ce que devrait ressentir une personne dotée d’empathie et d’humanité.

Les premiers bouleversements du traumatisme passés, la douleur demeure vivace, mais vient le temps de la compréhension. C’est l’attitude d’une personne responsable.

Les médecins font vœu de sauver des vies, d’atténuer les souffrances, et d’apporter bien-être et épanouissement à leurs patients. La profession, aussi noble soit-elle, ne bénéficie jamais d’un blanc-seing et est régentée par des codes et un corpus légal. Des brebis galeuses existent comme dans toute corporation. La méfiance devant donc être de mise et l’examen des faits scrupuleux.

Commençons par les faits. Marjorie Quiterio est une Française de 29 ans qui a décidé de se faire opérer en Tunisie; une opération de chirurgie esthétique pour éliminer les bourrelets disgracieux du ventre et des fesses. Une liposuccion comme on en pratique des dizaines quotidiennement dans les cliniques privées tunisiennes. Opérée le 12 juillet en fin de matinée, Marjorie décède le soir même vers 20h d’une embolie pulmonaire graisseuse. Un aléa chirurgical connu des praticiens et qui n’arrive que dans un cas sur 10.000. Ce qui n’empêche pas, pour ôter tout doute possible, de se demander si l’indication chirurgicale* est justifiée et conforme aux standards internationaux, si la clinique et le chirurgien jouissent d’une bonne réputation, et si la complication a été détectée à temps?

Le parquet tunisien a rapidement diligenté une information judiciaire dont les premières conclusions n’ont pas mis en cause l’équipe chirurgicale. Les médecins légistes de l’Institut médico-légal de Lyon ont écarté comme leurs collègues tunisiens l’hypothèse de l’erreur médicale et ont confirmé l’aléa chirurgical.

A ces conclusions préliminaires concordantes, la polémique devrait être close et la discrétion de mise pour permettre à la famille de faire son deuil et aux magistrats de poursuivre sereinement leur enquête. Sauf que des brebis galeuses existent comme indiqué plus haut.

Il y a quelques semaines à peine, les instances régulatrices prévenues par le Conseil de l’ordre des médecins avaient interdit une publicité diffusée sur une chaîne privée… au bénéfice d’une agence de services médicaux spécialisée dans la chirurgie esthétique. Une pratique clairement en contradiction avec la déontologie de la médecine qui n’est pas censée être une profession commerciale comme les autres.

Dans ce contexte de «guerre commerciale» farouche sur le «marché» florissant du tourisme médical tunisien, il ne faut pas s’étonner que certaines parties – non identifiées pour le moment – exploitent lâchement cette tragédie en falsifiant les faits et en alimentant la polémique à travers des pages Facebook.

Un patient étranger ne fera pas la différence entre l’excellente réputation d’un chirurgien tunisien de la mauvaise réputation d’un autre chirurgien tunisien. A défaut de pouvoir rappeler les règles d’éthique de base à ces gens qui font leurs petites affaires sur les malheurs des gens – une morale ils n’en ont aucune –, peut-être pourrions-nous les convaincre qu’à force de salir des collègues et des compatriotes, ils ne seront pas épargnés du naufrage de tout un secteur médical national qui fait vivre des centaines de personnes.

(*) L’indication chirurgicale est la prise de décision d’effectuer une intervention chirurgicale et le choix de la technique chirurgicale optimale pour ce patient.

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