Outre les risques qu’elle représente pour la sécurité et la santé, la contrebande du carburant a causé, en 2015, une baisse de 45% des activités des stations services.
La Chambre syndicale des sociétés des gérants et propriétaires des stations-service (CSSGPSS) et la Chambre syndicale nationale de distribution des produits pétroliers (CSNDPP) ont organisé, aujourd’hui, mardi 6 décembre 2016, au siège de l’Utica, une rencontre avec les représentants des médias pour débattre des enjeux auxquels le pays doit faire face dans la lutte contre le commerce parallèle des carburants et ses conséquences négatives sur le budget de l’Etat.
Après les allocutions de bienvenue prononcées par les organisateurs, Lotfi Hamrouni, membre du bureau exécutif de l’Utica et président de la Fédération nationale de la chimie (FNC), de Matthieu Langeron, président de la CSNDPP et Sadok Bédioui, président de la CSSGPSS, on a présenté un aperçu sur la crise qui a frappé le secteur suite à la montée en flèche du fléau de contrebande du carburant, importé illégalement d’Algérie et, surtout, de Libye.
Le Groupement professionnel des pétroliers (GPP) a profité de l’occasion pour annoncé le lancement d’une campagne de sensibilisation intitulée «El kontra kontrek» (La contrebande est contre toi) pour souligner auprès des consommateurs les ravages de ce fléau sur la société et l’économie tunisiennes.
Deux études qualitative et quantitative réalisées pour le compte du GPP ont ensuite été présentées par Hassen Zargouni, directeur général du cabinet Sigma Conseil, qui a expliqué que l’étude qualitative révèle que l’écart de 700 millimes sur le prix du litre entre le carburant légal et celui de contrebande reste la principale raison qui porte les consommateurs tunisiens à se tourner vers ce marché illégal.
Les résultats de la seconde étude, qui est quantitative, viennent confirmer cette première conclusion, puisqu’un peu plus de 65% des personnes interrogées consomment le carburant de contrebande pour la différence de prix, même s’ils sont conscients des risques, en particulier pour leur sécurité et celle de leur famille et des risques liés à la qualité du carburant (possibilité de casse moteur).
L’étude révèle également qu’environ un tiers des personnes sondées perçoivent la contrebande comme un système bénéfique pour eux mais également pour leurs régions et cautionnent donc ces pratiques illégales.
Parmi les raisons du développement du marché parallèle, l’étude cite la relation distante et de non confiance avec l’Etat, la relation de proximité avec les contrebandiers, la relation de non confiance avec le marché régulier et toutes ces raisons sont renforcées par la banalisation de la corruption et des risques liés à la contrebande.
Au niveau régional, la contrebande est ancrée dans les habitudes des régions du centre et des régions frontalières où elle est perçue comme une activité naturelle et l’achat du carburant chez les contrebandiers est une pratique vulgarisée dans les régions frontalières, du sud et du centre.
Enfin ce marché parallèle est associé à beaucoup plus d’avantages importants que le marché régulier n’offre pas ce qui renforcent la fidélité des clients du carburant de la contrebande.
Selon l’étude, il existe 4 profils de contrebandiers de carburant : les grands, les moyens, les petits et les particuliers (chefs de familles qui ramènent régulièrement les quantités nécessaires de carburant pour leur usage personnel).
L’étude estime que le marché parallèle de carburant se développe essentiellement parce qu’il présente des réponses à des demandes importantes chez les habitants des régions frontalières, du sud et du centre (emploi, amélioration du niveau de vie…).
En conclusion, l’étude estime que les acteurs du marché légal de carburant ont besoin d’aide de la part de l’Etat pour reconquérir leur part de marché ou limiter le développement de ce marché parallèle qui nuit aussi bien à l’économie qu’à la sécurité du pays.
Ce marché parallèle constitue des risques pour les emplois formels des stations-service qui emploient plus de 10.000 personnes dans toute la république, sans dénombrer les emplois créés sur la partie transport elle aussi fortement touchée par ce fléau qui a causé, rien qu’en 2015, une régression des activités des stations services atteignant 45%.
Enfin, l’étude estime que seule l’application d’une politique gouvernementale efficace et engagée dans la lutte contre la corruption et la contrebande, l’atténuation des écarts de prix avec les pays frontaliers et la réforme de l’ensemble du secteur de la distribution des carburants et l’adoption des mesures nécessaires peuvent mettre un terme au marché parallèle.
Pour sa part, le GPP a appelé de tous ses vœux à une mise en œuvre rapide d’un plan d’actions afin d’éradiquer ce fléau, néfaste à l’économie du pays.
I. B. (avec communiqué).
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