Le nombre sans cesse croissant de visiteurs de la synagogue de la Ghriba, à Djerba, dément, à chaque fois, les funestes augures des devins.
Par Hamma Hanachi
Le pèlerinage de la Ghriba version 2017 a tenu ses promesses, René Trabelsi, voyagiste et promoteur de la «ziara», salue «un afflux massif, une organisation parfaite et une remarquable efficacité des services sécuritaires», propos confortés par plusieurs visiteurs étrangers rencontrés.
Une manifestation à haute valeur symbolique
Djerba fortement sécurisé pour la circonstance a brillé de ses feux et de son éclat, les actions se bousculaient : découvertes de l’île, rencontres culturelles et cultuelles savamment dirigées.
Pour répercuter les effets de cette manifestation à haute valeur religieuse et symbolique et tant attendue par les habitants, le ministère du Tourisme et de l’Artisanat a invité plus d’une centaine de journalistes de différents pays pour la couvrir.
Le rabbin Cohen, israélien, originaire de Medenine.
Durant ce pèlerinage (du 9 au 14 mai), la communauté juive de Djerba a plus que doublé, les pèlerins de la Ghriba enrichissant la population locale estimée à 1.500 citoyens.
A peine arrivée de Paris où elle assistait au siège de l’Unesco à la commémoration du 20e anniversaire de l’inscription du site de Dougga parmi les monuments classés sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité, Selma Elloum Rekik, ministre du Tourisme et de l’Artisanat, a tenu, avec Mohamed Zinelabidine, ministre des Affaires culturelles, une conférence de presse conjointe avec les journalistes invités. Elle a égrené les atouts de la destination, les incontournables richesses de l’île, la nouvelle politique de mise en valeur des sites archéologiques, le tourisme culturel, les chiffres et les recettes du secteur, les attentes et… un ardent appel à revisiter notre pays.
Des prières et des voeux.
Contre les mauvais augures
Les questions ne manquaient pas, l’un évoque les émeutes de Tataouine, l’autre s’enquiert de la sécurité des touristes, un troisième demande les perspectives de la nouvelle saison, etc..
Mme Elloumi Rekik est rassurante : «Les émeutes et les revendications témoignent de la pratique réelle de la démocratie». Quant à la sécurité, elle répond désormais aux normes internationales. «Les clignotants sont au vert. Nous nous attendons à une augmentation de plus de 30% de visiteurs par rapport à la saison écoulée».
Suite à l’appel du Premier ministre israélien d’éviter la Ghriba à cause des hauts risques d’attentat contre les juifs, comment la communauté a-t elle réagi? La question est remise plus tard sur le tapis. «Tous les ans, il y a un devin ou un haut responsable pour battre le rappel dans ce sens, notre réponse se vérifie par le nombre sans cesse croissant de visiteurs et les témoignages démentant à chaque fois les funestes augures», répondra René Trabelsi.
Les textes du Thora sur le portable.
Le lendemain les témoignages n’ont pas manqué lors des festivités dans la synagogue remplie où pèlerins et curieux se mêlaient dans une ambiance à la fois recueillie et festive.
Danses, chants et rythmes populaires
Des propos rassurants du chef du gouvernement, Youssef Chahed, venu tôt le matin sans bruits ni déclarations tonitruantes. Fin d’après-midi, beaucoup de ministres marquent leur présence, le mufti de la république Othman Battikh entame une discussion apparemment attentive avec le rabbin Haïm Bittan, des députés souhaitant la bienvenue aux pèlerins, des chefs de partis à la recherche d’une caméra pour être vus, des responsables en flagrant délit de flagornerie, des ambassadeurs surprotégés font le tour de la maison, des enfants en tenue de fête dansent au rythmes des chants populaires, l’animateur lance les enchères pour une menara miniature, il reçoit un foulard qu’il accroche et annonce le nom… musique.
La fête au fondouk.
Au coucher du soleil, les animateurs sortent le chariot bariolé de foulards noués pour exaucer les vœux, la menara trône au milieu, l’aboyeur annonce les enchères pour qui poussera le chariot en aller et retour jusqu’à la synagogue la plus proche, «une fois, deux fois… adjugé !»), des cris, des youyous suivirent, la foule se disperse, les commentaires vont bon train, alors que dans la grande cour intérieure quelques-uns s’attardent devant les étals de casse-croûte, de keftas ou de fricassés accompagnés de boukha ou de bières, l’animateur-aboyeur décline ses vœux semant par-dessus les têtes les bonbons et les fruits secs.
L’hymne national sonne la fin du brouhaha ambiant et du pèlerinage.
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