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Qui est l’intermédiaire Youssef Zarrouk?

À la suite des articles ayant repris certains des textes de l’intermédiaire Youssef Zarrouk publiés sur sa page Facebook concernant la situation politique en Tunisie, de nombreux lecteurs ont posé avec insistance la question «Qui est Youssef Zarrouk?», afin d’y répondre, nous publions ci-dessous le passage du livre ‘‘Tunis Connection’’ qui lui consacre tout un passage.

‘‘Tunis Connection. Enquête sur les réseaux franco-tunisiens sous Ben Ali’’ est un livre écrit par les deux journalistes d’investigation français Lénaïg Bredoux et Mathieu Magnaudeix et publié aux éditions Seuil, à Paris, en 2012.

Ce livre est une enquête profonde et une immersion au cœur des réseaux d’influence entre le régime de l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali et la France, que ce soit avec ses officiels – ses hommes politiques – ou des hommes d’affaires, des affairistes, des journalistes et des hommes d’influence. Tout un passage (pages 79,80 et 81) intitulé «Papy Zarrouk et les ambassadeurs» est consacré à l’intermédiaire Youssef Zarrouk.

«Papy Zarrouk» et les ambassadeurs

Lanxade est aussi très proche d’un personnage de l’ombre, mais important pour comprendre les relations entre la France et la Tunisie : Youssef Zarrouk. Héritier d’une grande famille aristocratique ruinée après l’indépendance, c’est un intermédiaire international «de haut calibre», dixit un homme d’affaires. Longtemps proche du pouvoir tunisien, c’est aussi un «renifleur» de marchés hors pair pour les grandes entreprises qui veulent investir en Tunisie, en Libye, en Algérie. «C’est un thermomètre, dit un homme d’affaires de Tunis. II prend la température de l’eau…» Youssef Zarrouk est un sexagénaire élégant et affable. Quand il n’est pas sur son yacht, dans une suite au Bristol à Paris ou dans son superbe loft de Cannes, «Papy Zarrouk», son surnom dans les milieux d’affaires tunisiens, est un pilier du club nautique de Sidi Bou Saïd. Là, il passe ses journées à assouvir sa passion du poker.

Ancien vendeur de ‘‘Jeune Afrique’’, l’homme s’est fait une spécialité de la vente de trains, de centrales électriques, d’avions et d’armements – «Je n’ai jamais vendu un fusil», nous jure-t-il un soir dans le jardin du Bristol : cela fait bien rire tous ceux qui le connaissent.

Au début des années 1990, ce proche de Charles Pasqua est sollicité par la Sofremi (1), l’office de vente d’armes du ministère de l’lntérieur français, pour vendre des équipements de surveillance au régime tunisien. «Le programme visait à restaurer le renforcement de la protection des frontières de la Tunisie, l’identification des empreintes digitales pour le ministère de l’Intérieur, la couverture Radar et divers matériels pour le ministère de la Défense», détaille Bernard Guillet, le conseiller de Pasqua. L’amiral Lanxade, alors ambassadeur, confirme : «Je me souviens d’un projet de gros contrat de 300 millions de francs.» L’affaire ne se fera pas. Mais, en 1999, quand le fils de Charles Pasqua, Pierre-Philippe, fuit en Tunisie pour échapper au juge Courroye qui l’accuse d’avoir touché 2,5 millions de dollars de commissions occultes (2) versées par la Sofremi et GEC-Alsthom, le rejeton de l’ancien ministre de l’lntérieur est logé par l’ami Zarrouk dans une«superbe maison» de Sidi Bou Saïd, avec piscine et «vue imprenable sur la Méditerranée».

Zarrouk s’est aussi fait une spécialité de «draguer» les diplomates français. En général, il les invite à contempler sa formidable collection d’art orientaliste, une des plus belles du pays. Certains n’ont guère résisté. Echange de bons précédés : lui pense tirer profit de leur carnet d’adresses, eux y ont vu un relais utile pour entrer en contact avec Carthage… ou préparer leur retraite dorée. Jacques Lanxade, en poste a Tunis de 1995 à 1999, ne cache pas avoir été très proche, mais affirme ne pas avoir été en affaires avec lui. «Je l’ai connu par la famille des laboratoires Mérieux, dit Lanxade, car son beau-frère était représentant du laboratoire en Tunisie. C’est un homme très intéressant, il avait une connaissance intime du pays.» Alors qu’il est charge par Jacques Chirac de faire venir Ben Ali à Paris, Lanxade le consulte pour sonder les intentions du président tunisien. À l’époque, Zarrouk est très proche de Slim Chiboub, un des gendres du dictateur. Lanxade et lui deviennent amis. Tellement proches qu’il n’est pas rare que M. Zarrouk ramène à Lanxade un petit cadeau des boutiques de luxe cannoises.

Quant à Daniel Contenay, il s’est associé avec Zarrouk, sitôt la retraite arrivée. Associes à un troisième larron, Jean-Marc Pizano, le trio a créé une société de conseil, Lynx Conseil International. Au nom de Lynx, Contenay a travaillé pour Areva qui souhaitait s’implanter dans le nucléaire civil en Turquie, et effectue une mission pour la direction d’EDF. Les trois hommes ont aussi collabore via une autre société, ATE (Aéronautique et Technologies embarquées) qui fournit du matériel embarqué dans les avions civils ou militaires, et compte parmi ses plus gros clients de nombreux groupes français ou européens comme Thalys, Eurocopter, Safran ou EADS.

En avril 2010, Lynx a été liquidée. Pizano est devenu président d’ATE, Contenay vice-president. Et Zarrouk… a disparu de l’organigramme. «On s’est fâché, une affaire de facture non réglée, prétend Contenay. Ce monsieur n’est pas honnête. C’est un vendeur de vents. II nous a promis beaucoup de contrats, mais n’a pas ramène grand-chose.» Ces dernières années, l’étoile Zarrouk a pâli. Son allié, Slim Chiboub, est tombe en disgrâce au début des années 2000, remplace par l’autre branche de la famille, les Trabelsi et les El Materi. Bien des entreprises françaises se sont passées de ses services. Peu disert lors de notre rencontre à l’hôtel Bristol, Zarrouk lâche : «Avant, je travaillais beaucoup avec la France. Moins maintenant : les entreprises françaises préfèrent travailler avec des gens proches du pouvoir.»

* * *

L’intermédiaire Youssef Zarrouk dans son statut Facebook de ce matin, jeudi 2 août 2018, a écrit: «Restons vigilants, la France que nos combattants pour la liberté ont sorti par les armes revient dans les fourgons du capitalisme sauvage.»

Oui, Youssef n’aime pas le capitalisme, Youssef veut nous faire croire qu’il n’aime pas la France et comme il disait mépriser l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali dont il a été pourtant très proche successivement de son gendre Slim Chiboub puis de son beau-frère Belhassen Trabelsi, il s’en prend aujourd’hui à la France. D’abord Slim Chiboub et Belhassen Trabelsi apprécieront le mépris trop tardif et trop facile de Youssef à l’égard de M. Ben Ali, ensuite la question qui se pose, Youssef aime-t-il ou pas la France? Nous poserons la question à Fa-Raon, le chat du Bristol, il saura y répondre.

Notes :
Page 79:
1. Sofremi: Société française d’exportations de matériels et systèmes du ministère de l’lntérieur.
2. En avril 2010, Charles Pasqua a été condamné à de la prison avec sursis pour complicité d’abus de biens sociaux et complicité de recel par la Cour de justice de la République.
Page 80:
1. «Pierre-Philippe Pasqua, exilé volontaire », Paris Match, 14 octobre 2004.

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