Le Tabarka Jazz Festival a fait son retour cette année après des années de doute et de crise, une édition porteuse d’espoir marquant – espérons-le – un nouveau départ et qui a démarré le mardi 20 août 2019 pour se poursuivre au samedi 25 du même mois.
Par Fawz Ben Ali
Après deux premières soirées plutôt réussies, aussi bien au niveau de l’organisation que de la présence du public, la direction du festival a dû annuler (à la dernière minute) la troisième date du programme, un concert en deux parties de Yacine Boulares et Marla Glen, et ce, à cause des intempéries.
La musique metal à la rencontre de la musique tunisienne
Mais le festival a vite repris son cours le lendemain avec un concert des plus attendus, dédié à la musique metal avec les deux groupes tunisiens Nawather et Myrath. Une première dans l’histoire de ce festival qui a su, au fil des années, s’ouvrir sur d’autres genres musicaux que le jazz et attirer de nouveaux publics.
Le soir du vendredi 23 août, la Basilique de Tabarka a ouvert ses portes aux amoureux de la musique métal, les fameux «metalleux», qui étaient venus très nombreux assister à cette soirée inédite, la première dans l’histoire du festival où on programme du metal.
Le jeune groupe tunisien Nawather a assuré la première partie de la soirée, proposant une musique de metal oriental assez similaire à celle de Myrath. Formé en 2013, le groupe est composé de Ryma Nakkache et Wajdi Manaï au chant, Hichem Ben Amara à la basse, Yazid Bouafif à la guitare, Saïf Louhibi à la batterie et Chaïma Gaddour au qanûn. Le public s’est fait vite entraîner par l’ambiance folle de ces jeunes talents qui ont su se démarquer des autres groupes du genre, grâce à «un ingrédient magique» qui est le qanûn. C’est probablement le premier et seul groupe metal qui ose inclure cet instrument emblématique de la musique arabe dans un registre aussi loin et différent. Un mélange audacieux qui fonctionne plutôt bien et qui fait aujourd’hui la singularité de Nawather. «Il faut toujours savoir prendre des risques», a souligné la jeune chanteuse du groupe lors du point de presse qui a suivi le concert, annonçant qu’un deuxième album devrait sortir bientôt.
Myrath, les ambassadeurs du metal tunisien
La soirée s’est poursuivie en deuxième partie avec le groupe Myrath, vedette de cette édition, qui avait donné il y a quelques semaines un grand show au Festival international de Hammamet, ayant affiché complet, comme d’ailleurs la plupart de leurs passages en Tunisie et un peu partout dans le monde, car il s’agit aujourd’hui du seul groupe tunisien et arabe à avoir acquis une notoriété internationale de cette ampleur.
Zaher Zorgati (chant), Melek Ben Arbia (guitare électrique), Elyes Bouchoucha (claviers), Anis Jouini (guitare basse) et Morgan Berhet (batterie) ont enflammé la scène de la basilique avec leur présence inégalable et leur identité musicale très personnelle où le metal progressif côtoie les sonorités tunisiennes.
Ils ont sillonné les plus grandes scènes du monde et se font inviter par les prestigieux festivals internationaux de metal, une reconnaissance qui a fait d’eux les ambassadeurs du metal tunisien dans le monde, un genre qu’ils aiment plutôt appeler aujourd’hui «Blazing Desert metal» dont ils sont les pionniers, avaient-ils précisé lors d’un point de presse tenu à la Basilique de Tabarka.
«Myrath» qui signifie «héritage» défendent en effet l’héritage culturel tunisien aussi bien dans leurs compositions que dans leurs clips-vidéo, leurs costumes de scène ou les logos de leurs albums. L’identité tunisienne est omniprésente et fièrement représentée par ce groupe fondé en 2001 par le guitariste Melek Ben Arbia.
«On se rappelle encore de notre passage à Tabarka il y a plus de 10 ans dans une scène off où on jouait encore des reprises (…) Nous sommes à la fois nostalgiques de cette époque et fiers d’être programmés dans ce festival mythique», avaient confié les membres du groupe qui étaient venus présenter leur tout nouvel album ‘‘Shehili’’, sorti en mai 2019, et qui connaît déjà un énorme succès en vente.
Myrath ont donc consacré la majeure partie du concert à la promotion à leur 6e album, mais le groupe a également repris quelques uns de ses anciens titres les plus connus, notamment ‘‘Tales of the sands’’, ‘‘Believer’’, ‘‘No body’s lives’’, ‘‘Silence’’ …
La programmation de deux groupes de métal dans un festival de jazz n’a évidemment pas été du goût de tout le monde, mais le Tabarka Jazz Festival, qui renaît à peine de ses cendres et qui cherche encore ses repères, a choisi de s’ouvrir sur le vaste monde de la musique, peut-être même au risque de se dénaturer, en s’éloignant à 360° de sa première vocation première qu’est le jazz.
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