L’auteur de cette tribune, se définissant comme un «électeur engagé», à plus de 80 ans, se montre plus optimiste pour l’avenir de la Tunisie dont il a connu le passé. Et appelle a voter l’avenir, incarné selon lui par Youssef Chahed.
Par Mohamed Mestiri *
J’ai vécu les affres de la 2e guerre mondiale à l’âge de 7ans et la lutte contre le colonialisme à l’âge adulte. Mes deux grands frères y étaient impliqués pleinement.
Le premier, en tant que médecin chirurgien, soignait les combattants (fellagas) en se déplaçant dans le maquis; le second a eu le devoir et l’honneur de diriger au risque de sa vie, la lutte armée contre le colonialisme.
Tout ceci a marqué profondément en moi le patriotisme et le besoin insatiable de participer à l’édification de mon pays : la Tunisie.
Ayant dépassé l’âge de 80 ans, j’éprouve aujourd’hui un sentiment de bonheur et de fierté de participer, en tant que citoyen tunisien et pour la troisième fois consécutive, à des élections libres et démocratiques dans notre pays. J’apprécie, également, à juste titre, de vivre cet engouement qui touche l’ensemble des Tunisiens à l’approche des élections.
On en parle partout, tous les jours, et dans tout le pays. Le peuple tunisien, grâce à son éducation et son niveau intellectuel s’y intéresse pleinement. Les médias et les réseaux sociaux aidant, on en discute dans les cafés, dans les cercles d’amis, dans les lieux de travail et encore plus au sein des familles; les débats y sont souvent orageux entre père et fils, ceci dénote une société tunisienne vivante et en train d’emprunter, à pas de charge, la voie démocratique et de construire son futur sur des bases solides, à l’instar des pays évolués, et c’est tant mieux.
La fièvre électorale, comme son nom l’indique, et comme partout ailleurs, entraîne nécessairement des affrontements entre rivaux. Ces affrontements dépassent souvent les lois de l’éthique et les bonnes manières et tombent dans la démesure, on s’insulte et on tire à boulets rouges entre adversaires et on se bagarre entre colleurs d’affiche dans les ruelles et les bourgades. J’ose dire, et que le lecteur me pardonne, que tout cela est de bonne guerre.
Dans quelques jours, nous serons appelés à élire un nouveau président de la république, qui succédera à Feu Mohamed Béji Caid Essebsi.
Le nouvel élu aura la très lourde responsabilité d’être à la tête de la plus haute magistrature de notre pays.
Pourquoi «très lourde responsabilité» dirons-nous, alors que, selon la constitution, il ne détient qu’une part de l’exécutif ? Sauf que, pour nous autres citoyens, un président de la république est avant tout une référence pour ne pas dire un symbole.
Par son honnêteté, ses compétences et son dynamisme, il assure l’épanouissement et la stabilité sociale par excellence.
Un président de la république ne ment pas au peuple; ne vole pas et ne gaspille pas les deniers de l’Etat. Il ne favorise pas un clan au dépend du peuple. Il doit être capable de choisir les meilleurs hommes et femmes pour diriger le pays et mener à bien ses destinés. Il doit être vigilant aux commandes de nos forces armées pour assurer la sécurité du pays et être continuellement à l’écoute du peuple, et particulièrement la classe défavorisée. Et aussi et surtout il doit avoir une expérience dans les relations internationales, capable de représenter dignement notre pays, de défendre ses intérêts et rehausser son prestige.
Enfin, je ne peux passer sous silence que certains faits et gestes et modes de vie du président, qui sont loin d’être anodins et insignifiants, ont un impact profond sur l’ensemble des citoyens : sa façon de mener une vie familiale simple et citoyenne, à l’écart des vicissitudes de la fonction et de l’exercice du pouvoir; son élégance; sa façon de s’habiller; son éloquence et sa maîtrise du verbe, surtout en présence de visiteurs étrangers.
Les citoyens ont besoin d’être fiers de leur président ; ils veulent l’écouter, l’admirer et le prendre comme exemple.
Maintenant, en ce qui me concerne et pour le choix de notre futur président, j’ai beaucoup réfléchi, suivi assidûment et de longue date les discours, les débats, les interviews de nos dirigeants, des députés, des représentants de partis, des syndicalistes, des économistes. Aussi, je n’ai pas manqué de lire et d’analyser la plupart des publications émanant des établissements étatiques ou autres. Ce qui m’a permis, après mûre réflexion, de fixer mon choix sur le candidat : Youssef Chahed.
À cette occasion, je salue en lui l’homme qui a pris en main, et depuis trois ans, les destinées de notre pays. Il a élaboré avec son équipe ministérielle d’innombrables réformes et réalisations dans tous les secteurs d’activité : santé; éducation; industrie; habitat; agriculture; et j’en passe
Il a réalisé cela dans un contexte et une conjoncture extrêmement défavorable : une crise économique à l’échelle internationale; des troubles sociaux, particulièrement dans les régions défavorisées; une insécurité endémique, créée par le terrorisme; des pressions exercées continuellement par les instances financières internationales; un déficit énergétique grandissant; des grèves à répétition, dans tous les secteurs d’activité; l’abandon de la Tunisie par les investisseurs étrangers, tournés vers d’autres cieux; la chute des rentrées touristiques; une balance commerciale largement déficitaire; un chômage grandissant, surtout parmi les jeunes diplômés; les troubles et la guerre fratricide en Libye; la fuite de nos jeunes élites vers l’étranger…
Compte tenu de cet environnement extrêmement difficile, je mets au défi nos prestigieux économistes, nos politiciens, ou qui se prétendent comme tels, ainsi que nos représentants syndicaux, de présenter, s’ils sont en mesure de le faire, des solutions miracles pour nous sortir de ce bourbier. Mais l’art est difficile et la critique est aisée.
À tous je leur dirais: il faut savoir juger l’homme non seulement par l’évaluation de ses
À tous je leur dirais: il faut savoir juger l’homme non seulement par l’évaluation de ses actions (échecs) mais aussi et surtout par sa façon d’affronter courageusement l’adversité et de sortir indemne. C’est une qualité indéniable, et c’est à cet homme que je fais confiance.
Je me permets maintenant d’adresser un message à notre jeune élite, appelée à voter dans quelque jours.
Un des acquis, pour ne pas dire un des meilleurs que la Tunisie de Bourguiba a réalisé après l’indépendance, est la scolarisation massive à travers tout le pays.
Les résultats aujourd’hui sont édifiants. Les familles les plus modestes, en particulier rurales, dont les enfants n’avaient pas accès à l’éducation du temps du colonialisme, ont vu surgir en leur sein de jeunes diplômés (filles et garçons) d’un haut niveau, et dans tous les domaines; appréciés et convoités même au-delà de nos frontières.
Cette génération constitue aujourd’hui un apport considérable au développement de notre pays.
Et c’est à cette génération d’hommes et de femmes que je m’adresse aujourd’hui pour lui dire, compte tenu des aléas, des contraintes et des soubresauts que vit notre pays, que le chemin est encore difficile et périlleux, mais qu’il n’y a pas d’autres alternatives pour la réalisation de nos objectifs et l’ouverture de notre pays vers la modernité et la prospérité.
Je suis fermement persuadé que cette génération est pleinement consciente de cette situation; c’est pour cela que je lui demande d’user de sa force intellectuelle et persuasive pour convaincre ses proches et son entourage afin qu’ils fassent le bon choix et élire le meilleur.
Tout choix hâtif et irréfléchi peut entraîner notre pays vers l’inconnu et compromettre notre élan vers la modernité et la prospérité morale et matérielle.
Je m’adresse à certains de mes compatriotes, aveuglés par les subsides et les largesses, que cette aubaine ne durera que le temps d’une compagne électorale.
Ces prétendus bienfaiteurs veulent acheter leurs âmes. Et si, par malheur, ils s’emparent du pouvoir, ils feront de ceux-là et de nos acquis démocratiques des résidus à jeter dans les oubliettes de l’histoire.
Je m’adresse enfin et en particulier à une classe moyenne de femmes et d’hommes, pères et mères, laborieux et soucieux plus que d’autres d’assurer à leurs enfants le bien-être moral et physique, afin qu’ils réussissent leurs études et volent de leurs propres ailes dans un pays moderne et prospère ou il fait bon vivre.
Je m’adresse à ces pères et mères qui sont à même de saisir plus que d’autres les dangers qui menacent notre pays; je leur demande de monter au créneau et de faire front à cette déferlante mafieuse qui puise ses ressources dans les eaux boueuses et nauséabondes.
J’ai peur pour nous tous que notre pays sombre de nouveau dans les périodes noires de la dictature et du régionalisme et aussi de ces machiavels en puissance qui manigancent dans l’ombre et qui ne peuvent vivre que d’intrigues et de complots.
Que Dieu nous aide tous pour mener notre pays à bon port et assurer ainsi un avenir prospère et radieux à nos enfants.
* Citoyen à la retraite.
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