Etant à la tête du mouvement ayant le plus grand nombre de sièges parlementaires (Ennahdha), et dans la mesure où le parti qui a occupé la deuxième position aux législatives (Qalb Tounes) est, pour le moment, exclu du processus de formation du prochain gouvernement, Rached Ghannouchi aura certainement un mot non négligeable à dire lors des concertations. Et ce qui s’est passé aujourd’hui le confirme…
Par Cherif Ben Younès
Contraint de quitter ce matin, mardi, 28 janvier 2020, prématurément, la table des négociations avec les partis à Dar Dhiafa à Carthage, il s’est avéré qu’Elyes Fakhfakh, chargé de former le prochain gouvernement, était parti, en urgence, au domicile du président du mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi.
Le dirigeant islamiste joue au chef suprême
L’objet de la rencontre demeure assez mystérieux mais on sait que l’entretien a évidemment porté sur la constitution du prochain gouvernement et que son «urgence» était due au fait que le leader islamiste, qui est également président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), devait partir, dans la foulée, à l’étranger, pour… «une mission parlementaire».
Un épisode qui symbolise l’importance du rôle que joue l’islamiste dans le processus de formation du gouvernement. C’est lui le chef: on ne le sait que trop et on ne cesse de nous le prouver. Mais est-ce que cela justifie «l’abandon» des concertations officielles conduites par le chef du gouvernement désigné, ainsi que son déplacement au domicile de Ghannouchi, plutôt que l’inverse ? Pas sûr. Il y a comme une nouvelle manœuvre malsaine de la part d’Ennahdha pour peser sur la décision nationale, et pas toujours à dans le bon sens.
L’Etat à l’épreuve de la double casquette de Ghannouchi
Cela pourrait, par ailleurs, raviver la polémique concernant la double-tâche exercée par Rached Ghannouchi, à savoir la présidence d’Ennahdha et celle de l’ARP, avec ce que cela engendre en termes de contraintes qui accompagnent inévitablement les efforts de conciliation entre les deux rôles, et dont on a vu une démonstration aujourd’hui. L’impact négatif de cette double casquette ou de ce jeu de rôles sur le bon fonctionnement de l’Etat nous sont prouvés un peu plus chaque jour.
A noter que M. Fakhfakh a chargé Hédi Dammak de le remplacer, pendant son absence, à Dar Dhiafa, et que, pour le coup, ce dernier est désormais pressenti pour être son futur chef de cabinet s’il obtient la confiance du parlement.
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