Les médecins des pays du Maghreb ont tous utilisé l’hydorxychloroquine pour une grande proportion de leurs patients. Mais sans faire trop de bruit. En Europe et aux Etats-Unis, ce médicament continue de susciter des débats dont l’enjeu n’est pas toujours scientifique.
Par Pr Faouzi Addad *
Les États-Unis ont franchi avant-hier, lundi 18 mai 2020, la barre des 90.000 décès et du 1,5 million de cas recensés de Covid-19 (soit 10.000 morts supplémentaires en une semaine). Mais ce qui a focalisé l‘attention du monde entier, c’est la déclaration de Donald Trump, également hier, lors de sa conférence de presse habituelle.
Trump remet l’hydroxychloroquine au centre du débat
Cette fois-ci, le président des Etats-Unis ne nous a pas encouragés à nous injecter de l’eau de javel (ouf !) mais il a confié prendre lui-même, à titre préventif, de l’hydroxychloroquine et du zinc depuis une dizaine de jours malgré des tests négatifs. Et plus étonnant encore, il a avoué aussi qu’il le fait de sa propre décision et que ses médecins à la Maison blanche n’y voyaient pas d’objection et pensaient même qu’il s’agissait d’un bon choix.
À la question des journalistes sur les raisons de ce choix malgré les nombreuses alertes sur la toxicité cardiaque du médicament ingurgité, il a répondu qu’il avait eu beaucoup d’échos positifs et que ce médicament était régulièrement consommé dans le monde par des millions de gens depuis plus de 40 ans.
Les débats à propos de l’hydroxychloroquine sur les plateaux de télévision ou sur les réseaux sociaux ont été passionnés, parfois très vifs et jamais un médicament aussi ancien et bon marché n’a fait couler autant d’encre. Si vous tapez hydroxychloroquine sur Google vous aurez 36,5 millions de recherches possible, beaucoup plus que pour l’aspirine. Ce médicament du «pauvre» a déjoué tous les enjeux des big pharma.
Le match OM-PSG reste donc sans résultat final
De là à dire que le coronavirus aura été un anticapitaliste jusque dans son possible traitement. La pression de politiciens et du grand public pour l’utilisation de l’hydroxychloroquine, dans une stratégie de «on a rien à perdre» semble avoir été à l’origine du fiasco de l’étude Discovery, qui ne découvrira probablement rien. Le match OM-PSG* reste donc sans résultat final. Les dernières études ne sont pas très favorables au médicament, mais elles restent autant critiquées que celles ayant fait la gloire du Pr Didier Raoult pour une grande partie du monde.
Les médecins des pays du Maghreb ont tous utilisé l’hydorxychloroquine pour une grande proportion de leurs patients. Une enquête auprès des médecins généralistes de la ‘‘Revue du praticien’’ montre que 79% des médecins français utiliseraient ce médicament sur eux-mêmes s’ils étaient testés positifs.
Le Covid-19 laissera décidément de nombreuses traces de son passage.
* Professeur en cardiologie.
** OM par référence au Pr Didier Raoult, supporteur de l’hydroxychloroquine, et PSG par allusion à l’establishment médical parisien.
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