Nabil Karoui continue de faire le tour des médias pour supplier Elyes Fakhfakh d’intégrer son parti (ou peut-être de l’intégrer lui-même) au gouvernement, car il ne supporte plus sa position actuelle. L’opposition risquant d’être coûteuse pour lui, il s’agite pour essayer de mettre un pied dans le pouvoir exécutif. Sait-on jamais…
Le président de Qalb Tounes, qui est poursuivi en justice dans plusieurs affaires de corruption financière, d’évasion fiscale et de blanchiment d’argent (excusez du peu !) n’a pas encore désespéré : il en faudrait plus pour le voir abandonner ses louvoiements et ses supplications devant la porte du palais de la Kasbah.
Le chef du gouvernement étant resté jusque-là sourd aux pressions d’Ennahdha, voulant imposer ses deux «créatures», Qalb Tounes et Al-Karama, au sein d’un improbable gouvernement d’union nationale, Nabil Karoui, dont le parti a enregistré récemment une dizaine de démissions et risque de voir sa représentation à l’Assemblée se rétrécir comme peau de chagrin, semble prêt à toutes concessions pour seulement mettre un pied ou même un doigt sinon au gouvernement, du moins dans ses rouages, en y plaçant certains des dirigeants de son parti, de façon à les retenir avant qu’ils ne l’abandonnent tous à son sort.
Intervenant aujourd’hui, vendredi 22 mai 2020, au micro de Shems FM, il a cru devoir rappeler que c’est le bloc parlementaire de son parti qui a mis son poids pour faire tomber le gouvernement Habib Jemli, le candidat d’Ennahdha, lors du vote de confiance, une manière de rappeler à Elyes Fakhfakh qu’il doit un peu son poste à M. Karoui et qu’à ce titre, il est tenu de renvoyer l’ascenseur.
Nabil Karoui sous-entend aussi qu’avec ce vote, il a mécontenté ses alliés islamistes, grand sacrifice s’il en est, et que pour cette raison, il mérite, sinon une récompense, du moins une compensation. Et comme pour se dédouaner de ses anciens mensonges, lors de la campagne électorale pour la présidentielle, perdue devant Kaïs Saïed, lorsqu’il jurait de ne jamais s’allier avec Ennahdha, le patron de Nessma TV, diffusant illégalement ses programmes depuis 2014, a cru devoir rappeler que son parti s’accorde avec Ennahdha à chaque fois que l’intérêt du pays l’exige. «Tous les autres acteurs de la scène politique s’accordent aussi avec Ennahdha», a-t-il ajouté, en déplorant que certaines parties, dont Tahya Tounes, cherchent à débaucher d’autres députés Qalb Tounes pour tenter de former une ceinture politique pour Elyès Fakhfakh qui votera ses projets de lois. Une manière de dire à ce dernier : «Vous ferez mieux de compter sur une alliance Ennahdha-Qalb Tounes pour avoir la majorité dont vous avez besoin pour faire voter vos projets de loi».
Les arguments se succèdent, plus oiseux les uns que les autres, pour justifier l’entrée de Qalb Tounes au gouvernement. Mais la posture reste la même, celle d’un homme aux abois, ou d’un loup qui louvoie et tourne en rond autour de la bergerie. L’y fera-t-on entrer ?
I. B.
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