Que les partis islamistes Ennahdha et Al-Karama détestent cordialement le Parti destourien libre (PDL) et sa présidente, Abir Moussi, cela va de soi, car ils y voient, à juste titre, leur principal adversaire politique. Mais pourquoi les partis Attayar et Echaab se sentent-ils eux aussi obligés de s’attaquer, systématiquement, au PDL et à Moussi?
Par Imed Bahri
Cette position est non seulement contre-productive, car elle apporte de l’eau au moulin d’Ennahdha et d’Al-Karama, censés être aussi des adversaires d’Attayar et d’Echaab, mais elle trahit, surtout, chez ses tenants, une forme de naïveté qui emprisonne les acteurs politiques dans une posture définitive et refuse de tenir pas compte des évolutions marquant les parcours des uns et des autres.
L’ancien régime est mort de sa plus belle mort
D’abord, s’agissant du PDL, ce parti est né il y a seulement quelques années et n’a rien à voir avec le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), au pouvoir sous la dictature de Ben Ali, même si certains de ses dirigeants se réclament encore des réalisations historiques de ce parti, notamment sur les plans économique et social. Il faut dire que la Tunisie laissée par Ben Ali se portait beaucoup mieux qu’elle ne se porte depuis qu’elle est conduite par les pseudo-« révolutionnaires».
Ensuite, le PDL partage aujourd’hui les mêmes aspirations démocratiques de tous les Tunisiens et lui attribuer une volonté de restaurer l’ancien régime participe d’un gros mensonge. Car l’ancien régime est mort de sa plus belle mort et il ne pourra plus ressusciter, car les conditions objectives ayant présidé à sa mise en place n’existent plus.
Pour leur part, Attayar et Echaab, dont beaucoup de dirigeants, à la notable exception de Mohamed Abbou, n’ont pas été de grands militants contre la dictature de Ben Ali (si c’était le cas, on l’aurait su), continuent de nous la jouer grands révolutionnaires devant l’Eternel et se bouchent le nez à chaque fois que l’on parle de Moussi et du PDL, dans une posture puriste qui frise le ridicule.
Une posture puriste qui frise le ridicule
Or, depuis le 14 janvier 2011, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et les rescapés de l’ancien régime se retrouvent aujourd’hui dans la plupart des partis, et surtout dans ceux qui se proclament soi-disant «révolutionnaires». Continuer à taxer les seuls Abir Moussi et PDL d’ancien RCdistes et continuer à leur faire la guerre, c’est participer d’une immense hypocrisie qui n’honore pas ses tenants. Et, surtout, hypothéquer l’avenir du pays en l’offrant sur un plateau à la coalition islamo-affairiste, incarnée par Ennahdha, Qalb Tounes et Al-Karama.
Aujourd’hui, face à cette coalition, les groupes de centre-gauche (Attayar et Echaab) et de centre droit (Tahya Tounes, PDL, Afek Tounes…) gagneraient à dépasser les susceptibilités idéologiques et ou personnelles, à se concerter plus étroitement et à harmoniser leurs positions, ne fut-ce qu’au niveau du parlement. Cela passe d’abord par l’abandon des postures pseudo-révolutionnaires, qui ne mangent pas de pain. Le pays n’est plus là…
Donnez votre avis