À l’occasion de la Journée internationale des femmes, des associations tunisiennes ont dénoncé dans un communiqué commun l’augmentation de la violence et de la discrimination contre les femmes en Tunisie. Elles y ont vu « une honte pour les détenteurs du pouvoir et un mépris grave pour la Constitution et la loi ». Nous reproduisons ci-dessous ce communiqué et la liste des associations signataires.
Les associations soussignées considèrent que la récente campagne d’arrestations et de procès à l’encontre des femmes militantes ainsi que l’augmentation de la violence, de la discrimination et du harcèlement à l’encontre des femmes tunisiennes dans divers domaines et espaces dont la Chambre des représentants du peuple, est une honte pour ceux qui tiennent les rênes du pouvoir et un mépris grave pour la Constitution et la loi n° 58 de 2017 relative à l’élimination de la violence à l’encontre des femmes.
Quelques jours avant cette Journée internationale, où les nations se font les avocats de l’égalité des salaires, du droit à la participation politique et de l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la militante féministe Rania Amdouni est jugée et emprisonnée ; la militante des droits de l’Homme, Nawres Zoghbi Douzi est brutalisée par des activistes de l’organisation estudiantine dépendant du mouvement Ennahdha; des femmes, qui ont occupé le hall du ministère de la femme pour revendiquer leur droit au travail, sont victimes de violences policières. C’est précisément le 8 mars que la secrétaire générale de l’Union générale des étudiants de Tunisie Ouarda Atig est jugée à cause de son engagement dans le mouvement des jeunes, des syndicalistes et des étudiants.
Face à cette offensive, les associations soussignées appellent toutes les forces démocratiques à œuvrer collectivement et inlassablement pour mettre fin aux actes d’agression éhontés contre les femmes tunisiennes, pour traduire en justice les auteurs de ces violations et pour lever les obstacles qui les empêchent de contribuer à la réparation des préjudices commis par des politiciens qui ont échoué et qui ne croient pas au droit des femmes à la liberté, à l’égalité et à l’équité garantis par la Constitution.
Elles condamnent fermement la vague d’agressions et d’arrestations, de poursuites judiciaires ainsi que le harcèlement commis, ces dernières semaines, par de nombreux agents de sécurité à l’encontre de militantes, en raison de leur participation à des manifestations pacifiques contre la pauvreté, le chômage et la discrimination. Elles dénoncent également le harcèlement subi par des femmes journalistes de la part des membres du comité d’organisation du Mouvement Ennahdha et plusieurs de ses partisans afin de les empêcher de couvrir la marche organisée par la direction du mouvement, le 27 février dernier, pour soutenir la position de son président, Rached Ghannouchi, en désaccord avec le président Kaïs Saied et ses adversaires au sein du Mouvement Ennahdha.
Il convient de rappeler que la recrudescence de la violence et de la discrimination à l’égard des femmes et des jeunes filles en Tunisie est le résultat des campagnes de propagande méthodiques lancées en 2012, sous les auspices du Mouvement Ennahdha et avec la participation de prédicateurs radicaux originaires d’États arabes despotiques, dont le prédicateur égyptien Wajdi Ghonim. Aujourd’hui, ces campagnes se poursuivent, grâce à l’appui des forces réactionnaires, dans divers domaines y compris les médias et les réseaux sociaux ainsi que par le biais d’un discours violent et dépréciatif pour les femmes, tenu par des responsables de l’État tunisien et des membres de l’Assemblée des Représentants du peuple.
Les associations signataires expriment leur soutien à l’appel lancé récemment par le l’Union générale tunisienne du travail pour exhorter l’État tunisien à ratifier la Convention n° 190 de l’OIT relative à l’élimination de la violence sur les lieux de travail. Elles appuient également les appels lancés par les organisations féministes tunisiennes à l’Assemblée des Représentants du peuple tunisien pour qu’elle accélère l’harmonisation des lois avec l’article 21 de la Constitution et ce, en abrogeant toutes les dispositions discriminatoires et en accélérant la mise en discussion du projet de loi qui lui a été soumis depuis 2018, en vue d’éliminer certaines formes de discrimination en matière d’héritage. Elles demandent à toutes les institutions de s’acquitter de leurs obligations stipulées par la loi no 58 relative à l’élimination de la violence et d’allouer un budget clair pour sa mise en œuvre.
Elles rappellent également que les États les plus prospères, les plus stables et ayant obtenu les meilleurs résultats dans la lutte contre la corruption, la pauvreté et le chômage dans diverses parties du monde sont ceux qui protègent le plus les droits des femmes et garantissent le plus leur participation, sur un pied d’égalité avec l’homme, à la direction des hautes institutions de l’État.
Associations signataires :
Association de solidarité Laïque – Tunisie
Association des femmes tunisienne pour la recherche sur le développement
Association Dissonance
Association du droit à la différence
Association tunisienne de défense des libertés individuelles
Association tunisienne de défense des valeurs universitaires
Association tunisienne des femmes démocrates
Association Vigilance pour la démocratie et l’Etat civique
Centre de Tunis pour la liberté de la presse
Coalition tunisienne pour l’abolition de la peine de mort
Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie
Euromedrights Tunis
Fédération des Tunisiens Citoyens des deux Rives
Forum Attajdid pour la pensée progressiste
Free Sight Association
Générations Solidaires
L’Association Arts et Cultures des deux Rives
L’Association Citoyenneté, Développement, Cultures & Migrations Des Deux Rives
L’association Création et Créativité pour le Développement et l’Embauche
L’association Perspectives el Amel tounsi
La Fondation Hassen Saadaoui pour la démocratie et l’égalité
L’association L’ART RUE
L’association Tunisienne de Lutte contre la Violence
L’Association tunisienne de soutien aux minorités
Le Comité de Vigilance pour la Démocratie en Tunisie – Belgique
Le Groupe Tawhida Ben Cheikh, Recherche et Action pour la santé des Femme
Ligue des écrivains tunisiens libres
Ligue tunisienne de défense des droits de l’homme
No Peace Without Justice association
Observatoire national pour la défense du caractère civil de l’Etat
Organisation 23_10 de Soutien au Processus de la Transition Démocratique
Organisation du martyr de la liberté Nabil Barakati : Souvenir & fidélité
Syndicat national des journalistes tunisiens
Tunisian Forum For Youth Empowerment
Union des Tunisiens pour une Action Citoyenne
Union Tunisienne des medias associatifs
Zembra Echo
Donnez votre avis