L’instabilité du poste de ministre de la Santé depuis la révolution de 2011 n’a fait qu’aggraver la situation déjà déplorable de ce secteur en Tunisie. Le limogeage, hier, mardi 20 juillet 2021, du ministre Faouzi Mehdi, le cinquième en deux ans, et son remplacement par un ministre intérimaire, qui plus est, dans un contexte de crise pandémique difficile, aura des conséquences désastreuses. Le chef du gouvernement a-t-il mesuré les graves conséquences de sa décision ?
Par Pr Faouzi Addad *
Après avoir terminé notre méchoui de l’Aid Al-Idha, la fin de journée d’hier fut riche en rebondissements avec son lot de nouvelles, l’une bonne et l’autre mauvaise.
Pour la bonne nouvelle, disons que nous avons eu l’agréable surprise de voir que les jeunes Tunisiens étaient finalement très favorables à la vaccination indépendamment du type de vaccin.
Dr Mehdi ne peut endosser à lui seul l’échec de la stratégie actuelle
Bien évidemment, comme souvent, si le fond était très positif, la forme était catastrophique avec les bousculades et le non-respect de la distanciation. Finalement même celui qui n’a pas eu le vaccin a eu droit au virus en cadeau pour le distribuer au reste de sa famille. La stratégie de l’immunité collective non déclarée continue à faire son bout de chemin.
Pour la mauvaise nouvelle, c’est bien évidemment le limogeage du ministre de la Santé, et là, il n’y avait ni le fond et ni la forme. Le fond n’y était pas car tous le monde sait que le ministre n’a finalement pas du tout été aidé par l’ambiance politique de manière générale et donc il ne peut endosser à lui seul l’échec cuisant de la stratégie actuelle. On se rappelle tous que le ministre avait à plusieurs reprises demandé un confinement total mais que cela n’avait pas été accepté à la tête de l’exécutif. Il y a certes beaucoup de choses à lui reprocher mais une démission collective aurait été plus judicieuse (oui je dois me réveiller de mon rêve).
L’abondance des vaccins cause plus de problèmes que la pénurie
Sur la forme maintenant, limoger un ministre un jour de fête est inacceptable et en plus son remplacement dans ce contexte de crise pandémique sera très difficile. Qui viendra hériter de ce bilan calamiteux avec des plaintes et des procès qui vont fuser de partout. Les prochains jours vont nous dévoiler la gravité de cette décision aux conséquences désastreuses.
L’instabilité du poste de ministre de la Santé depuis la révolution n’a fait qu’aggraver la situation déjà déplorable du secteur. J’avais prévenu dans un précédent poste que l’abondance des vaccins, grâce aux aides internationales, allait causer plus de problèmes que la pénurie. Finalement nous avons été plus délétère que le virus lui même.
* Professeur de cardiologie.
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