Mohamed Abbou a appelé le président Kais Saied à mettre fin aux «mesures exceptionnelles» prévues par l’article 80 de la Constitution, à retourner à la Constitution de 2014, sans revenir au parlement dont les travaux ont gelés, et à organiser des élections législatives anticipées.
L’ancien président du Courant démocratique (Attayar) et ancien ministre, qui intervenait dans l’émission «Jaoueb Hamza» sur Mosaïque FM, dimanche 19 décembre 2021, commentait les déclarations de Saïed concernant «le retour de certains politiciens sur leur soutien initial aux décisions du 25 juillet dernier après avoir reçu des fonds étrangers», estimant que «le fait de ne pas déférer ceux qui ont reçu ces fonds devant la justice est inacceptable.»
Abbou a également estimé que le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a protégé la corruption et ne détient aucun dossier disciplinaire contre les juges, car tous les dossiers sont aux mains de l’inspection du ministère de la Justice, a-t-il affirmé.
Dans ce contexte, Abbou a expliqué que Saïed cherche à tromper les Tunisiens en laissant croire que, dans sa guerre contre la corruption, il a été trahi par les juges, soulignant que le chef de l’Etat possède plusieurs dossiers sensibles et ne les a pas encore envoyés à la justice. C’est donc lui, en d’autres termes, qui se dérobe à ses responsabilités et non pas seulement les juges sur lesquels il se défausse.
«Les explications juridiques fournies par les professeurs de droit constitutionnel pour justifier les décisions de Kaïs Saïed resteront une honte sur leur front», a aussi déclaré M. Abbou, par allusion à leurs explications concernant l’activation de l’article 80 de la Constitution et les mesures exceptionnelles prises depuis le 25 juillet dernier, qui seraient, selon lui, illégales dans la manière où elles avaient été prises.
En revanche, et en réponse aux allusions du président aux personnalités politiques qui sont passées du soutien franc aux mesures exceptionnelles à leur rejet catégorique, et qui, selon lui, s’attendaient à se voir décerner des postes mais n’ont pas été satisfaits, dans une allusion limpide à Abbou, ce dernier a affirmé qu’une personne proche du président de la république l’avait appelé au cours du mois de février pour lui proposer un poste, et qu’il lui aurait répondu : «Quand le président me convoquera, je lui dirai ma réponse», laissant entendre par là qu’il ne pouvait faire partie des personnes dénoncées par le président et qu’il aurait pu avoir un poste s’il l’avait voulu.
L’ancien président d’Attayar a également confirmé que le président Saïed avait personnellement ordonné l’emprisonnement du journaliste Amer Ayed de la chaîne Zitouna TV. Dans ce contexte, Abbou a mis en garde le chef de l’État contre la violation des droits de l’homme et des libertés, affirmant qu’il s’agit d’une ligne rouge et qu’il n’y a pas de place pour le compromis.
Le journaliste Amer Ayed a été arrêté le 3 octobre, après la diffusion d’un poème dans son émission télévisée sur la chaîne Zitouna TV, qui insultait en des termes à peine voilés le président de la république. Les juges du tribunal militaire ont considéré qu’il a porté atteinte à l’image du chef de l’Etat, de la Tunisie et de son armée.
Le tribunal militaire a par la suite décidé de libérer le journaliste Amer Ayed. Son affaire sera examinée le 20 janvier 2022 et il comparaîtra en liberté provisoire.
Zitouna TV, qui diffuse ses programmes illégalement, est, rappelons-le, proche sinon financée (indirectement) par le parti islamiste Ennahdha.
Imed Bahri
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