Que l’on me permette cette extrapolation. Que l’on m’autorise de croire qu’il suffirait pour notre pays, avec ses très petits moyens, de vouloir soulever les montagnes pour qu’il le fasse. Les Aigles de Carthage l’ont fait face au Nigéria, avec la simplicité la plus simple, en y mettant la solidarité, le réalisme et la bonne volonté qu’il fallait. Pourquoi notre pays ne le ferait-il pas sur d’autres terrains? Je sais que c’est là le vœu pieux d’un homme qui désespère de voir sa Tunisie s’en sortir…
Par Moncef Dhambri *
C’est ce que mes candeur et naïveté septuagénaires m’ont inspiré, hier soir, dimanche 23 janvier 2022, à la fin de la rencontre des 1/8 de finale opposant la Tunisie au Nigéria (1-0).
Bien évidemment, pour ce qui des 90 minutes du match, nous laisserons aux experts du ballon rond le dernier mot sur les détails et subtilités de cette rencontre, c’est-à-dire tous leurs discours sur les systèmes et styles de jeu, les schémas tactiques et autres jargons de ces messieurs-qui-savent-tout.
Taper, taper encore et aller droit au but
En toute franchise, l’avis de ces spécialistes importe peu, car ils se sont TOUS trompés sur l’issue du match d’hier, au stade Roumdé-Adjia, à Garoua au Cameroun. TOUS ont parlé du géant nigérian et du Petit Poucet tunisien, d’un Nigéria qui allait plier la partie en deux-temps-trois-mouvements, des nombreuses faiblesses de l’équipe tunisienne, etc… A les écouter, on ferait mieux… de se mettre sous la dent un épisode d’une petite série-télé ou trouver plus saine occupation que de regarder l’humiliation droit dans les yeux.
De cette rencontre, pour notre part, nous préférons retenir autre chose, plus facile à comprendre, cette culture que l’on a apprise sur les «bat7a» de tous les quartiers de nos villes, villages et petits hameaux de la Tunisie, avant que le béton n’impose sa loi: nous avons appris à taper dans le ballon, taper et taper encore, aller droit au but pour marquer.
Bien sûr, les temps ont changé et nous n’en sommes plus là. Bien sûr, le football a évolué, il est devenu un art, une science et il s’est professionnalisé, nous dit-on… Et pourtant, pour l’essentiel, nous semble-t-il, le football restera toujours une affaire de 22 bonhommes et de ce qu’ils ont dans les jambes et surtout dans la tête. Hier, dans la tête –et aussi dans le cœur–, notre onze national en avait plus, beaucoup plus, que les Nigérians.
Faire preuve de réalisme, de discipline et de solidarité
Passons, à présent, du coq à l’âne: si les Tunisiens, qui savent tout de l’état désastreux de l’économie de leur pays, des moyens qu’il n’en a plus, des faillites de toutes ses institutions et des échecs de ses dirigeants, de ses élites et de sa classe politique, réapprennent à croire en eux-mêmes et en leur génie –oui, il y a un génie tunisien ! –, s’ils se remettent au travail, redéfinissent et s’accordent sur les priorités de la situation actuelle, s’ils cessent de se diviser sur tout et n’importe quoi et s’ils font valoir leurs devoirs avant leurs droits, ils remonteront la pente. Sans aucun doute.
Tout simplement, il suffira aux Tunisiens de s’assurer qu’ils ont définitivement mis hors-jeu les fréristes d’Ennahdha et leurs alliés, de ne plus se laisser berner par la partitocratie vaurienne et autres crapules, et de faire preuve de réalisme, de discipline et de solidarité.
Autre écueil à éviter: prendre pour argent comptant les chimères de la sorcellerie populiste. Elles ne nourrissent pas. Elles peuvent même être plus dangereuses que les potions islamistes…
* Universitaire.
Les Tunisiens, à l’instar de leurs Aigles, doivent réapprendre à croire en eux-mêmes et en leur génie.
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